Comment régler un litige lors d’une succession ?
La succession commence le jour du décès de la personne.
L’article 720 du Code civil dispose en effet : « Les successions s’ouvrent par la mort, au dernier domicile du défunt ». Cette procédure peut s’avérer complexe. Il s’agit en effet de répartir le patrimoine d’une personne défunte, appelée « de cujus », entre ses héritiers et légataires.
Toutefois, après ce décès, le règlement de la succession peut parfois réveiller des tensions entre les héritiers. À titre d’exemple : le fait de ne pas être d’accord sur l’estimation ou la répartition des biens, soupçonner certains de recel successoral, etc.
Pour la résolution de vos problèmes relatifs de succession, nos avocats sont disposés à vous aider. Téléphonez-nous au : 01 43 37 75 63 ou remplissez le formulaire en cliquant sur le lien |
Cette opération de répartition peut s’avérer complexe, surtout si les parties prenantes sont en désaccord. En ce sens, l’article 893 du Code civil distingue entre deux catégories de libéralités et donc, deux catégories de personnes : « La libéralité est l’acte par lequel une personne dispose à titre gratuit de tout ou partie de ses biens ou de ses droits au profit d’une autre personne.
Il ne peut être fait de libéralité que par donation entre vifs ou par testament ». L’article 894 poursuit : « La donation entre vifs est un acte par lequel le donateur se dépouille actuellement et irrévocablement de la chose donnée en faveur du donataire qui l’accepte » et l’article 895 précise : « Le testament est un acte par lequel le testateur dispose, pour le temps où il n’existera plus, de tout ou partie de ses biens ou de ses droits et qu’il peut révoquer ».
Dans la majorité des successions, les contestations portent principalement sur ces deux éléments : ou bien qu’il s’agisse d’une donation attentatoire aux droits des héritiers réservataires (en vertu de l’article 912 du Code civil), ou bien que la vocation des héritiers ait été atteinte. Un autre type de contentieux peut également s’insinuer de la détermination des droits ou encore la répartition des biens entre les héritiers.
Si le notaire doit avoir un rôle d’arbitre impartial, le recours à un avocat spécialisé en droit des successions ne peut être que trop recommandé. L’avocat qui interviendra dans le cadre du règlement d’une succession pourra ainsi mettre au service de son client, son expertise juridique dans la défense des droits. Avant le décès, il peut aussi accompagner une personne désirant rédiger son testament ou organiser sa succession au mieux.
Un avocat pourra également jouer le rôle d’intermédiaire entre les héritiers, et le conjoint survivant ou le ou les légataires. Il ne faut pas non plus négliger le rôle de l’avocat avant l’ouverture de la succession, celui-ci pourra vous permettre d’éviter qu’un litige puisse apparaître ou aura comme mission de régler celui-ci en garantissant, le mieux possible, la satisfaction des intérêts du client.
Au travers de cet article, nous verrons succinctement comment il est possible d’éviter les litiges en matière de succession (I), avant d’en présenter les causes probables (III) et l’ultime recours de la saisine du tribunal judiciaire (III).
I. Éviter le litige lors de la succession
Éviter que des litiges n’apparaissent en matière de succession n’est pas chose facile. Couramment, nous pourrions dire que le terrain n’est, en effet, pas favorable à un règlement aisé des opérations. Les vocations de chacun se confrontent et d’importantes sommes d’argent peuvent être en cause.
Afin d’éviter un litige au cours de la succession, il peut être intéressant d’établir un plan. Ce plan consisterait, premièrement, à dresser un bilan de la succession, afin d’évaluer le montant des biens à partager.
C’est-à-dire d’établir une liste des droits, propriétés détenues par le de cujus au moment de son décès. Cette opération doit être réalisée par le notaire, au moment du décès du de cujus, mais il peut être recommandé de réaliser un tel bilan, avant son décès. Ainsi, la partie à partager, appelée « actif net » serait plus facilement estimable et quantifiable pour les héritiers et le notaire chargé de la succession.
À l’issue de ce bilan, le montant des biens à partager sera connu. Le partage pourra ainsi s’amorcer dans le respect des droits de chaque héritier et donc dans une acceptation plus forte du partage.
Il faut ici, souligner qu’il est possible de faire évaluer ces biens par un expert afin d’éviter qu’un litige naisse dès cette évaluation. Cette évaluation pourra se comprendre à l’occasion d’une procédure de donation partage.
La donation–partage est une transmission de biens, du vivant du donateur, à ses héritiers. C’est une sorte de testament , mais qui prend effet durant la vie du donateur. La donation-partage est à la fois une donation et un partage en ce qu’elle permet de répartir, de son vivant, tout ou partie des biens d’une personne, entre ses héritiers présomptifs (Code civil article 1076 à 1078-3) en anticipation de la succession.
La donation-partage a un domaine exclusivement familial (Code civil, article 1075 à 1075-5), et suppose donc la présence de plusieurs héritiers, qui peuvent l’être à des degrés différents (Code civil, article 1078-4 à 1078-10). Elle nécessite, de surcroît l’intervention obligatoire d’un notaire.
Bien que des donations non notariées telles que le don manuel, la donation indirecte et la donation déguisée sont admises par la jurisprudence, elles ne peuvent être admises pour une donation-partage. Néanmoins, la doctrine est partagée sur ce sujet (Libéralités et successions, 6e édition, octobre 2022).
Attention, un arrêt du 17 octobre 2019 rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation a précisé que : « dans le cadre d’une donation-partage, le dol invoqué par le donataire n’est une cause de nullité de la convention que si le donateur en est l’auteur » (Cour de cassation – Première chambre civile 17 octobre 2019 / n° 18-22.769).
S’agissant des biens, le principe pose que ceux-ci doivent être présents. Le partage d’ascendant réalisé par acte entre vifs obéit aux conditions générales de la donation et ne peut donc comprendre que des biens présents. C’est ce que rappelle un arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation, le 6 mars 2013 (Cour de cassation – Première chambre civile – 6 mars 2013 / n° 11-21.892).
L’article 1076 du Code civil dispose également que « La donation-partage ne peut avoir pour objet que des biens présents ». De plus, son alinéa 2 précise que la donation et le partage peuvent être faits par deux actes séparés tant que le disposant intervient sur les deux actes.
La donation-partage, qui peut être faite en deux temps, ne constitue pas un partage ordinaire que les attributaires pourraient contester, mais un partage fait par l’ascendant de son vivant et selon sa seule volonté, qui se forme dès que l’un des enfants a accepté son lot.
Ayant constaté que des enfants avaient accepté leur lot, la cour d’appel en a exactement déduit que le refus de certains bénéficiaires était sans effet sur la validité et l’opposabilité de la donation-partage (Cour de cassation, Chambre civile 1, 13 février 2019, 18-11.642, Publié au bulletin).
Cette jurisprudence est constante comme le rappelle un arrêt de la première chambre civile de la Cour d’appel de Chambéry du 18 octobre 2022.
Choisir de consentir une donation-partage à de nombreux avantages. Le principal avantage demeure un avantage fiscal : cette donation est, en effet, soumise au même régime fiscal que toutes les autres, néanmoins, la fixation de la valeur du bien au jour de la donation permet de protéger les bénéficiaires de toute augmentation de sa valeur économique. Un autre avantage est celui de la prévisibilité : ainsi, les héritiers sauront l’étendue de leurs droits, du vivant du légataire.
Présentons maintenant les sources potentielles de litige, dont l’objectif est de les éviter.
II. Sources potentielles de litige entre les héritiers lors de la succession
S’agissant des sources potentielles de litiges, ils peuvent être de différentes sortes. Il est opportun de les présenter.
Indivision successorale. D’abord, un conflit peut apparaître s’agissant de la gestion de l’indivision successorale. Le terme d’indivision désigne à la fois l’ensemble des ayants droit du défunt, universels ou à titre universel, et l’universalité de biens, composés des biens existant au décès et des biens nés pendant la période envisagée (Cour de cassation 3e chambre civile du 7 juillet 2016, n° 15-10.278, n° 823 FS – P + B).
L’indivision successorale a pour particularité de se rencontrer au moment du décès d’une personne.
C’est-à-dire qu’elle survient immédiatement et automatiquement après l’ouverture de la succession devant notaire. Dans cette hypothèse, le patrimoine du défunt sera automatiquement transmis en un bloc à ses héritiers. Chacun de ces héritiers sera alors propriétaire d’une part non identifiable, du patrimoine du défunt. Il s’agira donc d’une fraction des biens composant la succession, mais sans plus de précisions sur celles-ci.
Pour sortir rapidement d’une indivision successorale, il paraît nécessaire de conseiller d’œuvrer pacifiquement, dans la mesure du possible, avec les autres co-indivisaires, vers une sortie amiable de l’indivision.
La sortie d’une indivision par voie judiciaire est, en effet, plus contraignante, longue et complexe et est donc à éviter. S’agissant des indivisions successorales, plusieurs solutions extrajudiciaires peuvent être mises en œuvre : la vente des droits à un ou plusieurs co-indivisaires (article 815-14 du Code civil) ; la vente des droits à un tiers, mais une préemption sera possible par les autres héritiers ; la vente du ou des biens indivis (article 815-5-1 du Code civil) ; la réunion dans les mains d’une personne de la totalité des droits indivis ; le partage amiable.
Les autres solutions pour sortir d’une indivision bloquée, seront judiciaires. Cette dernière solution doit être considérée comme une forme d’ultime recours.
Le partage des lots entre héritiers peut également être une source de conflits dans le cas où aucun héritier n’arrive à s’accorder sur la valeur de chaque lot. Afin de régler ce litige lors de la succession, il est possible de faire nommer un expert, qui sera choisi en ultime recours, par le président du tribunal de justice, exclusivement compétent en la matière. Une fois nommé, l’expert pourra alors procéder à l’évaluation des biens à partager.
Atteinte à la réserve héréditaire. La réserve héréditaire est une disposition impérative du droit civil, protectrice des intérêts des héritiers. Elle interdit au testeur de déshériter totalement ses successibles.
L’article 912 du Code civil dispose ainsi : « La réserve héréditaire est la part des biens et droits successoraux dont la loi assure la dévolution libre de charges à certains héritiers dits réservataires, s’ils sont appelés à la succession et s’ils l’acceptent. La quotité disponible est la part des biens et droits successoraux qui n’est pas réservée par la loi et dont le défunt a pu disposer librement par des libéralités ».
Cette part peut être évaluée à 50 % s’il n’y a qu’un héritier, 33 % pour deux et 25 % si trois héritiers ou plus sont présents. Ces règles sont d’ordre public, il n’est ainsi possible de prévoir, de quelque sorte que ce soit, des dispositions testamentaires contraires (Civ. 1re, 22 févr. 1977: Bull. civ. I, no 100). À défaut du respect de ces règles, il sera possible d’intenter une action qui visera à obtenir la réduction des legs consentis en violation de la réserve héréditaire.
Contestation du testament. Une contestation peut également porter sur la validité du testament rédigé par le de cujus. Il existe deux principaux types de testaments : olographe et authentique. S’agissant du testament olographe, il doit être écrit, daté et signé de la main du légataire. Ces exigences de forme sont primordiales et leur non-respect entraîne la possibilité, pour les héritiers ou légataires, de former un recours.
S’agissant du testament authentique, l’article 971 du Code civil précise : « Le testament par acte public est reçu par deux notaires ou par un notaire assisté de deux témoins ».
L’article 972 du Code civil poursuit : « Si le testament est reçu par deux notaires, il leur est dicté par le testateur ; l’un de ces notaires l’écrit lui-même ou le fait écrire à la main ou mécaniquement. S’il n’y a qu’un notaire, il doit également être dicté par le testateur ; le notaire l’écrit lui-même ou le fait écrire à la main ou mécaniquement {…} Dans tous les cas, il doit en être donné lecture au testateur. Lorsque le testateur ne peut ni parler ou entendre, ni lire ou écrire, la dictée ou la lecture sont accomplies dans les conditions décrites au quatrième alinéa. Il est fait du tout mention expresse ».
Un arrêt du 5 septembre 2018 a pu cependant préciser, qu’en l’absence d’observation des conditions de forme du testament authentique, celui-ci pouvait être requalifié en testament international, dont la force probante est moins forte : « L’annulation d’un testament authentique pour non-respect des dispositions des articles 971 а 975 du code civil ne fait pas obstacle а la validité de l’acte en tant que testament international dès lors que les formalités prescrites par la Convention de Washington du 26 octobre 1973 ont été accomplies » (Cour de cassation – Première chambre civile – 5 septembre 2018 / n° 17-26.010).
III. Le tribunal judiciaire : ultime recours en cas de litige lors de la succession
Le recours à la justice est l’ultime voie possible aux héritiers. Depuis la réforme du 23 mars 2019 (loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice), la nouvelle instance du tribunal judiciaire, est seule compétente en matière de succession. Il s’agit en effet d’une de ses compétences matérielles réservées.
Le recours au tribunal judiciaire peut se révéler utile dans plusieurs domaines et pour plusieurs actions, notamment dans le cadre d’une indivision successorale, la contestation de la validité d’un testament ou encore en réunion des legs conclus en violation de la réserve héréditaire.
Une autre action pourrait aussi porter sur l’abus de faiblesse d’une personne, qui l’aurait conduit à consentir des contrats, des legs non souhaités (article L223-15-2 du Code pénal).
Ces actions peuvent être nécessaires, mais il ne faut pas en oublier le coût, la difficulté et le temps de la procédure. Il est également obligatoire, pour tout litige dont le montant s’élève à plus de 5000 euros, d’être accompagné par un avocat.
SOURCES :
COUR DE CASSATION – PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE 17 OCTOBRE 2019 / N° 18-22.769 : https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000039285321/
COUR DE CASSATION, CIVILE, CHAMBRE CIVILE 1, 6 MARS 2013, 11-21.892, PUBLIÉ AU BULLETIN : https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000027153105/
COUR DE CASSATION – PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE – 5 SEPTEMBRE 2018 / N° 17-26.010 : https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000037450580/
Loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice : https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000038261631/
ARTICLE 1076 CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI00000643524
LIBÉRALITÉS ET SUCCESSIONS, 6E ÉDITION, OCTOBRE 2022
COUR DE CASSATION, CHAMBRE CIVILE 1, 13 FÉVRIER 2019, 18-11.642, PUBLIE AU BULLETIN https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000038161200/
COUR D’APPEL DE CHAMBÉRY, 1ERE CHAMBRE, 18 OCTOBRE 2022, N° 20/00932 https://www.labase-lextenso.fr/jurisprudence/CACHAMBERY-18102022-20_00932?em=Cour%20d%27appel%20de%20chambery%2C%201%C3%A8re%20Chambre%2C%2018%20octobre%202022%2C%20%2020%2F00932
Vous devez être connecté pour poster un commentaire.