Héritiers désignés par le défunt

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La dévolution successorale détermine les héritiers appelés à recueillir la succession. C’est-à-dire les personnes qui recevront l’héritage.

Pour cela, il existe un ordre, le premier étant celui des descendants qui priment tous les autres, à l’exception du conjoint successible appelé à la succession et sauf exhérédation (entendu comme l’action de déshériter) possible en présence de descendants.

La réforme initiée par la loi du 3 décembre 2001 met fin à l’inégalité qui résidait jusqu’à lors entre les héritiers naturels et légitimes EN supprimant ces notions. Désormais l’égalité entre les enfants est affirmée et s’applique depuis lors aux successions ouvertes avant la loi et non encore partagées.

La détermination des droits d’usufruit ou de propriété du conjoint soulève diverses difficultés, notamment s’il a reçu des libéralités. En présence des père et mère, le conjoint a en effet droit à la moitié en propriété. En présence du père ou de la mère, il a droit aux trois quarts de la succession.

À défaut de descendants et des père et mère, le conjoint écarte tout autre parent : il aura droit à une réserve héréditaire d’un quart de la succession à défaut de descendants. Toutefois, les collatéraux privilégiés auront un droit de retour de la moitié des biens reçus par le défunt de ses ascendants. L’objet de ce droit de retour fait l’objet de discussions.

C’est en effet que le conjoint bénéficie de droits spécifiques : droit temporaire et viager au logement. Le défunt ne peut avoir privé le conjoint du droit viager que par un testament notarié. Un testament olographe, même antérieur à la loi du 3 décembre 2001 sera sans effet à cet égard.

L’article 721 du Code civil prévoit que la dévolution se fait par la loi seulement si le défunt n’a pas organisé sa succession. On parle alors de dévolution légale.  L’article dispose ainsi : « Les successions sont dévolues selon la loi lorsque le défunt n’a pas disposé de ses biens par des libéralités. Elles peuvent être dévolues par les libéralités du défunt dans la mesure compatible avec la réserve héréditaire ».

Ainsi, le défunt peut exprimer sa volonté concernant ses héritiers par des actes précis. Cependant, cette volonté est limitée par la loi, grâce à la réserve héréditaire.

Bien que le défunt puisse désigner des héritiers, un individu appelé à recueillir une succession légale ou testamentaire ne devient pas héritier contre sa volonté.

Il dispose d’une option qui lui permet d’accepter purement et simplement ou à concurrence de l’actif net ou bien de renoncer. Le successible fait son choix, selon les circonstances, en appréciant les avantages et les inconvénients présentés par chacun des partis qui s’offrent à lui.

I – Les héritiers définis par des actes 

Le droit des successions permet de prévoir, à l’avance, la transmission de son patrimoine à ses héritiers ou à des tiers. Le défunt peut, à travers certains actes, transmettre une part de son patrimoine à la personne de son choix.

Il existe différents actes juridiques permettant de répondre à ces attentes ;

  • L’assurance-vie: solution qui permet de constituer un capital et de le faire fructifier de son vivant. En cas de décès, le capital est versé aux bénéficiaires désignés par le dé Il s’agit d’un moyen efficace de protéger son concubin, partenaire ou tout proche qui n’a pas de lien de parenté avec le défunt et lui assurer d’avoir une capacité financière lui permettant de faire face au décès de l’assuré.
  • La donation: outil de transmission d’un bien ou d’une somme d’argent à la personne de son choix de façon irrévocable. Toutefois, une donation ne peut entraver la réserve héréditaire. Elle est renouvelable tous les 15 ans, permettant une transmission progressive.
  • Le testament: acte juridique permettant de transmettre son patrimoine à la personne de son choix. Il a l’avantage d’être modifiable et révocable. Il ne prend effet qu’au moment du décès. La réserve héréditaire doit être respecté
  • Lescontrats successoraux entre époux: ils sont une exception, car les pactes sur successions futures sont prohibés du fait des désirs de mort qu’ils peuvent susciter. Néanmoins, il est possible d’envisager de tels contrats lorsqu’ils ont pour but de protéger le conjoint survivant ou le défunt. La protection du conjoint survivant peut prendre la forme de donation entre époux de biens à venir ou de donation au dernier vivant. La clause commerciale est également possible et permet la conservation d’un fonds de commerce, d’une exploitation agricole ou d’une clientèle civile que les époux exploitaient ensemble. Enfin, la séparation de corps conventionnelle permet la protection du défunt puisqu’en cas de séparation de corps par consentement mutuel, il est possible d’inclure une clause de renonciation aux droits successoraux.

Ces actes sont appelés des libéralités, et permettent donc de faciliter la transmission des biens. Il est possible, par le biais de ces mécanismes, de favoriser des personnes qui, légalement lors du décès, n’auraient pas de droits sur la succession. C’est notamment le cas des concubins et des partenaires de pacs. Seule une manifestation expresse de la volonté du défunt peut les rendre, héritiers.

II – La réserve héréditaire

Le défunt peut voir sa liberté limitée par ce que l’on appelle la réserve héréditaire. En effet, les libéralités consenties par le défunt sont encadrées et plafonnées dès lors qu’il laisse au jour de son décès, des parents proches.

La réserve héréditaire consiste en effet en une fraction de la succession qui est réservée à certains proches héritiers par la loi : un « minimum successoral garanti », selon l’expression de Pierre Catala (Préface à la thèse de Mlle Ioanna Kondyli, La protection de la famille par la réserve héréditaire en droits français et grec comparés : LGDJ, Bibl. dr. privé, t. 275, 1997, p. IX).

Elle a pour objet premier de soustraire au pouvoir de la volonté du de cujus une partie de son patrimoine en limitant sa liberté de donner et de tester (Code civil article 721). L’article 912 du Code civil dispose en effet : « La réserve héréditaire est la part des biens et droits successoraux dont la loi assure la dévolution libre de charges à certains héritiers dits réservataires, s’ils sont appelés à la succession et s’ils l’acceptent. La quotité disponible est la part des biens et droits successoraux qui n’est pas réservée par la loi et dont le défunt a pu disposer librement par des libéralités ».

Cette limitation est d’autant plus importante en droit français qu’elle se rencontre dans les successions les plus ordinaires – celles qui sont dévolues aux  descendants ou, à défaut, désormais, au conjoint survivant – et qu’elle peut aller jusqu’à ramener au quart la fraction successorale qui est laissée à la liberté de disposition du de cujus (ainsi, lorsqu’il laisse trois enfants ou plus).

La réserve héréditaire impacte donc directement et foncièrement la succession en cause. Cependant, si importante soit-elle, la réserve héréditaire n’absorbe jamais la totalité de la succession : elle laisse toujours le de cujus libre de disposer comme il l’entend d’une portion de celle-ci (au moins égale au quart) qui est dite, pour cette raison, quotité disponible.

En présence d’héritiers réservataires, la succession se divise par conséquent en deux fractions : la réserve héréditaire dont la dévolution est réglée par la loi sur un mode impératif (c’est-à-dire obligatoire) et la quotité disponible dont le sort est décidé librement par le de cujus et, à défaut seulement, par la loi au titre des dispositions supplétives de volonté.

Une transaction est ainsi établie entre la sphère d’autonomie individuelle que représente la quotité disponible et la défense des intérêts de la famille et de ses membres les plus proches que commande la réserve héréditaire.

Il existe une dualité de fonctions de la réserve héréditaire. En effet, la réserve héréditaire est en quelque sorte une institution essentiellement protectrice : elle a pour finalité de protéger les parents ou le conjoint qui en sont les bénéficiaires, contre les actes de disposition du de cujus (entendu comme la personne décédée). Elle ne comporte, par définition, aucune contrepartie équivalente à l’aliénation opérée qui est susceptible de les priver de tout droit dans la succession.

Il est classique de reconnaître plus précisément, deux fonctions complémentaires à la réserve : une fonction familiale, en tant qu’elle interdit l’exhérédation des réservataires au profit d’étrangers ou de parents éloignés. Et une fonction individuelle, en tant qu’elle interdit au de cujus d’avantager un réservataire par rapport aux autres au-delà des limites de la quotité disponible qu’il peut utiliser à cette fin.

Ces deux fonctions subsistent encore aujourd’hui en principe et continuent de rendre compte de la finalité protectrice de la réserve héréditaire. Mais dans un sens très altéré, et même différencié selon l’hypothèse. Car elles ont été profondément affectées par les réformes successives de la matière, issues des loi n° 2001-1135 du 3 décembre 2001 et n° 2006-728 du 23 juin 2006.

Ces deux fonctions de la resserve héréditaire ont en particulier étaient atteintes sur plusieurs aspects. Notamment, par la disparition de la réserve des ascendants et l’attribution en remplacement d’une réserve au conjoint survivant, lorsqu’il n’est pas en concours avec des descendants.

L’article 914-1 du Code civil dispose désormais : « Les libéralités, par actes entre vifs ou par testament, ne pourront excéder les trois quarts des biens si, à défaut de descendant, le défunt laisse un conjoint survivant, non divorcé ».

Ces fonctions ont aussi étaient atteintes par la généralisation de la réduction en valeur des libéralités excessives (Code civil, article 924) et par les possibilités désormais offertes aux enfants du de cujus de substituer leurs propres enfants dans l’attribution de leur part de réserve (Code civil, articles 754 et 913). L’atteinte porte également sur l’admission d’une renonciation anticipée à l’action en réduction des libéralités excessives (Code civil, article 929 à 930-5).

La fonction familiale de l’institution a elle une tout autre signification qu’à l’époque à laquelle elle avait été mise en place. La réserve n’appartenait en effet qu’à la parenté en ligne directe et où les libéralités adressées à des non-successibles étaient réductibles en nature en cas d’excès.

Certes, en offrant prioritairement une fraction de la succession aux descendants du défunt, et à défaut, au conjoint qui lui a survécu, la loi manifeste la permanence de cette fonction. Mais les devoirs du sang et l’idée de la conservation des biens dans la famille ont perdu leur valeur explicative.

Il apparaît plus difficile aujourd’hui de pérenniser et poursuivre ce principe. De plus, l’on ne peut même pas dire que la famille nucléaire a remplacé la famille lignagère dans l’ordre des préoccupations légales, puisque deux des innovations les plus importantes de la loi du 23 juin 2006 (l’admission de la représentation de l’enfant renonçant par ses propres enfants et l’institution de la donation-partage dite transgénérationnelle) ont consisté, précisément, à permettre aux enfants du de cujus de s’effacer au profit de leurs propres enfants, afin que ceux-ci recueillent en tout ou partie la part de réserve héréditaire qui aurait normalement dû leur advenir.

Sur le plan de la fonction individuelle de la réserve héréditaire, qui procède du principe de l’égalité successorale, elle n’a, dans un système monogamique, aucun sens, appliqué au conjoint survivant.

Elle ne se manifeste évidemment que dans les successions dévolues à la ligne directe descendante dans lesquelles la réserve héréditaire garantit à chaque enfant liberté et indépendance, en le protégeant contre une menace d’exhérédation utilisée à des fins illégitimes.

Elle empêche également la résurgence de préférence contraire à la conception française de l’égalité civile, tel le privilège d’aînesse ou de masculinité. Mais, même dans cet ordre, la dimension individuelle de cette protection a perdu de sa netteté et paraît difficile à justifier.

D’une part, en effet, la fonction égalisatrice de la réserve profite désormais systématiquement à la souche puisque la renonciation à succession laisse maintenant aux descendants du renonçant la faculté de recueillir sa part par voie de représentation.

Aussi bien, dans le cas de la donation-partage dite transgénérationnelle, qui procède de la même logique, l’article 1078-8 retient significativement que, dans la succession de l’ascendant donateur, les biens reçus par les enfants ou leurs descendants à titre de partage anticipé s’imputent prioritairement « sur la part de réserve revenant à leur souche ».

D’autre part, la renonciation anticipée à agir en réduction des libéralités accentue paradoxalement ce caractère individuel, puisque cette renonciation à opposer tout ou partie de sa part de réserve à une ou plusieurs libéralités faites par le défunt est opposable aux descendants du renonçant venant à la succession en ses lieux et place.

Au final, on le voit, la réserve héréditaire conserve une double fonction de protection de la famille contre les tiers et d’égalisation des droits au sein de la famille, lorsque du moins elle est attribuée globalement à plusieurs descendants entre lesquels elle a vocation à être partagée.

Elle demeure cependant un mécanisme complexe. Aussi, il paraît nécessaire de recommander l’accompagnement par un avocat dans les questions relatives aux successions.

En conséquence de l’accentuation légale du pouvoir des volontés privées, les considérations individuelles et collectives se mêlent dorénavant si étroitement dans ces deux fonctions que, non seulement celles-ci ont beaucoup perdu de leur vigueur, mais qu’il est plus artificiel que jamais de prétendre les opposer radicalement.

Pour que la réserve disparaisse, il faut que les bénéficiaires renoncent à la succession. La représentation permet aux descendants d’un héritier décédé avant le défunt ou ayant renoncé à la succession de venir hériter à sa place.

Ainsi, il ne peut y avoir qu’une seule catégorie de réservataire à la fois lors d’une succession. Attention, il est important de noter que l’État peut également avoir des droits en matières successorales pour une catégorie particulière de la succession : la succession en déshérence. Cette succession particulière recouvre le cas des personnes qui décèdent en n’ayant pas d’héritiers ou dont les successions sont abandonnées. Dans ce cas précis, la succession appartiendra à l’État.

SOURCES :
LOI N° 2001-1135 DU 3 DÉCEMBRE 2001 RELATIVE AUX DROITS DU CONJOINT SURVIVANT ET DES ENFANTS ADULTÉRINS ET MODERNISANT DIVERSES DISPOSITIONS DE DROIT SUCCESSORAL : https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000000582185
LOI N° 2006-728 DU 23 JUIN 2006 PORTANT RÉFORME DES SUCCESSIONS ET DES LIBÉRALITÉS : https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000000637158
ARTICLE 721 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006430700/
ARTICLE 912 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/id/LEGISCTA000006150544/2021-02-02/
LES DONATIONS : http://www.notaire.be/donations-successions/le-defunt-na-rien-prevu-:-qui-herite-/les-ordres-dheritiers
HÉRITAGE ET SUCCESSIONS : http://www.heritage-succession.com/
DROITS DE SUCCESSION ET DE DONATION : http://vosdroits.service-public.fr/particuliers/N31160.xhtml
ARTICLE 731 À 765 DU CODE CIVIL : http://www.legifrance.gouv.fr/affichCode.do;jsessionid=1617CB92C0304229A088B7BE4C11E97C.tpdila15v_3?idSectionTA=LEGISCTA000006136269&cidTexte=LEGITEXT000006070721&dateTexte=20150319
DONATIONS : http://lexinter.net/Legislation/successions.htm

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