Comment contester un testament notarié

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Un testament est un acte unilatéral toujours révocable par lequel une personne exprime ses dernières volontés et dispose de tout ou partie de ses biens pour le temps où elle n’existera plus. L’article 969 du Code civil prévoit trois formes de testament : le testament olographe, le testament authentique et le testament mystique.

Le testament authentique est aussi appelé testament notarié ou testament par acte public. Parfois, les héritiers s’estiment lésés et souhaitent contester la validité du testament du défunt. Est-il possible de contester un testament notarié ?

Le testament est l’acte par lequel « une personne (le testateur) dispose, pour le temps où il ne sera plus, de tout ou partie de ses biens ou de ses droits et qu’il peut révoquer » (Code civil, art.  895). C’est un acte grave soumis à des conditions de formes strictes. Il peut toujours être révoqué ou modifié, soit expressément, soit implicitement par un testament ultérieur.

Le testament doit être rédigé par écrit. Le testament verbal étant nul, son exécution dépendra du bon vouloir des héritiers légaux.

La loi française reconnaît quatre formes de testament :

  • Le testament olographe : il est rédigé, daté et signé de la main du testateur : il ne peut être fait dans le même acte par deux ou plusieurs personnes, à peine de nullité (Code civil, art. 968). Il ne doit contenir aucune formule particulière, mais, s’il est rédigé sans l’aide d’un professionnel averti, on peut craindre qu’il soit inexécutable ou frappé de nullité. L’intervention d’un notaire, d’un coût modique, est donc indispensable. Elle permet en outre la conservation du testament qui ne risque pas d’être égaré ou détruit (volontairement ou non) et d’informer les tiers de son existence en cas de décès par son inscription au Fichier central des dernières volontés. Seul l’état civil du testateur y est porté, le contenu du testament restant bien entendu secret. Les notaires interrogent systématiquement ce fichier lors de l’ouverture d’une succession ;
  • Le testament authentique : il est établi par le notaire en présence de deux témoins ou d’un deuxième notaire (formule préférable pour garantir sa confidentialité) sous la dictée du testateur. Il est recommandé notamment lorsque le testateur ne peut pas écrire de sa main. Il présente par ailleurs l’avantage de dispenser le légataire universel, au moment de la succession des formalités de publication et d’envoi en possession ;

Le coût du testament authentique est modique (environ 250 € hors honoraires de conseil). Il peut être inscrit au Fichier central des dernières volontés ;

  • Le testament mystique : c’est une formule originale extrêmement rare par laquelle le testateur remet solennellement à un notaire un document en déclarant qu’il s’agit de son testament. Le notaire constate cette remise et cette déclaration dans un acte dénommé procès-verbal de suscription (Code civil, art. 976). Ce testament peut avoir été rédigé avec l’aide du notaire. Il bénéficie comme le testament authentique reçu par le notaire d’une confidentialité et d’une sécurité absolue. Il peut être inscrit au Fichier central des dernières volontés ;
  • Le testament international : s’il existe un élément d’extranéité (nationalité différente du domicile par exemple) le testament, pour être exécutable dans tous les pays liés par les conventions relatives aux testaments internationaux, pourra être établi par un notaire en présence de deux témoins (L. n° 94-337, 29 avr. 1994).

Le testament authentique est réglementé sous les termes « testament public » par le Code civil aux articles 971 à 975, 980 et 1001. Mais étant un acte notarié, il est également soumis aux dispositions des articles 1317 à 1320 du Code civil, à la loi du 25 ventôse an XI et au décret n° 71-941 du 26 novembre 1971 relatif à l’acte notarié.

Parfois, les héritiers s’estiment lésés et souhaitent contester la validité du testament du défunt. Est-il possible de contester un testament notarié ?

Ce testament revêt donc un caractère d’autant plus solennel qu’il est soumis à ces dispositions juridiques. Pour contester ce testament, les héritiers devront alors s’engager dans une procédure d’inscription de faux ou, pour certaines énonciations, en rapporter la preuve contraire et en demander l’annulation.

 

I – La contestation par inscription de faux : les énonciations concernées 

Le testament authentique présente certains inconvénients :

  • La rigueur des règles de forme ;
  • Le testateur peut craindre que les témoins diffusent le contenu du testament faisant perdre à celui-ci son caractère secret ; cet inconvénient n’existe plus si les témoins sont remplacés par un deuxième notaire ;
  • Le notaire peut craindre une mise en cause de sa responsabilité en cas d’annulation après le décès du testateur, notamment pour n’avoir pas respecté les règles de forme imposées ;
  • Le notaire qui établit le testament authentique perçoit des émoluments ; mais compte tenu de leur montant peu élevé, ce coût supplémentaire ne doit pas être une cause pour préférer une autre forme.

Attention : L’action en nullité d’un testament peut être introduite par l’administrateur légal sous contrôle judiciaire sans autorisation du juge des tutelles (Cour de cassation, 1re chambre civile du 20 septembre 2006, n° 04-18.501).

Ainsi, le testament notarié dispose-t-il d’une force probante importante. Le régime juridique du testament authentique s’articule autour de deux idées directrices :

  • Étant un testament, il doit reproduire exactement les dernières volontés du testateur ;
  • Étant un acte authentique, il doit satisfaire aux règles de forme imposées pour ce type d’acte et à celles du Code civil pour le testament authentique.

En effet, ce testament fait foi de tout ce que le notaire a personnellement constaté et qu’il est obligé légalement de constater. Cela concerne, en premier lieu, l’assistance du testateur par deux notaires ou un notaire et deux témoins, conformément à l’article 971 du Code civil.

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Le notaire doit procéder en personne à la réception de la volonté de tester. Il ne peut donc pas déléguer cette mission à un clerc assermenté. Le choix des témoins est en principe libre. Toutefois, quelques restrictions sont imposées par la loi. Les témoins doivent, par exemple, être capables d’entendre, de voir, de signer, de comprendre la langue française, être majeurs et avoir la jouissance de leurs droits civils, comme le prévoit l’article 980 du Code civil.

Les légataires, les parents ou alliés jusqu’au 4e degré, les clercs de notaire (art. 975) ne peuvent pas être témoins en raison du lien qui les unit au testateur. Par ailleurs, dans le même acte, deux époux ne peuvent pas être témoins (art. 980).

Pour contester la procédure de rédaction du testament notarié, il faudra également recourir à l’inscription de faux. La rédaction de ce testament se compose de cinq étapes.

La première étape est celle de la dictée. En vertu de l’article 972 du Code civil, il doit s’agir d’une énonciation verbale (Cour de cassation, 1re chambre civile du 26 septembre 2007 n° 05-19.909). Comme l’a rappelé la Cour de cassation dans un arrêt, cette énonciation verbale doit impérativement se faire devant les deux notaires ou devant le notaire et les deux témoins (Cour de cassation, 1re chambre civile du 18 mai 2011, n° 09-15.231 : JurisData n° 2011-009086). Cela est rappelé par un arrêt de la Cour d’appel de Rouen, du 2 mars 2022, n° 18/03926.

L’article 972, alinéa 4 du Code civil prévoit qu’un recours à un interprète est possible, depuis la loi n° 2015-177 du 16 février 2015. L’interprète peut se charger de la dictée et de la lecture et intervient uniquement lorsque les notaires ou les témoins ne comprennent pas la langue du testateur.

Vient ensuite l’écriture, deuxième étape de la rédaction. (Cour de cassation, 1re chambre civile du 1er février 2012, n° 10-31.129). Le notaire doit transposer en style juridique la dictée du testateur afin d’en favoriser la compréhension. Il doit tout de même conserver le sens et la substance de la dictée. Le notaire est un « secrétaire intelligent », d’après la jurisprudence.

L’article 972, alinéa 5 du Code civil prévoit que lorsque le testateur peut écrire en langue française, mais ne peut pas parler, le notaire écrit lui-même le testament ou le fait écrire à la main ou mécaniquement d’après les notes rédigées devant lui par le testateur, puis en donne lecture à ce dernier.

Puis l’étape de la lecture prend le relais. Le testament doit être lu au testateur afin que celui-ci s’assure de la bonne compréhension par le notaire de ses volontés.

Vient ensuite le tour des mentions expresses. Le notaire doit faire mention expresse de l’accomplissement des formalités requises, conformément à l’article 972 alinéa 4 du Code civil.

Enfin, l’étape de la signature vient clore la procédure de rédaction. L’article 973 du Code civil oblige le testateur à signer en présence des notaires ou du notaire et des témoins. Le notaire et les témoins doivent également signer l’acte testamentaire.

Enfin, en ce qui concerne les notaires, un notaire ne peut pas recevoir un acte auquel il est partie, ni même un acte pour lequel il a un intérêt personnel (D. n° 45-0117, 19 déc. 1945, art. 13, 4°).

Le premier alinéa de l’article 2 du décret n° 71-941 du 26 novembre 1971 interdit à un notaire de recevoir des actes dans lesquels ses parents ou alliés, à tous les degrés en ligne directe, et jusqu’au degré d’oncle ou neveu en ligne collatérale, sont parties ou qui contiennent des dispositions en leur faveur.

Cette interdiction est étendue, par l’alinéa 2 du même article, aux associés du notaire membre d’une société civile professionnelle, et aux parents ou alliés au degré prohibé de tous les notaires membres de la société. Elle s’applique au notaire salarié à l’égard de son employeur ou des associés de la société qui l’emploie (D. n° 93-82, 15 janv. 1993, art. 2, al. 5 et 6).

Un notaire ne peut donc pas recevoir un testament contenant des dispositions en sa faveur, en la faveur d’un de ses associés ou dans lequel ses parents ou alliés au degré prohibé et ceux de ses associés pourraient être intéressés, soit comme testateur soit comme légataires, ou qui contiendrait quelques dispositions en leur faveur.

Deux notaires associés ne peuvent pas recevoir le même testament authentique, l’article 3 du décret n° 71-941 du 26 novembre 1971 précisant que deux notaires membres de la même société civile professionnelle ne peuvent recevoir ensemble un acte nécessitant le concours de deux notaires pour le notaire salarié (D. n° 93-82, 15 janv. 1993, art. 2, al. 4).

Attention : La violation de ces règles rend le testament nul pour le tout, et pas seulement pour la disposition prohibée.

Ainsi, toute contestation relative aux solennités imposées par la loi doit être exprimée devant la justice par le biais d’une procédure d’inscription de faux. Cette procédure est très onéreuse et contraignante pour les héritiers souhaitant contester un testament notarié.

La Cour d’appel de Papeete rappelle dans un arrêt une jurisprudence de la Cour de cassation selon laquelle l’absence ou l’irrégularité d’une mention obligatoire contenue dans un acte authentique doit être contestée par une action en nullité, et la fausseté des déclarations, par la procédure d’inscription de faux (Cour d’appel de papeete, Cabinet D, 11 août 2022, n° 21/00021).

II – La contestation par preuve contraire 

Lorsque les énonciations de l’acte sont relatives à des faits qui ne relèvent pas directement de la compétence de l’officier public, il n’est plus nécessaire de recourir à la procédure de l’inscription de faux. Cela signifie que les autres énonciations de l’acte testamentaire peuvent être remises en cause par l’apport d’une preuve contraire. L’héritier contestataire pourra alors saisir la justice d’une action en nullité du testament notarié.

Par exemple, la mention de l’acte par laquelle le notaire affirme que le testateur est sain d’esprit peut être combattue par preuve contraire. En effet, elle ne constitue qu’une présomption et il est possible de démontrer par tous moyens l’insanité d’esprit du testateur, comme l’a rappelé la Cour de cassation dans un arrêt du 25 mai 1987.

La Cour de Dijon reprend cette jurisprudence et précise qu’il est possible d’être admis, sans être obligé de recourir à la voie de l’inscription de faux, à prouver que le testateur n’était pas sain d’esprit, malgré l’énonciation contraire du testament authentique, cette énonciation n’exprimant que l’opinion du notaire sur un état mental que la loi ne l’a pas chargé de constater (Cour d’appel de Dijon, 10 mars 2022, n° 20/00662).

La mention du consentement libre et éclairé du testateur, condition de fond de validité de l’acte testamentaire, peut également être combattue par preuve contraire. Ainsi, un héritier contestataire peut soutenir et rapporter la preuve que le consentement du testateur a été vicié par l’erreur, le dol ou la violence.

La mention selon laquelle les parties, testateur et légataire, ont réciproquement la capacité de disposer et de recevoir par testament, n’est pas un élément de l’acte testamentaire qui fait foi jusqu’à inscription de faux. La contestation du testament notarié est donc possible par l’apport d’une preuve de l’incapacité d’une des parties lors de la rédaction du testament.

Il est donc possible de contester un testament notarié en rapportant la preuve contraire des énonciations qui ne font pas foi jusqu’à inscription de faux.

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