Peut-on contester un testament ?

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À la suite du décès d’un être cher, les esprits sont à vifs et de nombreux conflits peuvent naître de cette situation. En effet, de nombreuses personnes peuvent s’estimer lésées par la répartition de l’héritage quand d’autres peuvent considérer que les dernières volontés du défunt ne sont pas respectées.

Le testament est un acte juridique unilatéral par lequel une personne dispose de tout ou partie de ses biens pour le temps où elle ne sera plus. Son efficacité suppose la réunion de certaines conditions de forme et de fond.

L’article 967 du Code civil dispose ainsi : « Toute personne pourra disposer par testament soit sous le titre d’institution d’héritier, soit sous le titre de legs, soit sous toute autre dénomination propre à manifester sa volonté ». Son efficacité suppose la réunion de certaines conditions de forme et de fond.

Un arrêt de la deuxième chambre civile du 10 mars 2022 (Cass. 2e civ., 10 mars 2022 n° 20-19.655) précise que lorsqu’un assuré effectue la désignation ou la substitution d’un contrat d’assurance sur la vie par le biais d’un testament, avant son décès, cette opération n’exige pas d’être communiquée à l’assureur pour être valide.

Il n’est pas rare que des héritiers appelés à la succession du de cujus  (c’est à dire du défunt) veuillent contester et voir annuler un testament qui leur est défavorable, ou qui leur parait injuste ou encore vicié.

A titre d’exemple, nous assistons actuellement à un litige opposant Laeticia Hallyday, veuve de Johnny, et les deux enfants de ce dernier, David Hallyday et Laura Smet, litige illustrant que contester un testament est possible. Ce litige illustre la possibilité de contester un testament pour les héritiers du de cujus.

Dans tous les cas, la première étape au moment du décès d’une personne est de trouver son testament afin de pouvoir faire exécuter ses volontés. Toutefois, il est possible de contester un testament pour plusieurs raisons. Une telle contestation a pour effet de geler la succession jusqu’au règlement du litige et selon différents fondements, jusqu’au règlement du litige.

I. Contester un testament : les conditions de forme du testament olographe

Le testament olographe est le testament écrit par le testateur. L’article 970 du Code civil précise que ce testament n’est pas valable s’il n’est pas écrit en entier, daté et signé de la main du testateur :« le testament olographe ne sera point valable s’il n’est écrit en entier, daté et signé de la main du testateur : il n’est assujetti à aucune autre forme ».

 Le testament olographe est un testament de seing privé : il est rédigé par le défunt et est conservé en lieu sûr jusqu’à sa mort. Ce n’est qu’à la mort de ce testateur que le testament produira alors effet. C’est lors de celle-ci que le document va produire des effets. Toutefois, plusieurs conditions doivent être réunies pour que le testament soit valide. Si celles-ci ne sont pas réunies, il est possible de le contester.

La première de ces exigences émanant de l’article 970 du Code civil est celle du caractère écrit du testament. Celui-ci doit avoir été rédigé par la main même du testateur. Le testament doit également avoir été daté et signé par le testateur.

Cela permet d’identifier le testament. Si ces trois conditions de forme ne sont pas réunies, il est possible de contester le testament. La science peut ici apporter son aide. En effet, dans le cas où un doute persistait, il est recommandé de faire appel à un graphologue qui pourra certifier ou non l’écriture du testament de la main du de cujus.

Ainsi, il faut que le testament soit entièrement rédigé de la main de la personne défunte. Celle-ci doit également dater et signer son document. Dans le cas où ces trois conditions de forme ne seraient pas réunies, il est possible de contester le testament.

Il est intéressant ici de souligner que dans le doute, une analyse graphologique peut être menée sur le testament afin d’en certifier l’écriture (= répétition sous une formulation différente de la dernière phrase du paragraphe précédant).

Cependant, l’existence de mentions apposées par un tiers, qui ne concernent que l’adresse et la date de naissance du testateur, éléments dont la mention n’est pas exigée par la loi, n’affecte pas la validité du testament (Cour de cassation 1re chambre civile du 30 septembre 2009, n° 08-15.007).

Mais le testament écrit de la main d’un tiers sous la dictée du testateur est nul même s’il a été signé en présence de deux témoins qui avaient signé avec le défunt et si l’intention de gratifier la légataire était attestée par des témoignages notamment de médecins ayant soigné le testateur (Cour de cassation 1re Chambre civile du 15 juin 2017, n° 16-21.069, n° 763 D).

La première chambre civile dans un arrêt du 11 février 1997 (Cass. 1re civ., 11 février 1997 n° 95-12.382) précise que lorsque le testateur est dans l’incapacité de former des signes lisibles en raison de sa vieillesse ou de son état de santé, un tiers peut lui apporter une assistance physique en guidant sa main. Si cette assistance n’altère pas l’écriture du testateur et que celui-ci reste identifiable, le testament demeure valide.

La solution est différente dans le cas d’un testament authentique. Celui-ci se définit comme un testament recueilli par acte authentique par un notaire.

L’article 972 du Code civil prévoit ainsi : « Si le testament est reçu par deux notaires, il leur est dicté par le testateur ; l’un de ces notaires l’écrit lui-même ou le fait écrire à la main ou mécaniquement. S’il n’y a qu’un notaire, il doit également être dicté par le testateur ; le notaire l’écrit lui-même ou le fait écrire à la main ou mécaniquement. Dans tous les cas, il doit en être donné lecture au testateur ».

Dans le cas d’un testament authentique donc, la contestation à partir des conditions de forme apparaît plus délicate dans la mesure où celui-ci est établi en compagnie d’une ou deux notaires. Cependant, d’autres aspects peuvent être remis en cause afin de contester un testament.

Dans le cas d’un testament authentique, la contestation à partir des conditions de forme apparaît plus délicate dans la mesure où celui-ci est établi en compagnie d’un notaire. Toutefois, il est possible de contester un testament en s’appuyant sur d’autres aspects.

Alors que dans le cas d’un testament authentique, qui est reçu par deux notaires ou par un notaire assisté de deux témoins.

Il doit être dicté par le testateur, écrit à la main ou mécaniquement par le notaire et lu par ce dernier (Code civil, article 971).

Le fait que le testament ait été remis dactylographié au notaire qui en a fait la lecture au testateur ne fait pas obstacle à la nullité (Cour de cassation 1re chambre civile du 26 septembre 2007, n° 05-19.909, n° 1027 FS – P + B) ; dans le cas d’un testament établi en présence d’une personne ne parlant pas le français, la Cour de cassation prononçait la nullité du testament lorsqu’un interprète avait dicté les volontés du testateur (Cour de cassation 1re chambre civile du 12 juin 2018, n° 17-14.461), mais l’article 972 du Code civil a été modifié pour permettre en ce cas de faire dicter le testament par un interprète que le testateur choisit sur la liste des experts dressée par chaque Cour d’appel à moins que le notaire et les témoins ou les deux notaires comprennent eux-mêmes la langue parlée par le testateur.

La première chambre civile dans un arrêt du 9 juin 2021 (Cass. 1re civ., 9 juin 2021 n° 19-21770) a affirmé qu’un testament olographe rédigé dans une langue non compris par son auteur, ne peut être considéré comme l’expression de sa volonté.

Un testament ne peut être fait que par une seule personne. Sont nuls, les testaments faits par plusieurs personnes au profit d’un tiers et ceux par lesquels deux personnes se consentent des libéralités réciproques (Code civil, article 968) et ce, alors même que par un testament ultérieur, le testateur a déclaré confirmer le testament nul sans reprendre expressément les dispositions contenues dans ce testament (Cour de cassation 1re chambre civile du 31 mars 2016, n° 15-17.039, n° 316 F – P + B) .

Il en va également ainsi notamment dans le cas où deux partenaires ayant conclu un PACS avaient convenu de mettre leurs biens en indivision et légué dans un même document, en cas de décès de l’un ou de l’autre, leurs droits indivis au partenaire survivant (Cour de cassation 1re chambre civile du 4 juillet 2018, n° 17-22.934, n° 717 F – P + B).

Cet exemple jurisprudentiel démontre que, malgré des intentions louables, il est nécessaire d’être très prudent lors de la rédaction d’un testament. Ces dernières volontés peuvent en effet avoir un impact significatif sur la vie et le patrimoine des vivants.

Comme exprimée précédemment, la contestation d’un testament rédigé par ou devant notaire est délicate sur le plan des exigences formelles. Cependant, d’autres moyens d’annulation peuvent être envisageables et méritent d’être évoqués.

La contestation à partir des conditions de forme apparaît plus délicate dans la mesure où celui-ci est établi en compagnie d’un notaire. Toutefois, il est possible de contester un testament en s’appuyant sur d’autres aspects.

II. Comment contester un testament : la répartition de l’héritage

La répartition de l’héritage du de cujus est un sujet des plus sensibles au moment du règlement de la succession. La loi a introduit une répartition impérative, à laquelle il n’est pas possible de déroger et qui dépend du nombre d’héritiers.

Ainsi, l’article 913 du Code civil dispose : « Les libéralités, soit par actes entre vifs, soit par testament, ne pourront excéder la moitié des biens du disposant, s’il ne laisse à son décès qu’un enfant ; le tiers, s’il laisse deux enfants ; le quart, s’il en laisse trois ou un plus grands nombres. L’enfant qui renonce à la succession n’est compris dans le nombre d’enfants laissés par le défunt que s’il est représenté ou s’il est tenu au rapport d’une libéralité en application des dispositions de l’article 845 ».

La loi du 24 août 2021 (loi n° 2021-1109) dite « loi CRPR » ajoute un alinéa 3 à l’article 913 du Code civil ).  Celui-ci dispose : « Lorsque le défunt ou au moins l’un de ses enfants est, au moment du décès, ressortissant d’un État membre de l’Union européenne ou y réside habituellement et lorsque la loi étrangère applicable à la succession ne permet aucun mécanisme réservataire protecteur des enfants, chaque enfant ou ses héritiers ou ses ayants cause peuvent effectuer un prélèvement compensatoire sur les biens existants situés en France au jour du décès, de façon à être rétablis dans les droits réservataires que leur octroie la loi française, dans la limite de ceux-ci. » Cette disposition s’applique aux successions ouvertes à compter du 1er novembre 2021, date d’entrée en vigueur de la loi.

Il est en effet possible de contester un testament dans le cas où la répartition de l’héritage n’est pas conforme aux dispositions énoncées à l’article 912 du Code civil. Cet article dispose qu’une part minimale de l’héritage, dépendant du nombre d’héritiers, doit être accordé à chacun des héritiers.

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Cette part est de 50 % s’il n’y a qu’un héritier, 33 % pour deux et 25 % si trois héritiers ou plus sont présents.  Dans le cas où cette condition de répartition ne serait pas respectée, il est possible de contester le testament.

III. Contester un testament : l’état mental du testateur

Pour pouvoir tester valablement, il faut être sain d’esprit, mais seuls les successeurs héritiers par le sang et légataires universels peuvent demander la nullité pour insanité d’esprit (Cour de cassation, 1re chambre civile du 17 février 2010, n° 08-21.927). La libéralité est nulle si le consentement a été vicié par l’erreur, le dol ou la violence (Code civil, article 901).

L’article 901 du Code civil dispose que « pour faire une libéralité, il faut être sain d’esprit. La libéralité est nulle lorsque le consentement a été vicié par l’erreur, le dol ou la violence ».

Il est en conséquence possible de contester un testament dans le cas où il est prouvé que l’état mental du testateur ne lui permettait pas d’établir un tel document, ou dans le cas où il aurait été victime d’un abus de faiblesse.

La première chambre civile dans un arrêt du 12 octobre 2022 (Cass. 1re civ., 12 octobre 2022 n° 21-11408) a reconnu qu’en présence d’un testateur souffrant d’une altération sévère de ses capacités visuelles rendant ainsi impossible sa lecture, son testament mystique doit être invalidé. En effet, son incapacité à lire génère une incertitude quant à la connaissance du contenu de l’acte présenté comme étant son testament.

L’article 223-15-2 du Code pénal dispose : « est puni de trois ans d’emprisonnement et de 375 000 euros d’amende l’abus frauduleux de l’état d’ignorance ou de la situation de faiblesse soit d’un mineur, soit d’une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur, soit d’une personne en état de sujétion psychologique ou physique résultant de l’exercice de pressions graves ou réitérées ou de techniques propres à altérer son jugement, pour conduire ce mineur ou cette personne à un acte ou à une abstention qui lui sont gravement préjudiciables.

 Lorsque l’infraction est commise par le dirigeant de fait ou de droit d’un groupement qui poursuit des activités ayant pour but ou pour effet de créer, de maintenir ou d’exploiter la sujétion psychologique ou physique des personnes qui participent à ces activités, les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 750 000 euros d’amende ».

La démonstration d’une diminution des facultés mentales est indispensable pour prouver l’abus de faiblesse. Cette information peut être inscrite dans le dossier médical d’un patient.

Or, seule une personne qualifiée peut accéder aux données d’un dossier médical. Il est donc recommandé de recourir à un avocat qui pourra requérir d’un service de santé ou d’un praticien, la communication dudit dossier.

IV. Contester un testament pour atteinte à la clause réservataire.

Lorsqu’il apparaît qu’une libéralité excède le disponible et porte atteinte à la réserve d’un héritier, elle peut être entièrement ou partiellement résolue selon qu’elle excède en totalité ou en partie le disponible. Les héritiers peuvent dans ces conditions contester le testament du défunt. (Cour de cassation, 1re chambre civile du 13 février 2019, n° 18-11.642, n° 160 F – P + B).

L’article 912 du Code civil prévoit en effet que « la réserve héréditaire est la part des biens et droits successoraux dont la loi assure la dévolution libre de charges à certains héritiers dits réservataires, s’ils sont appelés à la succession et s’ils l’acceptent. La quotité disponible est la part des biens et droits successoraux qui n’est pas réservée par la loi et dont le défunt a pu disposer librement par des libéralités ».

 Les articles 913 et 914 du Code civil complètent le dispositif en prévoyant les parts dévolues aux héritiers réservataires. Le testament pourra ainsi être remis en cause s’il lèse les héritiers, de la part qui leur est réservée par la loi.

La loi du 24 août 2021 (loi n° 2021-1109) dite « loi CRPR » dispose que les notaires sont tenus à une obligation d’information concernant la protection de la réserve héréditaire de tout héritier réservataire. Il s’agit d’une obligation de moyen et non de résultat.

SOURCES :

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