Ouverture succession : Prouver sa qualité d’héritier

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Avoir la qualité d’héritier, c’est être investi de plein droit dans la succession.

Le terme « héritier » est utilisé pour désigner une personne physique qui a le droit de succéder au défunt en vertu de la loi. Dans un sens plus large, cette définition s’applique à toute personne physique ou morale qui tient ses droits d’un testament. Les successeurs testamentaires sont appelés « légataires », par opposition aux héritiers légaux. Bien que leur situation juridique puisse être similaire dans certains cas, il ne faut pas confondre le légataire avec l’héritier. Pourtant les héritiers et les légataires sont tous des « successeurs ».

La personne qui est susceptible de recevoir une succession future est appelée « héritier présomptif » ou encore « successible ».

L’article 724 du Code civil dispose en effet : « Les héritiers désignés par la loi sont saisis de plein droit des biens, droits et actions du défunt ». Un arrêt de principe du 24 novembre 1969 a précisé que : « chacun des héritiers légitimes étant saisis de luniversalité de lhérédité est, en vertu de cette saisine légale, en possession de toute l’hérédité ; en conséquence doit être cassé larrêt ayant décidé que le fils de la défunte ne pouvait prétendre aux fruits et intérêts du legs particulier que sa mère lui avait fait que du jour de la demande en délivrance » (Civ. 1 re, 24 nov. 1969).

S’agissant de la saisie de l’universalité du patrimoine du de cujus par les héritiers, un récent arrêt du 28 mai 2020 a précisé que : « les héritiers désignés par la loi sont saisis de plein droit des biens, droits et actions du défunt ; quen retenant que C… E…, en qualité dhéritier dQ… H…, nétait pas recevable à intenter seul une action en résiliation du bail rural consenti а G… E… faute de justifier détenir les 2/3 des droits indivis, quand C… E… était, en sa qualité dhéritier, saisi de plein droit de laction intentée par Q… H… et pouvait la poursuivre seul, la cour dappel a violé l’article 724 du Code civil » (Cour de cassation – Troisième chambre civile – 28 mai 2020 / n° 19-13.150).

S’agissant du moment, le Code civil précise que pour hériter, il faut exister au moment du décès et ne pas être indigne. L’héritier doit également rapporter la preuve de sa qualité d’héritier. Il en va de la protection des intérêts des héritiers et de la sécurité des tiers. La preuve de la qualité d’héritier pourra être nécessaire tant pour une action judiciaire portant sur la succession, que hors cadre judiciaire.

I. Nécessité de prouver sa qualité d’héritier

Il est nécessaire de prouver sa qualité d’héritier afin de pouvoir débloquer la transmission du patrimoine du défunt. Il est, en effet, nécessaire pour le notaire, de connaître la qualité et l’identité des héritiers, et ce afin de respecter les éventuelles dernières volontés du défunt.

Cela permettra, une fois cette procédure effectuée, d’obtenir le paiement des sommes, qui pourront être versées sur un compte bancaire, comme pour toutes autres créances dues par une administration.

La preuve de la qualité d’héritier a également pour objectif d’assurer la détermination des successibles afin de pouvoir procéder en toute sécurité au règlement de la succession. Notamment, cette procédure permet de respecter les droits des héritiers réservataires, institués par l’article 912 du Code civil.

A. Liberté du mode de preuve

S’agissant de l’établissement de la preuve de la qualité d’héritier,  l’article 730 du Code civil dispose : « La preuve de la qualité dhéritier sétablit par tous moyens ».

Ce principe est réaffirmé de manière constante par la jurisprudence : « Mme Q… B… ne justifie pas de sa qualité d’héritière conformément aux articles 768 et suivants du Code civil ; que, toutefois, aux termes de l’article 730 du Code civil, la qualité d’héritier se prouve par tous moyens (Cour de cassation – Troisième chambre civile – 24 septembre 2020 / n° 19-17.068).

En la matière, la preuve peut être rapportée par tous moyens, mais la pratique a développé une coutume dans la demande du certificat de décès du de cujus. La succession par testament facilite l’établissement de la preuve de la qualité d’héritier. Il suffit, en effet, de produire le testament qui institue les héritiers afin de prouver leur qualité.

La succession légale, quant à elle, est basée sur des liens de parenté ou d’alliance qui peuvent complexifier l’établissement de la preuve d’héritier. L’article 730 du Code civil dispose ainsi : « La succession est dévolue par la loi aux parents et au conjoint successibles du défunt dans les conditions définies ci-après ». Cette preuve pourra donc découler d’actes de naissance, de mariage ou de tout autre acte juridique constatant le lien de filiation avec le de cujus.

B. L’acte de notoriété

La complexité inhérente à la nécessité de prouver sa filiation a conduit la pratique à développer la technique de l’acte de notoriété.

L’acte de notoriété peut être défini comme :« L’acte de notoriété est un document dressé selon les cas par un officier public (notaire, officier détat civil, maire, consul) ou un magistrat faisant état de déclarations de plusieurs personnes attestant quun fait est de notoriété publique, cest-à-dire connu par un grand nombre de personnes et dont elles ont eu personnellement connaissance ». (Fiches pratiques – Dalloz – Acte de notoriété – 2019).

D’un point de vue pratique, pour se voir remettre un acte de notoriété, l’héritier devra produire une pièce d’identité, le livret de famille du défunt et la preuve du décès.

En cas de lien d’alliance, le notaire pourra demander le contrat de mariage, ainsi qu’un document attestant de l’absence de testament. La pratique de l’acte de notoriété n’est, en effet, nécessaire, que si les héritiers ne sont pas désignés par un acte testamentaire valable, qui primera tout autre document instituant des successibles (en ce sens : Cour de cassation – Première chambre civile – 12 février 2020 / n° 19-11.668).

L’acte de notoriété doit également faire mention des libéralités à cause de mort pouvant avoir une incidence sur la dévolution successorale. Il s’agira des legs universels ou à titre universel, mais non les legs particuliers. Le notaire doit enfin faire mention de l’acte de notoriété sur l’acte de décès (Cour d’appel de Reims – ch. civile 01 sect. II 18 mai 2018 / n° 17/02571).

Attention, l’acte de notoriété n’accorde qu’une présomption simple de la qualité d’héritier : il fait foi jusqu’à preuve contraire. L’article 730-3 du Code civil dispose en effet : « Lacte de notoriété ainsi établi fait foi jusquà preuve contraire. Celui qui sen prévaut est présumé avoir des droits héréditaires dans la proportion qui sy trouve indiquée ».

L’avantage est qu’en cas de contestation de la qualité d’héritier, c’est à celui qui conteste de rapporter la preuve du défaut de la qualité d’héritier. En outre, l’acte confère à l’égard des tiers l’apparence de la qualité d’héritier à ses bénéficiaires. Ceux-ci sont réputés, détenteurs de biens de la succession, avoir la libre disposition des biens et, s’il s’agit de fonds, la libre disposition de ceux-ci dans la proportion indiquée à l’acte (article 730-4 du Code civil).

C. L’intitulé d’inventaire

Le Dalloz Droit patrimonial de la Famille définit l’intitulé d’inventaire comme le : « préambule de linventaire dans lequel sont précisées lidentité, la qualité et létendue de la vocation successorale des personnes qui requièrent linventaire. Ce document peut servir ainsi aux intéressés de pièce justificative lorsquils ont а prouver leur qualité de successeur ».

Pendant une longue période, l’acte de notoriété et l’intitulé d’inventaire étaient considérés comme équivalents dans la pratique, avec une préférence pour l’intitulé d’inventaire. L’acte de notoriété n’était rédigé que si aucun inventaire n’était établi. Cependant, la jurisprudence a rejeté cette primauté de l’intitulé d’inventaire sur l’acte de notoriété. Un arrêt de la Cour de cassation en 1964 a établi la responsabilité d’un notaire ayant omis de rédiger un acte de notoriété, même si on ne pouvait pas garantir que cela aurait évité l’erreur ayant conduit à l’omission d’un héritier. (Cass. 1re civ., 18 févr. 1964 : Bull. civ. I, n° 94 ; JCP N 1964, 13 691, obs. P. Espagno ; D. 1964, p. 411, note P. Esmein ; RTD civ. 1964, p. 588, R. Savatier).

La pratique notariale antérieure s’est alors inversée. Les professionnels ont considéré qu’il était préférable de se fonder sur un acte de notoriété, pour établir la dévolution successorale, plutôt que sur un intitulé d’inventaire constatant les allégations des parties.

Pourtant le législateur indiquant nettement que la preuve de la qualité d’héritier s’établit par tous moyens (article 730 du Code civil) il est permis de penser que l’intitulé d’inventaire rédigé par le notaire avec l’intervention des ayants droit bénéficie d’une valeur équivalente à l’acte de notoriété, sous réserve de comporter les éléments exigés par l’article 730-1 du Code civil.

L’intitulé d’inventaire fait ainsi partie de l’acte de succession contenant l’inventaire du patrimoine du défunt. Cet acte peut être dressé par un notaire, mais également par un commissaire-priseur ou un huissier, à la demande des héritiers.

En en-tête d’acte, l’officier public indique quels sont les héritiers ayant demandé l’établissement de l’inventaire en question. Après vérification des pièces justificatives, le préambule mentionne la qualité (parenté exacte de l’héritier ou légataire universel ou à titre universel) et les droits successoraux des intéressés.

L’intitulé d’inventaire a les mêmes effets que l’acte de notoriété. Il permet d’établir une présomption simple d’héritier, mais également d’’héritier apparent, à l’égard des tiers (en ce sens : Cour de cassation, Chambre civile 1, 17 avril 2019, 18-16293).

D. Le certificat d’hérédité

Le certificat d’hérédité est en fait, un certificat de propriété sur des biens meubles de la succession. Il peut être établi par le maire, le notaire ou par un juge unique (du tribunal de justice le plus proche), à la demande d’un héritier en cas de petites successions sans biens immobiliers.

Ce certificat est gratuit mais ne peut être délivré, que pour les successions n’excédant pas le montant forfaitaire de 5335 euros, et ne contenant pas d’immeubles. Cependant, ces certificats sont la plupart du temps, refusés par les maires, qui n’ont qu’une simple faculté en la matière.

Il permet de prendre possession de créances publiques ou privées ou de titres nominatifs (actions, obligations, rente sur l’État) sans avoir besoin de recourir aux actes coûteux comme l’acte de notoriété ou l’intitulé d’inventaire. Il donne aux héritiers la qualité d’héritier apparent, mais ses effets sont limités au recouvrement des biens dont il certifie la propriété.

Face à la confiance des maires en la matière, et le peu d’utilisation en pratique, la « loi n° 2015-177 du 16 février 2015 a instauré un mode de preuve simplifié de la qualité dhéritier – attestation de lensemble des héritiers – pour les successions modestes afin de permettre dapurer le passif successoral et de percevoir les sommes détenues sur les comptes bancaires du défunt dans la limite de 5 000 euros revalorisés annuellement en fonction de lindice INSEE des prix à la consommation hors tabac » (C. mon. fin., art. L. 312-1-4 ; Arr. du 7 mai 2015, NOR: FCPT1508536A).

Depuis la loi du 16 février 2015 et la modification de l’article L 312-1-4 du Code monétaire et financier, certaines communes ne délivrent plus de certificat d’hérédité.

En cas de succession inférieure à 5 000 €, l’héritier pourra apporter la preuve de sa qualité par une attestation signée par tous les héritiers. Cette attestation d’hérédité doit préciser qu’il n’existe pas de testament ni d’autres héritiers du défunt, qu’il n’existe pas de contrat de mariage, qu’il n’y a ni procès, ni contestation en cours concernant la qualité d’héritier ou la composition de la succession.

Cette loi a en effet élargi la possibilité de débloquer les comptes dépendant d’une succession. Tout héritier en ligne directe peut obtenir le paiement des frais d’obsèques et des actes conservatoires au vu de diverses justifications. Il peut aussi obtenir la clôture des comptes du défunt et le versement des sommes y figurant dans certaines limites (articles L. 312-1-4, al. 2 à 5 du Code monétaire et financier).

Les signataires doivent autoriser le porteur de l’attestation à percevoir pour leur compte les sommes figurant sur les comptes du défunt ou à clôturer ces derniers. L’héritier devra remettre à l’établissement, outre l’attestation son extrait d’acte de naissance, un extrait d’acte de naissance du défunt et une copie intégrale de son acte de décès, le cas échéant, un extrait d’acte de mariage du défunt, les extraits d’actes de naissance de chaque ayant droit désigné dans l’attestation et un certificat d’absence d’inscription de dispositions de dernières volontés.

E. Le certificat successoral européen

Il est possible d’établir la preuve de la qualité d’héritier par le biais d’un certificat successoral européen. Issu du règlement 650/2012 du 4 juillet 2012 (entré en vigueur depuis le 17 août 2015), le certificat successoral européen a été créé pour accélérer le traitement des successions internationales, c’est-à-dire présentant un élément d’extranéité notamment lorsque le défunt était propriétaire de divers biens dans plusieurs pays. Grâce à ce règlement, l’application d’une multiplicité de lois nationales est évitée. La succession transfrontalière sera alors traitée par une seule autorité et législation.

Ce certificat peut être demandé par les héritiers, légataires, exécuteurs testamentaires ou administrateurs de la succession pour prouver leur qualité et exercer leurs droits ou pouvoirs dans les autres États membres (article 1381-1 du Code de procédure civile).

Une fois établi, le certificat comporte une force probante intrinsèque : il fait foi de son contenu.

Le principal atout de ce certificat réside donc dans sa capacité faciliter le règlement des successions internationales malgré les différents systèmes juridiques des États membres et de franchir plus facilement les barrières linguistiques avec un formulaire standard et multilingue

Il produit tous ses effets dans tous les États membres de l’Union européenne sans qu’il soit nécessaire de recourir à aucune procédure (Art. 69 du règlement).  Le certificat bénéficie d’une présomption (simple) quant à la véracité des éléments qu’il contient et toute personne qui agit sur la base des informations contenues dans le certificat ne se voit déchargée, sous la seule condition qu’elle ne soit pas informée que le contenu du certificat ne correspond pas à la réalité ou qu’elle l’ait ignoré en raison d’une négligence grave.

Le certificat, pendant sa durée de vie (6 mois), est présumé, conformément à l’article 69, points 2 et 3, « attester fidèlement l’existence d’éléments qui ont été établis en vertu de la loi applicable à la succession ou en vertu de toute autre loi applicable à des éléments spécifiques. La personne désignée dans le certificat comme étant l’héritier, le légataire, l’exécuteur testamentaire ou l’administrateur de la succession est réputée avoir la qualité mentionnée dans ledit certificat et/ou les droits ou les pouvoirs énoncés dans ledit certificat sans que soient attachées à ces droits ou à ces pouvoirs d’autres conditions et/ou restrictions que celles qui sont énoncées dans le certificat ». (CJUE, 12 oct. 2017 préc., point 60).

Il est délivré à la demande par les autorités compétentes de chaque État membre.

En France, il est délivré par le notaire qui est exclusivement compétent pour établir un certificat successoral européen (article 1381-1 du Code de procédure civile). Néanmoins tout notaire n’est pas en droit de délivrer un certificat successoral européen. Le notaire français ne sera compétent que si les juridictions françaises sont compétentes en vertu du règlement pour connaître de la succession.

Par ailleurs, le certificat successoral européen bénéficie également d’une priorité par rapport aux documents nationaux, ainsi que le considérant 69 du préambule le mentionne : « … aucune autorité ou personne devant laquelle serait produit un certificat délivré dans un autre État membre ne devrait être en droit de demander la production d’une décision, d’un acte authentique ou d’une transaction judiciaire en lieu et place du certificat ».

Cela révèle l’importance du règlement européen et du certificat. Il faut bien comprendre que l’existence de ce certificat permettra de déroger aux règles nationales et aura priorité sur le traitement interne de la succession.
Il s’ajoute aux modes de preuve existants, mais à l’inverse d’autres modes de preuve, il ne peut être utilisé que dans le cadre des successions internationales.

Toutefois, afin de faciliter la vie des héritiers ou légataires résidant dans un autre État membre que celui dans lequel la succession est ou sera réglée, il est permis, selon l’article 13 du Règlement, à toute personne de faire les déclarations relatives à l’acceptation de la succession, d’un legs ou d’une réserve héréditaire ou la renonciation à ceux-ci ou une déclaration visant à limiter sa responsabilité à l’égard des dettes de la succession sous la forme prévue par la loi de l’État membre de sa résidence habituelle devant les juridictions dudit État membre. Les considérants 32 et 33 précisent les conditions de ces options successorales.

Le certificat européen admet donc davantage de libertés que le droit français interne. Toutefois, la juridiction compétente pour connaître la succession reste compétente. Il ne s’agit que d’une possibilité accordée aux héritiers ou légataires.

II. Prouver sa qualité d’héritier au cours d’une action en justice

Le deuxième cas dans lequel il peut être nécessaire d’établir sa qualité d’héritier se retrouve dans le cadre d’une action en justice. Il est, en effet, possible de contester la qualité d’un héritier. Le demandeur à l’action qui intente la procédure, devra prouver qu’il est plus proche du défunt, que l’héritier contesté.

Cette action se nomme « action en pétition d’hérédité ». Elle est rendue nécessaire lorsque certains biens de la succession sont en la possession d’un tiers qui refuse leur remise aux héritiers parce qu’il s’estime héritier à leur place. Les héritiers exerceront donc une action afin de se faire reconnaître la qualité d’héritier.

Le Dalloz Action patrimoniale de la Famille présente cette action comme celle « par laquelle un héritier, quel quil soit, successeur universel ou à titre universel, légataire, ou institué contractuel, entend faire reconnaître sa qualité а lencontre dun tiers détenteur dun bien héréditaire qui prétend y avoir droit également en qualité de successeur. Le contentieux a pour objet la dévolution successorale, la qualité de successeur universel et la propriété des biens héréditaires qui y est liée » (Dalloz action Droit patrimonial de la famille – Chapitre 249 – Preuve de la qualité d’héritier – Christophe Verniéres ; Michel Grimaldi – 2018-2019).

A. Moyens de preuve

Le but étant de se faire reconnaître héritier à la place d’un autre. Aucun texte ne réglemente cette action. Au fil du temps, certaines règles se sont imposées en pratique. En cas de succession légale et afin d’exercer ce recours, la personne doit prouver son lien de parenté avec le défunt auprès d’un juge.

Dans le cas d’une dévolution légale, l’héritier présumé devra démontrer qu’il est un héritier de rang préférable, ou tout au moins égal, à celui de la partie adversaire. S’il invoque l’existence d’une transmission universelle par libéralité, il devra produire l’acte qui l’institut (testament ou institution contractuelle). La force probante de cet instrument est susceptible de varier en fonction de sa forme.  A la différence d’un acte authentique, un acte sous seing privé – tel qu’un testament olographe – ne fait pas foi par lui-même de son origine.

En toute hypothèse, les juges du fond disposent d’un pouvoir souverain « pour apprécier la valeur et la portée des documents produits » (Cass. 1re civ., 19 déc. 2012, n° 11-25.870, inédit).

Pour prouver son lien de parenté avec le défunt, un héritier prétendu est normalement tenu de fournir les documents officiels (actes de naissance, actes de mariage, jugements d’état) prouvant sa filiation ou son alliance. Cependant, cette exigence peut sembler excessive dans le cas de liens familiaux éloignés dans le temps.

Dans ces situations, la jurisprudence a établi une distinction entre la preuve de l’état civil et la preuve de la généalogie, permettant ainsi de démontrer la continuité de la lignée familiale par tous moyens. La Cour de cassation explique, à cet égard, que la dérogation « aux principes qui régissent la démonstration d’une filiation n’est admissible que dans les questions de généalogie, c’est-à-dire dans les cas où, d’une part, il s’agit de relations de parenté remontant à des temps éloignés et dont les preuves régulières sont, par suite impossibles à réunir, et où, d’autre part, l’état du successible n’étant pas en jeu, il y a seulement lieu de déterminer son degré de parenté avec le de cujus » (Cass. civ., 9 mars 1926 : DP 1926, 1, p. 225, note A. Rouast ; S. 1926, 1, p. 337, note H. Vialleton).

En somme, si un héritier prétend être l’enfant du défunt, il devra fournir des preuves officielles pour établir sa filiation. En revanche, un cousin éloigné pourra vraisemblablement prouver sa vocation successorale par d’autres moyens que des documents officiels.

On notera que la possession d’état est également un mode de preuve admis pour toutes les filiations, pourvu qu’elle soit constatée par un acte de notoriété (article 317 du Code civil).

B. Conséquences du succès l’action

Un arrêt du 7 mai 2020 vient préciser la possibilité, pour une non-propriétaire n’ayant pas levé l’option successorale, de réaliser une telle action : « Le tribunal a retenu en substance que Mme D nayant jamais exercé loption successorale, elle navait jamais eu la qualité de propriétaire du bien en cause et ne pouvait donc agir en revendication de sorte que la seule action qui lui était ouverte était la pétition d’hérédité » (Cour d’appel de Versailles – ch. 03 – 7 mai 2020 / n° 19/03584).

En cas de succession volontaire, la preuve des droits se fait par la production du testament. Le succès de l’action entraîne deux types d’effets :

  • Un effet entre les parties. Le défendeur est obligé de restituer tous les biens successoraux au véritable héritier. L’obligation varie en fonction de sa bonne ou mauvaise- S’il est de bonne foi, c’est-à-dire s’il croyait véritablement en sa qualité, l’héritier sera amené à restituer les biens sans être responsable de leur éventuelle dégradation, mais pourra conserver les fruits qu’il a perçus de ces derniers jusqu’à l’introduction de l’action. En cas d’aliénation des biens, il ne devra restituer que le prix de vente. S’il est de mauvaise foi il se doit de restituer non seulement les biens en état en étant responsable de leur détérioration, mais également les fruits y afférent. En cas d’aliénation, il devra restituer la valeur des biens et non le prix de leur vente.
  • Un effet à l’égard des tiers à la succession. Les tiers sont protégés contre ce genre d’action et ne sont pas responsables de la mauvaise détermination des héritiers. Pour l’acquisition de meubles, ils bénéficient de la protection de l’article2276 du Code civil, selon lequel « la possession vaut titre ». La simple détention matérielle du bien par un tiers, vaudra acte de propriété, jusqu’à preuve contraire. Pour l’acquisition d’un immeuble, les tiers de bonne foi bénéficient de la protection de la théorie de l’héritier apparent, s’ils ont acquis le bien à titre onéreux d’un détenteur qui avait l’apparence du successeur du propriétaire défunt du bien.

 

SOURCES :
Civ. 1re, 24 nov. 1969 : https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000006980945/
Cour de cassation – Troisième chambre civile – 28 mai 2020 / n° 19-13.150 : https://www-dalloz-fr.ezpaarse.univ-paris1.fr/documentation/Document?id=CASS_LIEUVIDE_2020-05-28_1913150
Cour de cassation – Troisième chambre civile – 24 septembre 2020 / n° 19-17.068 : https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/troisieme_chambre_civile_572/658_24_45476.html
Cour de cassation – Première chambre civile – 12 février 2020 / n° 19-11.668 : https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000041620387
Cour d’appel de de Reims – ch. civile 01 sect. II 18 mai 2018 / n° 17/02571 : https://www-dalloz-fr.ezpaarse.univ-paris1.fr/documentation/Document?id=CA_REIMS_2018-05-18_1702571
Cour d’appel de Versailles – ch. 03 – 7 mai 2020 / n° 19/03584 : https://www-dalloz-fr.ezpaarse.univ-paris1.fr/documentation/Document?id=CA_VERSAILLES_2020-05-07_1903584
http://www.dictionnaire-juridique.com/definition/personne-morale.php
http://vosdroits.service-public.fr/particuliers/F2527.xhtml
http://vosdroits.service-public.fr/particuliers/F12697.xhtml
http://www.vie-publique.fr/actualite/panorama/projet-loi-relatif-modernisation-simplification-du-droit-procedures-domaine-justice-affaires-interieures.html
http://www.dictionnaire-juridique.com/definition/comourants.php
https://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2012:201:0107:0134:FR:PDF
https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000030248562/2020-12-12/
Danielle Montoux – Fascicule 30 -Intitulé d’inventaire après décès, avec ou sans scellés
Marc NICOD – Fascicule 20 – Des preuves de la qualité d’héritier

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