Contester un testament authentique : 3 points essentiels
Un testament est un acte juridique par lequel une personne organise sa succession et exprime ses dernières volontés. Il existe plusieurs formes de testament à savoir le testament olographe, authentique, mystique, et international.
Un testament authentique est dit “public”, car il est réalisé par un notaire et signé en présence de deux témoins ou un notaire supplémentaire. Le notaire rédige le testament en suivant les directives exprimées par le testateur. Il est considéré comme étant le testament le plus sûr juridiquement et matériellement, car il a été rédigé par un notaire qui est un officier public ministériel.
Ainsi, le testament authentique contrairement au testament olographe est plus difficile à contester, car il a été rédigé par un notaire et a été constaté en présence de deux témoins ou d’un notaire supplémentaire. Le testament authentique est rédigé conformément aux dispositions du Code civil ce qui réduit les risques de problèmes d’interprétation.
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Il n’est pas possible de contester un testament du vivant du testateur. En effet, ce dernier a la possibilité de modifier son testament jusqu’à son décès. C’est pour cela que les héritiers n’auront la possibilité de contester un testament authentique qu’après le décès du testateur.
Le testament authentique correspond à un acte notarié régit par de nombreuses règles. Il constitue un testament plus compliqué à contester que le testament olographe dans la mesure où il est déposé auprès d’un notaire. Toutefois, il est possible d’identifier trois points essentiels pour pouvoir le contester.
Fait avec l’aide d’un professionnel, le testament authentique sera rédigé dans les formes requises et sa validité sera difficilement remise en question.
L’article 973 du Code civil dispose « Le testament doit être signé par le testateur en présence des témoins et du notaire ; si le testateur déclare qu’il ne sait ou ne peut signer, il sera fait dans l’acte mention expresse de sa déclaration, ainsi que de la cause qui l’empêche de signer » (Cour de Cassation, Chambre civile 1, du 5 février 2002, 00-15.740) (1). Cela est rappelé dans un arrêt de la Cour d’appel de Papeete du 11 août 2022 (13).
La signature du testateur est en principe une condition de validité du testament authentique. Dans un arrêt du 4 juin 2007, la Cour de cassation a rappelé que « si le testeur ne signe pas l’acte authentique en présence des témoins et du notaire, alors la déclaration du défunt sur le fait qu’il ne sait pas ou ne peut pas signer le document doit être expressément rapportée dans le document, et la cause l’ayant empêché de signer doit être clairement indiquée dans l’acte. Le fait que l’acte même réalisé sous forme authentique et que la volonté du testateur ne soit contestée ne fait pas échec à la nullité de l’acte ».
Le testament authentique présente également un avantage important sur le testament olographe lorsque le testateur qui n’a pas d’héritier réservataire souhaite instituer un légataire universel : le recours au testament authentique dispense le légataire universel de toute formalité pour entrer en possession de son legs.
Cet avantage est toutefois atténué pour les successions ouvertes depuis le 1er novembre 2017, la formalité de l’envoi en possession ne devenant obligatoire qu’en cas de contestation du testament par les héritiers (Code civil, art. 1007 modifié par la loi 2016-1547 du 18-11-2016 art. 44). En outre, l’exécuteur testamentaire à qui la saisine est conférée est dispensé de se faire envoyer en possession s’il a été institué par testament authentique.
Ajoutons que le testament authentique est la seule forme de testament possible lorsque le testateur :
– veut reconnaître un enfant naturel par testament ;
– veut retirer à son conjoint les droits d’habitation et d’usage dont ce dernier dispose, jusqu’à sa mort, sur le logement familial et son mobilier (Code civil, article 764) ;
– ne peut pas ou plus écrire ou signer lui-même.
En contrepartie, le testament authentique a un coût : honoraire forfaitaire de 138,47 € TTC (émoluments de formalités en sus).
Nous mettrons ainsi successivement en exergue les conditions de forme du testament authentique, sa lecture obligatoire et la possibilité de contestation sur le fond. Il faut néanmoins souligner qu’être accompagné d’un avocat dans cette tâche de contester un testament authentique vous permettra de faciliter les démarches.
I. Des conditions de forme
Certains testaments sont en principe plus facilement contestables que d’autres, notamment en raison du formalisme auxquels ils sont soumis.
La contestation d’un testament authentique est possible. L’annulation peut être demandée pour inobservation des règles de forme ou de fond, mais également pour atteinte à la réserve, non-exécution des conditions imposées par le testateur, pour insanité d’esprit, etc…
L’action doit être menée devant le tribunal judiciaire territorialement compétent, avec l’assistance d’un avocat.
Également appelé testament par acte public, le testament authentique est soumis à un formalisme très lourd, prévu aux articles 971 à 975 du Code civil, résumé ici brièvement.
Ces règles de forme spécifiques au testament authentique se combinent avec les règles générales applicables à la rédaction des actes notariés, issues du décret 71-941 du 26 novembre 1971 (Cour de cassation, 1re chambre civile du 10 octobre 2012 n° 11-20.702).
Le testament est reçu par deux notaires, ou par un notaire en présence de deux témoins.
Il est dicté par le testateur au notaire qui l’écrit ou le dactylographie puis en fait la lecture au testateur. Après lecture, le testament est signé par le testateur, le ou les notaires et les témoins. L’acte porte mention expresse de l’ensemble des formalités. Si le testateur ne peut pas signer, quelle qu’en soit la raison, il doit en faire la déclaration.
Le non-respect de ces conditions est sanctionné par la nullité absolue du testament.
Ajoutons que le testament authentique déclaré nul pour vice de forme ne peut pas valoir en tant que testament olographe, car il n’est pas écrit de la main du testateur. Il peut en revanche valoir en tant que testament international, s’il en respecte les conditions de forme (Cour de cassation, 1re chambre civile du 5 septembre 2018 n° 17-26.010 (3) / testament international à la rescousse du testament authentique défectueux : JCP N 2010 n° 1249).
En revanche, si le vice qui affecte le testament authentique est aussi une cause de nullité de l’acte en tant que testament international, il ne pourra produire aucun effet. Il en va ainsi en cas de non-respect de l’exigence du paraphe à apposer par tous les signataires de l’acte sur chaque feuillet (Cour de cassation, 1re chambre civile du 10 octobre 2012 n° 11-20.702) (2) ou d’insanité d’esprit (Cour de cassation, 1re chambre civile du 12 juin 2014 n° 13-20.582) (4).
La Cour de cassation interprète très strictement les conditions de forme du testament authentique, et tout spécialement la condition de dictée. Nullité, par exemple :
– du testament qui n’a pas été dicté en présence des témoins (Cour de cassation, 1re chambre civile du 26 septembre 2007 n° 05-19.909 FS-PB).
– du testament qui a été pré-rédigé par le notaire, même si le testateur a lui-même demandé à ce dernier de préparer l’acte à l’avance et a réitéré ses volontés devant les témoins avant la lecture du testament (Cour de cassation, 1re chambre civile du 26 septembre 2007 n° 05-19.909)
II. Une lecture obligatoire
Un testament doit impérativement être lu, ainsi la Cour de cassation dans un arrêt du 5 février 2002 a estimé que la seule « mention expresse » que la lecture avait été faite est insuffisante, même lorsque cette mention ne précise pas que celle-ci a été donnée par le notaire.
Par ailleurs, comme le dispose l’article 972 du code civil, avant de signer le document, le testament doit être lu au testateur afin qu’il en vérifie son exactitude. Si cette lecture n’a pas été effectuée, le testament est contestable. Pour contester un testament authentique, il convient de vérifier que cette lecture a bien eu lieu. Il peut être pertinent pour cela de poser cette question aux témoins qui étaient nécessairement présents au moment de son élaboration.
La lecture porte sur l’intégralité de l’acte, y compris les renvois et additions éventuels. Elle est faite en français et aussi dans la langue de la dictée le cas échéant. L’absence de la lecture de l’acte est un moyen de contestation de l’acte authentique. La lecture par le notaire doit être expressément mentionnée.
En effet, la « preuve de l’observation des conditions légales doit résulter de l’acte authentique lui-même ».
Depuis le 18 février 2015, les personnes sourdes ou muettes ou ne sachant pas parler français ont la possibilité d’établir un testament authentique (Loi 2015-177 du 16-2-2015).
Ainsi, lorsque le testateur ne peut pas s’exprimer en français, la dictée et la lecture du testament sont effectuées par un interprète assermenté dans la langue de l’intéressé. L’interprète veille à l’exacte traduction des propos tenus. Le notaire est toutefois dispensé de recourir à un interprète lorsque lui-même et les témoins (ou l’autre notaire) comprennent cette langue (Code civil 972, al. 4).
Dans un arrêt du 21 mars 2023, la Cour d’appel de Lyon a rappelé que l’article 972 du Code civil dans sa version applicable à la date d’établissement du testament litigieux dispose que si le testament est reçu par deux notaires, il leur est dicté par le testateur, l’un de ces notaires l’écrivant lui-même ou le faisant écrire à la main ou mécaniquement et que s’il n’y a qu’un notaire, il doit également être dicté par le testateur, le notaire l’écrivant lui-même ou le faisant écrire à la main ou mécaniquement.
La Cour d’appel de Lyon précise qu’il ressort d’une jurisprudence constante sur ce point que si le testateur a la possibilité de dicter son testament dans une langue étrangère c’est à la condition que le notaire et les témoins comprennent cette langue.
En l’espèce, il ressort des mentions portées dans l’acte que le testament a été dicté au notaire par la testatrice en présence de l’interprète en langue italienne et il n’est pas discuté que ni le notaire instrumentaire, ni les deux témoins présents, ne comprenaient cette langue.
Par ailleurs, aucune disposition légale en droit interne n’autorisait à l’époque le recours à un interprète pour dicter un testament. Il en résulte que le testament n’est pas valide en tant que testament authentique, ainsi que l’a justement rappelé le premier juge.
Toutefois, il est constant en droit que l’annulation d’un testament authentique pour non-respect des dispositions des articles 971 et suivants du Code civil ne fait pas obstacle à la validité de l’acte en tant que testament international dès lors que les formalités prévues par la convention de Washington du 26 octobre 1973 portant loi uniforme sur la forme d’un testament international ont été accomplies.
La Cour d’appel de Lyon a considéré que l’ensemble des formalités prévues par la convention de Washington et la loi uniforme ont été accomplies et permettent de garantir que l’établissement du testament reflète l’exacte volonté de son auteur (12).
En présence d’un testateur ne pouvant pas parler, mais sachant écrire, le notaire écrit ou dactylographie le testament d’après les notes rédigées devant lui par l’intéressé, puis il le lui lit. Si le testateur est sourd, il prend connaissance du testament en le lisant lui-même, après lecture faite par le notaire (Code civil, art. 972, al. 5).
Enfin, si le testateur, sourd ou muet, ne peut pas lire ou écrire, les règles applicables au testateur ne parlant pas français sont transposables (Code civil art. 972, al. 6). Un interprète assermenté en langue des signes assurera la dictée ou la lecture du testament.
III. Contester un testament authentique : l’état d’esprit du testateur
Pour finir, il est possible de contester un testament authentique dans le cas où le testateur n’était pas sain d’esprit au moment de l’établir. Il s’agit alors d’une contestation du testament sur le fond. C’est le cas quand le défunt fait face à un état de grande vulnérabilité.
Le Code civil prévoit que toute personne ayant la capacité requise peut, par testament, régler la dévolution de ses biens. Il existe une présomption que chaque personne est présumée saine d’esprit et donc apte à faire un testament, mais il faut garder en tête que certaines personnes ne le sont malheureusement plus.
Il arrive fréquemment que des testaments soient contestés au motif que le Testateur n’était plus apte au moment de signer son testament (ex : atteinte avancée de la maladie d’Alzheimer). La personne qui invoque la nullité d’un testament a le fardeau de prouver que le testateur était inapte au moment de la signature du testament.
Comme tous les actes notariés, le testament authentique fait foi jusqu’à inscription de faux pour toutes les mentions que le notaire a pu vérifier par lui-même.
Par exemple, la contestation de la mention du testament selon laquelle le défunt a dicté ses dernières volontés au notaire n’est possible que par recours à la procédure d’inscription de faux (Cour de cassation, 1re chambre civile du 18 décembre 2013 n° 12-12.210 F-D). Il en est de même de la contestation de l’identité du testateur ou de la date du testament.
Ne valent que jusqu’à preuve contraire, en revanche, les affirmations dont le notaire n’a pu apprécier personnellement l’exactitude.
Tel est le cas, notamment, de la mention selon laquelle le testateur est sain d’esprit, qu’il est possible de contester sans recourir à l’inscription de faux en rapportant par tous moyens la preuve contraire (CA Aix-en-Provence 9-5-2012 n° 11/07904, prononçant la nullité du testament authentique pour insanité d’esprit).
La jurisprudence est assez exigeante sur les preuves et sur la certitude de l’insanité d’esprit du testateur, comme en témoigne, par exemple, l’arrêt de la Cour de cassation du 19 décembre 2012 (Cour de cassation, 1re chambre civile, 19 décembre 2012, n° 11-26.340).
En l’espèce, la Cour d’appel avait jugé les comptes rendus médicaux attestant de l’affaiblissement des facultés mentales de la testatrice « ne permettaient pas de conclure avec toute la certitude requise à son insanité d’esprit, ni au moment ni à l’époque où elle a testé et a estimé que les éléments par ailleurs soumis à son appréciation ne permettaient ni de constater l’état de dépendance intellectuel et mental » de la testatrice, « ni de démontrer que le testament eût été fait sous une contrainte telle qu’elle aurait été de nature à vicier le consentement de son auteur ou à l’induire en erreur ».
En effet, le notaire ne fait sur ce point que relater les énonciations du testateur (Cour de cassation, 1re chambre civile du 25 mai 1987 n° 85-18.684) (6).
On rappellera que l’appréciation du caractère sain d’esprit du disposant est une question de fait qui relève de l’appréciation souveraine des juges du fond (en ce sens, notamment, Cour de cassation, 1re chambre civile du 18 décembre 2013 n° 12-26.366 F-D).
Un abus de faiblesse peut même être caractérisé dans le cadre de cette situation et entraîner de nouvelles poursuites au-delà de la contestation du testament. Il faut souligner que dans ce cas, une expertise médicale peut être requise.
Les professionnels de santé peuvent également être amenés à sortir du secret professionnel afin de mettre en lumière les éléments permettant de juger de l’état de santé mental du défunt.
Naturellement, il est possible de contester un testament dans le cas où la part minimale réservée aux héritiers n’est pas respectée. Dans un tel cas, il suffit de mettre en exergue un tel manquement pour que le testament soit remis en question et le partage rééquilibré.
Par exemple, au moment de l’ouverture de la succession, le notaire peut informer les héritiers de l’existence d’un testament authentique.
Le formalisme de ce type de testament est strict : il doit en effet être nécessairement rédigé en présence de deux notaires, ou un notaire et deux témoins ce qui le rend difficilement contestable (article 971 du Code civil).
Il n’en demeure pas moins qu’il est possible de demander la nullité d’un testament authentique. Outre la nullité pour insanité d’esprit, la demande pourra reposer sur plusieurs motifs : atteinte à la réserve héréditaire, testament fait en présence du légataire universel (article 975 du Code civil), et bien d’autres.
SOURCES :
- https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007045109
- https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000026486093?init=true&page=1&query=11-20702+&searchField=ALL&tab_selection=all
- https://www.courdecassation.fr/acces-rapide-judilibre
- https://juricaf.org/arret/FRANCE-COURDECASSATION-20140612-1320582
- https://juricaf.org/arret/FRANCE-COURDECASSATION-20070926-0519909
- https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007018886/
- https://www.m-habitat.fr/succession-heritage/testament/contester-un-testament-2572_A
- https://demarchesadministratives.fr/demarches/contester-un-testament-demarches-a-suivre
- https://www.heritage-succession.com/article-comment-contester-un-testament.html
- http://www.nofaultparadise.org/avocat-testament/contester-testament-authentique/
- https://www.notretemps.com/droit-argent/succession/comment-contester-un-testament-23260
- https://www.labase-lextenso.fr/jurisprudence/CALYON-21032023-22_02394?em=Cour%20d%27appel%20de%20lyon%2C%201%C3%A8re%20chambre%20civile%20B%2C%2021%20mars%202023%2C%20%2022%2F02394
- https://www.labase-lextenso.fr/jurisprudence/CAPAPEETE-11082022-21_00021em=Cour%20d%27appel%20de%20papeete%2C%20Cabinet%20D%2C%2011%20ao%C3%BBt%202022%2C%20%2021%2F00021
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