Donation avance d’hoirie
Qu’est ce que la donation en avance d’hoirie ?
Le terme « hoir » découle du vieux français que l’on peut rapprocher du terme anglo-saxon « heir » qui signifie héritier. Ce terme n’est guère utilisé dans le langage courant, mais revêt malgré tout une importance notamment en termes de succession. (1)
Une expression du doyen Loysel « la mort saisit le vif par son hoir le plus proche », nous montre que le terme « hoir » est terme relatif aux ouvrages anciens, mais aussi compris dans certaines formes d’actes notariés dans la désignation de l’héritier.
Le terme « hoirie » désigne l’ensemble des biens dépendants d’une succession, selon l’article 919-1 ancien du Code civil. (2)
Cette donation à un effet immédiat comme la donation partage, préciput ou don manuel, elles sont irrévocables sauf dans 3 cas précis prévus par le Code civil aux articles 953 et suivants.
Ce premier article dispose en effet : « La donation entre vifs ne pourra être révoquée que pour cause d’inexécution des conditions sous lesquelles elle aura été faite, pour cause d’ingratitude, et pour cause de survenance d’enfants ».
La donation par préciput et hors part correspond à un mode de donation tenant à privilégier pour augmenter la part d’héritage du conjoint survivant, cela permet d’envisager la succession sans appréhension, d’échapper ainsi une possible indivision ou rapport d’éventuelles autres successions, un aménagement transgénérationnel est possible dans le cadre d’un accord avec des enfants en y associant ces petits enfants en qualité de bénéficiaire.
La donation en avance d’hoirie présente plusieurs avantages. Un avantage financier d’abord, ainsi qu’un avantage fiscal. L’avantage financier permet ainsi d’anticiper le paiement des droits par le biais de la donation, cela permet un gain financier manifeste et non négligeable du fait de la suppression de la taxation des plus-values éventuellement réalisées par le patrimoine.
Cela présente un avantage financier, car cela permet l’étalement dans le temps de la transmission, prenons l’exemple de l’exonération des droits de donations intervenant tous les 15 ans, cela permet de ne pas utiliser de manœuvre répréhensible aux yeux de l’administration fiscale tout en préparant sa succession.
La donation en avance d’hoirie est donc une donation faite en avancement de part successoral. Elle présente plusieurs avantages et/ou inconvénients en fonction de la situation dans laquelle l’on se place, en matière d’imputation des libéralités la donation en avance d’hoirie présentera un régime particulier et en matière de rapport il sera de même.
Afin de procéder à une étude pertinente de la donation avance d’hoirie il convient d’observer dans quelle mesure le droit commun apprécie-t-il la donation en avance d’hoirie ? Pour ce faire, il conviendra de traiter des principes encadrant la donation en avance d’hoirie (I) puis d’observer la réglementation du rapport ainsi que les cas particuliers s’y rapportant (II)
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I. Les principes encadrant la donation avance d’hoirie
Les principes encadrant la donation avance d’hoirie se retrouve dans le droit commun (A), mais il existe néanmoins des règles relatives à l’imputabilité des libéralités (B)
A. LES PRINCIPES RELATIFS A L’AVANCE SUR HERITAGE
La donation en avancement d’héritage ou donation en avance d’hoirie est une donation faite en avancement de part successorale lorsqu’elle profite à un héritier réservataire qui accepte la succession. Elle s’impute alors sur sa part de réserve et subsidiairement sur la quotité disponible dans l’hypothèse où rien n’a été convenu autrement dans l’acte de donation.
La donation est consentie à un héritier dit réservataire présumé, faite en avance sur son héritage, la règle en la matière est similaire au don manuel, ainsi que pour la donation authentique à laquelle la loi attache à ses donations la qualité de donation consentie sur la réserve héréditaire.
L’héritier réservataire est l’héritier légalement garanti de ne pas être déshérité par leur auteur, ils bénéficient à ce titre de la réserver héréditaire qui correspond à la part des biens et droit des successoraux dont la loi garantis la transmission à ces héritiers.
L’article 912 du Code civil dispose en ce sens : « La réserve héréditaire est la part des biens et droits successoraux dont la loi assure la dévolution libre de charges à certains héritiers dits réservataires, s’ils sont appelés à la succession et s’ils l’acceptent. La quotité disponible est la part des biens et droits successoraux qui n’est pas réservée par la loi et dont le défunt a pu disposer librement par des libéralités ». La donation en avance d’hoirie est dite « rapportable » au jour de l’ouverture de la succession et réintégrée au patrimoine du défunt.
En principe le bénéficiaire de la donation ou l’héritier réservataire conserve le bien donné, en revanche il ne reçoit que la part prévue dans la réserve héréditaire, déduction faite de la valeur de la donation perçue antérieurement.
Il est possible d’en déduire que l’héritier réservataire ne se voit gratifié d’aucun avantage particulier, il ne reçoit pas davantage que sa part de réserve et n’a donc aucun avantage préférentiel par rapport aux autres héritiers.
La loi n° 2006-728 du 23 juin 2006 entrée en vigueur en 2007 a modifié l’article 919 du Code civil. Il n’est désormais plus question de « donation en avance d’hoirie », mais de « donation faite en avancement de part successorale ». Tous les dons faits à un héritier sont appréhendés par le droit comme une avance d’hoirie sauf exception lorsque le donataire a expressément précisé le contraire.
Cet article dispose désormais : « La quotité disponible pourra être donnée en tout ou en partie soit par acte entre vifs, soit par testament, aux enfants ou autres successibles du donateur, sans être sujette au rapport par le donataire ou le légataire venant à la succession, pourvu qu’en ce qui touche les dons la disposition ait été faite expressément et hors part successorale ».
B. L’INCIDENCE DE L’IMPUTATION DES LIBERALITES
L’un des apports phares de la loi n° 2006-728 du 23 juin 2006 est l’introduction de la définition de réserve héréditaire à l’article 912 du Code civil.
La réserve héréditaire est donc une partie de la succession réservée par la loi à certains héritiers qui ne peuvent se voir privés de leur part à raison des libéralités faites par le défunt. En pratique la quotité disponible est définie à l’article 912 du Code civil et correspond à la part de la succession dont le défunt demeure libre de disposer par donation ou testament.
En revanche pour les libéralités excédant la quotité disponible, elles devront alors être réduites afin de respecter les droits des héritiers réservataires, c’est une protection d’ordre public.
Quand la quotité disponible et la réserve héréditaire ont été chiffrées, l’on doit procéder à la vérification des libéralités afin de savoir si celles-ci excèdent ou non la quotité disponible. Cette vérification se réalise par une opération appelée « l’imputation des libéralités ».
L’imputation en principe se fait par ordre des plus récentes aux plus anciennes. Cet ordre est prévu par l’article 923 du Code civil qui précise qu’il faut réduire en premier lieu les libéralités testamentaires puis dans un second temps les donations en commençant par la plus récente.
Par conséquent l’imputation des libéralités est soumise à un ordre chronologique, cette imputation se fait grâce à « l’assiette d’imputation ». Les donations en avance de part successorale à un héritier réservataire se verront imputer sur la réserve héréditaire. En effet toutes les libéralités n’ont pas vocation à d’imputer sur la quotité disponible.
L’article 919-1 du Code civil précise « La donation faite en avancement de part successorale à un héritier réservataire qui accepte la succession s’impute sur sa part de réserve et, subsidiairement, sur la quotité disponible, s’il n’en a pas été autrement convenu dans l’acte de donation.
L’excédent est sujet à réduction. La donation faite en avancement de part successorale à un héritier réservataire qui renonce à la succession est traitée comme une donation faite hors part successorale.
Toutefois, lorsqu’il est astreint au rapport en application des dispositions de l’article 845, l’héritier qui renonce est traité comme un héritier acceptant pour la réunion fictive l’imputation et, le cas échéant, la réduction de la libéralité qui lui a été consentie ».
II. Le rapport de la donation avancement d’héritage
Le rapport de la donation en avance de part successorale n’est pas automatique, mais il dépend des situations (A) la donation en avancement d’héritage est soumise à certains devoirs de déclaration sous peine de sanction (B)
A. UNE DONATION RAPPORTABLE
Le rapport de la libéralité est un mécanisme ayant pour but de faire valoir et respecter l’égalité entre les héritiers.
L’héritier ayant consenti à une libéralité doit en principe la réintégrer dans la masse partageable, car comme précédemment évoqué, la libéralité reçue sera envisagée comme une avance sur sa part de succession et fera donc l’objet d’une imputation sur la part de réserve héréditaire avant que celle-ci soit rapportée.
Il existe une présomption de rapportabilité pour les donations consenties entre vifs dès lors qu’il n’a pas été expressément stipulé le contraire dans la convention. Cette présomption est une présomption simple c’est dire qu’elle a vocation à être écarté en d’apport de la preuve contraire.
On applique cette présomption à la libéralité indépendamment de sa forme. Cela comprend donc une applicabilité pour les donations faites par actes authentiques, sous seing privé, manuelle, la donation déguisée ou la donation indirecte.
Il existe néanmoins des dispenses de rapport dans certaines situations, notamment en matière de rapport hors part successorale. Les donations ne sont pas rapportables s’il y a une dispense expresse, souvent insérée dans l’acte même ou qui peut être mentionnée ultérieurement.
D’autre part il arrive que la dispense ne s’applique pas à l’intégralité de la donation, elle sera alors soumise aux règles relatives au rapport sera aussi en partie hors part successorale.
Exemple : lorsqu’un donateur précise que les biens sont rapportables au jour de la donation, si au jour du partage du bien, celui-ci est affecté d’une hausse de sa valeur c’est-à-dire une plus-value, le rapport ne sera applicable seulement sur la valeur initiale du bien.
Le rapport de donation s’applique seulement à un successible venant effectivement de la succession. Donc la succession à un non successible n’entraîne pas le rapport de la donation conformément à ce que prévoit l’article 846 du Code civil qui dispose : « Le donataire qui n’était pas héritier présomptif lors de la donation, mais qui se trouve successible au jour de l’ouverture de la succession, ne doit pas le rapport, à moins que le donateur ne l’ait expressément exigé ».
L’article 852 du Code civil exclut expressément les frais de fournitures, d’entretien, d’éducation, les frais ordinaires d’équipement, ceux de noces et les présents d’usage, des donations rapportable sauf volonté contraire du disposant. Deux conditions cumulatives précisées dans l’article précité permettent d’exclure les présents d’usage. L’appréciation se fait à la date où il est consenti et compte tenu de la fortune du disposant.
En principe l’article 805 du Code civil prévoit que l’héritier renonçant n’est pas tenu, car il est réputé ne jamais avoir été héritier. Il est possible de déduire de cet article que la renonciation, peut important l’importance de la donation, n’aura pas d’incidence pour l’héritier.
Il sera assuré de conserver cette libéralité sans avoir d’indemnité à payer. Le défunt peut aussi insérer une clause dérogatoire du droit commun en exigeant le rapport d’un héritier ayant renoncé aux termes de l’article 845 du Code civil ou si un donataire non successible au jour de la donation le devient au jour de l’ouverture de la succession conformément à ce que prévoit l’article 846 du Code civil.
B. DEVOIRS ET SANCTIONS PREVUES PAR LE CODE CIVIL
L’article 860 du Code civil dispose : « Le rapport est dû de la valeur du bien donné à l’époque du partage, d’après son état à l’époque de la donation. Si le bien a été aliéné avant le partage, on tient compte de la valeur qu’il avait à l’époque de l’aliénation. Si un nouveau bien a été subrogé au bien aliéné, on tient compte de la valeur de ce nouveau bien à l’époque du partage, d’après son état à l’époque de l’acquisition.
Toutefois, si la dépréciation du nouveau bien était, en raison de sa nature, inéluctable au jour de son acquisition, il n’est pas tenu compte de la subrogation. Le tout sauf stipulation contraire dans l’acte de donation. S’il résulte d’une telle stipulation que la valeur sujette à rapport est inférieure à la valeur du bien déterminé selon les règles d’évaluation prévues par l’article 922 ci-dessous, cette différence forme un avantage indirect acquis au donataire hors part successorale ».
L’on tient ainsi compte de la valeur du bien en prenant en compte la plus ou moins-value relative à ce bien. Il faudra alors établir dans quelle mesure la plus ou moins value sera imputable à l’héritier. Si avant le décès du donateur, l’héritier avait racheté un bien avec le produit de la cession, c’est la valeur de ce bien au moment du décès qui sera rapporté au prorata du montant réinvesti.
L’article 919-1 alinéa 2 du Code civil dispose lui « la donation faite en avancement de part successorale à un héritier réservataire qui renonce à la succession est traitée comme une donation hors part successorale. Toutefois lorsqu’il est astreint au rapport en application des dispositions de l’article 845, l’héritier qui renonce est traité comme un héritier acceptant pour la réunion fictive de l’imputation et, le cas échéant, la réduction de la libéralité qui lui a été consentie ».
Lorsqu’un héritier dissimule sciemment la donation qui lui a été accordée, il se rend coupable de recel successoral et par conséquent peut être privé de sa part d’héritage sur le bien donné.
L’article 843 prévoit en la matière que tout héritier, même ayant accepté à concurrence de l’actif, venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu’il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement, ne peut retenir les dons à lui faits par le défunt, à moins qu’ils ne lui aient été faits expressément hors part successorale.
L’article 778 du Code civil, bien que ne donnant pas une définition précise du recel successoral, s’empare de la problématique en précisant :
« Sans préjudice de dommages et intérêts, l’héritier qui a recelé des biens ou des droits d’une succession ou dissimulé l’existence d’un cohéritier est réputé accepter purement et simplement la succession, nonobstant toute renonciation ou acceptation à concurrence de l’actif net, sans pouvoir prétendre à aucune part dans les biens ou les droits détournés ou recelés. Les droits revenant à l’héritier dissimulé et qui ont où auraient pu augmenter ceux de l’auteur de la dissimulation sont réputés avoir été recelés par ce dernier ».
Attention, seules peuvent rechercher la mise en œuvre de la sanction du recel, les personnes en droit de se prévaloir de la qualité d’héritier, ou de créanciers du défunt.
Quand l’article 887-1 du Code civil prévoit lui : « le partage peut être également annulé si un des cohéritiers y a été omis. L’héritier omis peut toutefois demander de recevoir sa part, soit en nature, soit en valeur, sans annulation du partage. Pour déterminer cette part, les biens et droits sur lesquels a porté le partage déjà réalisé sont réévalués de la même manière que s’il s’agissait d’un nouveau partage ».
Mais il existe aussi l’action en rescision du partage pour lésion de plus d’un quart, l’article 889 du Code civil dispose à cet effet que « lorsque l’un des copartageants établis avoir subi une lésion de plus du quart, le complément de sa part lui est fourni, au choix du défendeur, soit en numéraire, soit en nature. Pour apprécier s’il y a eu lésion on estime les objets suivant leur valeur à l’époque du partage ».
Cette action a pour objectif de rétablir l’égalité entre les héritiers.
Pour être caractérisée, la lésion n’exige ni la preuve de fraude, de violence ou de manœuvres dolosives, ni même l’existence d’une erreur d’appréciation. L’action en complément de part se prescrit en principe dans les deux ans à compter du partage.
SOURCES :
DEFINITION HOIRIE
https://www.dictionnaire-juridique.com/definition/hoir.php
DEFINITION AVANCEMENT HOIRIE :
https://www.dictionnaire-juridique.com/definition/avancement-d-hoirie.php
ARTICLES 953 ET SUIVANTS DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006070721/LEGISCTA000006136550/#LEGISCTA000006136550
ARTICLE 912 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/id/LEGISCTA000006150544/2021-01-28/
LOI n° 2006-728 du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités : https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000000637158
ASSIETTE D’IMPUTATION : https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006070721&idArticle=LEGIARTI000006433758
ARTICLE 919-1 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/id/LEGIARTI000006435899/2007-01-0
ARTICLE 846 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006432786/
ARTICLE 922 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/id/LEGIARTI000006433768/2007-01-01
ARTICLE 919-1 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/id/LEGIARTI000006435899/2007-01-01
ARTICLE 843 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006432755/
ARTICLE 778 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000020616239/
ARTICLE 887-1 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006433465/
ARTICLE 889 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/id/LEGIARTI000006433183/2007-01-01
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