Qui peut porter plainte pour abus de faiblesse ?

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Au cours d’une succession, il est possible que le consentement du légataire ait été vicié par une personne profitant de la faiblesse ou de la vulnérabilité de ce dernier. Le légataire se trouve donc victime d’un abus de faiblesse, c’est-à- dire d’un processus par lequel il a été amené à faire des choses qu’il n’aurait pas faites autrement en raison de son état de vulnérabilité.

À l’origine, l’abus frauduleux de l’état d’ignorance ou de faiblesse ne fut qu’une variété de l’abus de confiance destinée à assurer la protection des biens des mineurs. Il fallut attendre la réforme du Code pénal et la loi n° 2001-504 du 12 juin 2001 pour qu’il acquiert sa pleine autonomie, et voit son domaine étendu à toute une série d’autres personnes vulnérables.

Le délit d’abus de faiblesse prévu par le Code pénal sanctionne le fait de conduire une personne en situation d’ignorance ou de faiblesse à réaliser un acte qui lui est gravement préjudiciable ou à s’abstenir d’en effectuer un (Code pénal, art. 223-15-2). Il permet notamment de réprimer les captations du patrimoine des personnes affaiblies par l’âge ou la maladie par des proches leur prodiguant soins ou attentions, captations intervenant de leur vivant (donations) ou après leur mort (testament).

Conformément à l’article 223-15-2 du Code pénal, “Est puni de trois ans d’emprisonnement et de 375 000 euros d’amende l’abus frauduleux de l’état d’ignorance ou de la situation de faiblesse soit d’un mineur, soit d’une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur, soit d’une personne en état de sujétion psychologique ou physique résultant de l’exercice de pressions graves ou réitérées ou de techniques propres à altérer son jugement, pour conduire ce mineur ou cette personne à un acte ou à une abstention qui lui sont gravement préjudiciables.

Lorsque l’infraction est commise par le dirigeant de fait ou de droit d’un groupement qui poursuit des activités ayant pour but ou pour effet de créer, de maintenir ou d’exploiter la sujétion psychologique ou physique des personnes qui participent à ces activités, les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 750 000 euros d’amende.”

L’article 16 de la loi n° 2023-22 du 24 janvier 2023 a complété cet article par un alinéa ainsi rédigé : “Lorsque l’infraction est commise en bande organisée par les membres d’un groupement qui poursuit des activités ayant pour but ou pour effet de créer, de maintenir ou d’exploiter la sujétion psychologique ou physique des personnes qui participent à ces activités, les peines sont portées à sept ans d’emprisonnement et à un million d’euros d’amende”.

Les abus de faiblesse peuvent également être sanctionnés lorsqu’ils constituent des pratiques commerciales interdites. Si la terminologie est la même, il s’agit d’infractions différentes, prévues par le Code de la consommation.

En vertu de l’article L. 121-8 du code de la consommation, est interdit le fait d’abuser de la faiblesse ou de l’ignorance d’une personne pour lui faire souscrire, par le moyen de visites à domicile, des engagements au comptant ou à crédit sous quelque forme que ce soit, lorsque les circonstances montrent que cette personne n’était pas en mesure d’apprécier la portée des engagements qu’elle prenait ou de déceler les ruses ou artifices déployés pour la convaincre à y souscrire ou font apparaître qu’elle a été soumise à une contrainte.

Cela est rappelé par un arrêt du 11 décembre 2023 de la Cour d’appel de Bordeaux.

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Les peines encourues sont trois ans d’emprisonnement et 375 000 € d’amende.

Ce délit ressemble à celui du droit de la consommation. Mais, il s’en distingue tout de même car il est à la fois plus large (dans le sens où il peut intervenir quelles que soient les circonstances), et plus étroit (en ce qu’il énumère limitativement les états d’ignorance et de faiblesse : on ne retrouve pas les étrangers ou les personnes en situation d’urgence).

La plus grande différence tient aux personnes susceptibles d’être poursuivies. Les personnes morales peuvent engager leur responsabilité pénale en tant qu’auteurs du délit d’abus de faiblesse alors que seules les personnes physiques sont punissables sur le fondement des articles L. 221-8 et L. 132-13 et suivants du code de la consommation.

Des peines complémentaires peuvent également être prononcées, notamment la confiscation (pour un exemple de confiscation d’un contrat d’assurance-vie, la victime de l’abus étant indemnisée à hauteur de la créance confisquée : Cour de cassation chambre criminelle du 19-4-2017 n° 16-80.718 F-PB).

La tentative n’est pas répréhensible.

Par ailleurs, il est important de préciser que l’infraction d’abus de faiblesse et celles résultant du non-respect des obligations prescrites en cas de contrat conclu hors établissement, ne présentent entre elles aucune incompatibilité et sont susceptibles d’être appliquées concurremment, dès lors qu’elles défendent des intérêts distincts tenant à la protection des personnes vulnérables et à celle des consommateurs (Cass. Crim. 8 mars 2016, n° 14-88.347).

L’abus de faiblesse a pu s’induire d’éléments tels que l’âge, le mode de vie, la nature, les quantités énormes, les prix élevés des produits achetés, la précipitation dans la signature du contrat, mais les circonstances doivent révéler que les victimes n’étaient pas en mesure d’apprécier la portée des engagements qu’elles prenaient ou de déceler la contrainte ou la ruse. Par exemple, le caractère apparemment élevé d’une facture n’est pas une circonstance suffisante pour caractériser le délit d’abus de faiblesse (CA Douai, 4 juillet 2019, n° 18/02610).

I. Qualité ou situation de la victime d’abus de faiblesse

A)  Mineur

Observons tout d’abord que l’article 223-15-2 du Code pénal vise les personnes d’une vulnérabilité particulière en raison de leur âge. Or, l’état d’ignorance ou la situation de faiblesse qui ne permet pas de résister aux entreprises des aigrefins n’est pas seulement celui de la vieillesse ; il est aussi celui de la jeunesse.

Il pouvait donc à première vue paraître inutile de viser spécialement le mineur. On peut cependant penser que celui-ci est présumé, de par son âge, se trouver a priori dans un état d’ignorance ou dans une situation de faiblesse, alors que, à l’égard du majeur, ces éléments devront être prouvés.

Le mineur est l’individu de l’un ou de l’autre sexe qui n’a point encore l’âge de dix-huit ans accomplis (Code civil, art. 388). Aucune différence n’est faite entre celui qui est sous administration légale (Code civil, art.  382) ou sous tutelle (Code civil, art. 390).

Le mineur émancipé par le mariage (Code civil, art. 431-1) ou par le juge (Code civil, art. 413-2) est-il protégé par l’article 223-15-2 du Code pénal ? Selon l’article 413-6 du Code civil, le mineur émancipé est capable, comme un majeur, de tous les actes de la vie civile. Le principe de cette pleine capacité mérite toutefois d’être nuancé à un double point de vue.

D’une part, le mineur émancipé conserve des séquelles de sa minorité de telle sorte qu’il peut arriver que, dans un cas particulier, l’hésitation soit permise.

Connaissant, d’autre part, toutes les tentations auxquelles notre société de consommation expose les jeunes gens, on peut se demander s’il ne serait pas opportun d’accorder au mineur émancipé la protection, qu’en l’état actuel, la loi lui refuse. Il pourra cependant en bénéficier s’il peut être regardé comme vulnérable en particulier en raison notamment de son âge.

B) Personne particulièrement vulnérable

L’article 223-15-2, alinéa 1er, qui reprend ici intégralement les termes de l’ancien article 313-4, prévoit que ladite vulnérabilité doit être due à “l’âge, une maladie, une infirmité, une déficience physique ou psychique ou un état de grossesse ”.

Encore faut-il que cet état de vulnérabilité soit prouvé ; ainsi le fait d’être sous curatelle ne suffit pas, à lui seul, à le démontrer (Cass. Crim., 4 avr. 2006, n° 05-83.469).

Cette particulière vulnérabilité doit encore être apparente ou, depuis la modification opérée par la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009, connue de l’auteur de l’infraction.

L’âge ainsi visé par la loi est généralement entendu comme celui de la vieillesse, la jeunesse faisant l’objet d’une disposition spéciale. L’article 223-15-2 ne fixe aucun âge déterminé : il s’agit d’une question de fait, variable selon les personnes, et laissée à l’appréciation des tribunaux.

En ce sens, la vulnérabilité d’un homme de 92 ans souffrant d’un déficit intellectuel important et celle de sa femme âgée de 85 ans, handicapée à 90% ont été établies par des examens en centre hospitalier et confirmées par expertise : Cass. Crim., 11 déc. 2013, n° 12-86.489).

Il est intéressant d’observer que presque toutes les décisions de justice rendues à ce jour ne concernent que des personnes âgées. Notons toutefois que ce critère de l’âge pourrait encore être utilisé au besoin pour protéger un mineur émancipé.

L’éclatement des familles, la misère relationnelle, la solitude due au repli sur soi entraînent une insécurité affective des personnes âgées qui deviennent une proie facile pour les escrocs leur faisant miroiter des avantages disproportionnés par rapport à des achats pas toujours opportuns : encyclopédies pour les petits-enfants, voyages sur catalogue, soutiens financiers à des mouvements fictifs, nouvelle voiture prétendument plus économique, téléviseur remplacé pour une panne légère, etc.

II. Éléments constitutifs de l’abus de faiblesse

Le délit d’abus de faiblesse protège uniquement les personnes en état d’ignorance ou de faiblesse. Sont visés (Code pénal art. 223-15-2) :

–  les mineurs ;
–  les majeurs particulièrement vulnérables (en raison de l’âge, de la grossesse, d’une maladie ou d’une déficience physique ou psychique apparente et connue de l’auteur) ; Il incombe, toutefois, de préciser que la protection dont bénéficie la femme enceinte s’explique par le fait que sa grossesse peut entraîner un état dépressif qui la rend vulnérable
–  les personnes en état de sujétion psychologique ou physique (par exemple, sous l’emprise d’un mouvement sectaire).

L’âge de la victime est un critère de vulnérabilité suffisant : nul besoin de rechercher, au besoin d’une expertise notamment, si la victime présentait une altération de ses facultés mentales (Cour de cassation chambre criminelle du 11-7-2017 n° 17-80.421 F-PB).

Cet état de vulnérabilité est apprécié au moment de l’accomplissement de l’acte préjudiciable (Cour de cassation chambre criminelle du 26-5-2009 n° 08-85.601 F-PFI).

L’infraction suppose qu’une personne abuse volontairement de cette vulnérabilité, qui doit donc être apparente ou connue de son auteur. La victime est amenée à accomplir quelque chose dont elle n’aurait pas voulu si elle n’avait pas été fragilisée. Autrement dit, il est reproché à l’auteur du délit d’avoir exercé une certaine contrainte morale envers la victime afin de parvenir à ses fins.

Par conséquent, il ne peut y avoir abus par imprudence, maladresse ou négligence puisqu’il faut que l’auteur du délit utilise « des ruses ou artifices » ou qu’il exerce une contrainte. Ainsi, un professionnel, au cours d’un démarchage à domicile, fait souscrire à un couple de personnes âgées une commande et téléphone au fils des victimes en ne révélant pas le véritable contenu de l’offre signée : CA Toulouse, 11 oct. 2012, no 11/00807. Dans cette affaire, l’auteur a agi de manière intentionnelle, commettant ainsi un délit.

Le législateur a, aussi, prévu que l’abus de faiblesse ou d’ignorance doit conduire à faire souscrire à la victime « des engagements au comptant ou à crédit sous quelque forme que ce soit » (C. consom., art. L. 121-8).

Dans la mesure où un paiement immédiat obtenu en abusant de l’état de faiblesse ou d’ignorance ne peut pas être réprimé sur le fondement de cette disposition, qui ne vise que la souscription d’engagements, le législateur a ajouté, à l’article L. 121-10 du code de la consommation (C. consom., anc. art. L. 122-10), que le délit est aussi constitué lorsque l’abus est utilisé « pour se faire remettre, sans contreparties réelles, des sommes en numéraire ou par virement, des chèques bancaires ou postaux, des ordres de paiement par carte de paiement ou carte de crédit, ou bien des valeurs mobilières, au sens de l’article 529 du Code civil (Cass. Crim., 26 oct. 1999, n° 98-86. 014).

En l’espèce, les prévenus ont abusé de l’état de faiblesse de la victime dû à une diminution de ses facultés pour l’inciter à signer une demande de rachat de ses bons au porteur et à leur remettre un contrat d’assurance ; bons au porteur et contrat d’assurance ont été considérés, par les juges, comme des valeurs mobilières en vertu de l’article 529 du Code civil).

L’acte (ou l’abstention) résultant de cette contrainte doit porter un préjudice grave à la personne vulnérable. Lorsque la personne vulnérable a été placée en curatelle renforcée, aucun acte de disposition ne pouvant plus être accompli par elle seule, le délit ne peut être retenu (Cour de cassation chambre criminelle du 24-1-2018 n° 17-80.778 F-D).

En revanche, ce préjudice n’a pas à s’accompagner nécessairement d’un enrichissement de l’auteur de l’infraction (Cour de cassation chambre criminelle du 20-3-2019 n° 18-81.691 F-D).

Faut-il pour autant que les conséquences dommageables de l’abus se produisent immédiatement ? La Cour de cassation a répondu à plusieurs reprises par la négative. Ainsi, le fait de disposer de ses biens par testament entre dans les prévisions de l’article 223-15-2 du Code pénal, malgré son caractère révocable (Cour de cassation chambre criminelle du 16-12-2014 n° 13-86.620 F-PB).

Ont été condamnés pour abus de faiblesse :

–  la gouvernante d’une veuve âgée de 90 ans, qui a convaincu celle-ci de lui donner la nue-propriété de son logement ainsi que diverses sommes d’argent (Cour de cassation chambre criminelle du 4-9-2007 n° 06-87.997) ;
–  le médecin généraliste qui a obtenu d’un patient dont la santé physique et psychique s’était dégradée la signature d’un acte de vente pour un prix dérisoire, même si l’acte n’a pas été réitéré par le tuteur (Cour de cassation chambre criminelle du 12-1-2000 n° 99-81.057) ;
–  l’employée de banque gérant les comptes d’une personne âgée, qui avait modifié à son profit les clauses bénéficiaires de ses contrats d’assurance-vie (Cour de cassation chambre criminelle du 20-12-2017 n° 17-84.235 FS-D) ;
–  l’amie d’une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer et placée sous sauvegarde de justice qui l’a amenée à rédiger un testament l’instituant légataire universelle au détriment de ses héritiers, même non réservataires (Cour de cassation chambre criminelle du 21-10-2008 n° 08-81.126) ;
–  le petit-fils d’un couple de personnes âgées de 85 et 92 ans qui a obtenu de leur part des dons en espèces répétés et d’un montant important (Cour de cassation chambre criminelle du 11-12-2013 n° 12-86.489 F-D) ;
–  le notaire qui met en place un montage destiné à faire signer par sa cliente vulnérable des actes de donation et de vente au profit de son aide-ménagère (Cour de cassation chambre criminelle du 20-3-2019 n° 18-81.691 F-D).

 III. Porter plainte pour abus de faiblesse

Les poursuites pénales peuvent être déclenchées dans la limite de six ans après les faits. En principe, le délai de six ans commence à courir dès la commission des faits. Toutefois, si l’infraction demeure dissimulée en raison de manœuvres caractérisées de son auteur, le délai court à compter de sa découverte dans des conditions permettant l’exercice de l’action publique, sans pouvoir aller au-delà de 12 ans après la commission des faits (CPP art. 9-2).

À noter que cette dissimulation s’apprécie au regard de la victime de l’abus, et non de ses ayants droit (Cour de cassation chambre criminelle du 20-12-2017 n° 17-84.235 FS-D, rendu sous l’empire des anciennes règles de prescription, mais transposable au nouvel article 9-2).

Pour contester un testament, il est possible de mener une action au civil pour vice du consentement s’il y a eu dol, violences physiques ou morales. Dans le cas où la vulnérabilité de la personne est avérée, il est en effet aisé de mener une action en annulation pour trouble mental, comme le disposent les articles 412-1 et -2 du Code civil.

Toutefois, il est important de préciser que la notion d’abus de faiblesse se différencie de celle du dol.

Ce dernier est, en effet, défini par l’article 1137 du Code civil qui dispose : “Le dol est le fait pour un contractant d’obtenir le consentement de l’autre par des manœuvres ou des mensonges. Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie. Néanmoins, ne constitue pas un dol le fait pour une partie de ne pas révéler à son cocontractant son estimation de la valeur de la prestation”.

Par là, il faut comprendre, donc, que le dol n’est pas assorti d’une condition de faiblesse et se limite essentiellement au consentement vicié de la victime. In fine, l’abus de faiblesse serait plus simple que le dol, il est expression de l’abus, c’est-à-dire le profit tiré d’une personne n’étant pas en mesure de défendre ses intérêts.

Dans un arrêt du 21 décembre 2023, la Cour d’appel d’Aix-en-Provence considère que l’opération doit en effet être analysée dans sa globalité en prenant en considération la succession des ruptures : rupture anticipée du contrat d’apprentissage, suivie d’une rupture anticipée du contrat à durée indéterminée. C’est précisément la promesse d’une embauche sous contrat à durée indéterminée qui a été déterminante du consentement de l’apprenti à la rupture de son contrat d’apprentissage.

Le fait que le salarié n’a pas coché la case indiquant que la rupture était à son initiative en l’absence de délai de réflexion entre la date de rupture du contrat d’apprentissage et la date de signature du CDI, pris ensemble, démontre que l’employeur a exercé une influence sur le consentement du salarié pour procéder à la rupture de son contrat d’apprentissage dans l’objectif de conclure un CDI. Ainsi, les manœuvres dolosives dont a usé la société sont constituées.

En conséquence, la Cour d’appel d’Aix-en-Provence considère que c’est à bon droit que l’apprenti réclame l’intégralité de la rémunération et congés payés y afférents qu’il aurait dû percevoir jusqu’à l’issue du contrat d’apprentissage, soit le 31 août 2020, outre sa prime de vacances ainsi que des dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral.

Le principal problème des procédures pour abus de faiblesse réside dans le fait que c’est la victime qui doit porter plainte. Or, il apparaît évident que la victime étant dans un état de vulnérabilité, elle peut s’avérer dans l’incapacité de mener une telle action, laissant l’abus de faiblesse impuni.

Il peut arriver que la victime n’ait pas conscience d’être abusée et, en conséquence, ne porte pas plainte. Cela n’est pas un obstacle à la saisine du juge pénal.

Rappelons que le consentement de la victime n’est pas un fait justificatif en droit pénal, et que la poursuite du chef d’abus de faiblesse n’est pas conditionnée à une plainte de cette dernière.

Après le décès de la victime, peut aussi être exercée, par les héritiers de cette dernière, ou par l’administrateur de la succession, en vue de la reconstitution de l’actif successoral 30, une action successorale. L’assemblée plénière de la Cour de cassation a consacré la transmissibilité de l’action civile de la victime directe à ses héritiers, au visa des articles 2 et 3 du Code de procédure pénale, et de l’article 731 du Code civil, tout en l’entourant de strictes conditions.

Toutefois, la jurisprudence de la Cour de Cassation, dans un arrêt de la Cour de cassation, Chambre Criminelle, du 31 janvier 2012, n° 11-85-464, a permis d’élargir le champ des personnes pouvant porter plainte dans le cas d’abus de faiblesse.  Il est possible de dénoncer un abus de faiblesse, et donc de porter plainte, si la personne souffre de cet abus de faiblesse et est directement touchée par celui-ci, et même si la victime de l’abus de faiblesse ne s’estime pas lésée : c’est l’exemple de l’affaire Bettencourt.

Les héritiers peuvent toujours, bien sûr, poursuivre l’action engagée au pénal de son vivant par la victime. Mais, si elle n’a pas agi, ils ne peuvent se constituer partie civile devant le juge que par voie d’intervention, c’est-à-dire si le ministère public a engagé l’action, et si leur auteur n’avait pas renoncé, de son vivant, à l’action civile.

Un héritier a cependant réussi à démontrer qu’il avait personnellement souffert de l’infraction, ce qui lui permettait de se constituer partie civile (Cour de cassation chambre criminelle du 22-1-2020 n° 19-82.173 F-D).

De même, l’article 2-17 du code de procédure pénale prévoit que les associations de lutte contre les sectes peuvent exercer les droits reconnus à la partie civile lorsque l’abus de faiblesse a été commis au sein d’une telle organisation.

Il en va de même des associations de défense des personnes malades ou handicapées, lorsque l’infraction a été commise en raison de l’état de santé ou du handicap de la victime (C. pr. Pén., art. 2-8).

Ainsi, nous vous avons livré les clés pour pouvoir porter plainte pour un abus de faiblesse. Toutefois, la procédure de dénonciation de celui-ci peut être complexe. C’est pourquoi vous faire accompagner par un avocat apparaît certainement comme une nécessité.

Sources

https://www.economie.gouv.fr/dgccrf/Publications/Vie-pratique/Fiches-pratiques/Abus-de-faiblesse
http://www.leparticulier.fr/jcms/p1_1425634/l-abus-de-faiblesse-et-de-vulnerabilite-sanctions-civiles-et-penales
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000034461073?tab_selection=all&searchField=ALL&query=16-80.718+&page=1&init=true
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000035192645?tab_selection=all&searchField=ALL&query=17-80.421+&page=1&init=true
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000020767226?tab_selection=all&searchField=ALL&query=08-85.601+&page=1&init=true
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000036635296?tab_selection=all&searchField=ALL&query=17-80.778+&page=1&init=true
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000036344201?tab_selection=all&searchField=ALL&query=17-84.235+&page=1&init=true
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000038322185?tab_selection=all&searchField=ALL&query=18-81.691+&page=1&init=true
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000036344201?tab_selection=all&searchField=ALL&query=17-84.235+&page=1&init=true
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000041490529?tab_selection=all&searchField=ALL&query=19-82.173+&page=1&init=true
https://www.legifrance.gouv.fr/loda/article_lc/LEGIARTI000047047859/2023-01-26/#LEGIARTI000047047859
https://www.labase-lextenso.fr/jurisprudence/CABORDEAUX-11122023-21_01896?em=Cour%20d%27appel%20de%20bordeaux%2C%201%C3%A8re%20CHAMBRE%20CIVILE%2C%2011%20d%C3%A9cembre%202023%2C%20%2021%2F01896
https://www.labase-lextenso.fr/jurisprudence/CAAIXPROVENCE-21122023-21_07192?em=Cour%20d%27appel%20d%27Aix%20en%20provence%2C%20Chambre%204-5%2C%2021%20d%C3%A9cembre%202023%2C%20%2021%2F07192

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