Rédiger seul son testament
Un testament est un document écrit, rédigé par une personne souhaitant déterminer à l’ avance, la transmission de son patrimoine. Le testament détermine ainsi la transmission des biens après la mort.
C’est un texte important, qui doit être rédigé avec soin. Du fait de l’importance de cet acte, le législateur a encadré strictement les conditions de sa validité. L’article 967 du Code civil ouvre la Section 1 du Chapitre V relative aux règles générales sur la forme des testaments.
Cet article dispose ainsi : « toute personne pourra disposer par testament soit sous le titre d’institution d’héritier, soit sous le titre de legs, soit sous toute autre dénomination propre à manifester sa volonté ».
Ainsi, en France, pour être valable, le testament doit remplir des conditions de forme très strictes. Malgré ces exigences, il demeure possible de rédiger seul son testament, sans l’aide d’un notaire. Suivant les évolutions de chaque rédacteur, tout testament peut faire l’objet de révocation et de modification.
En revanche, une opposition nette est édictée à l’article 968 du Code civil : le testament doit être strictement personnel et ne pourra être établi pour deux personnes. Cette disposition révèle l’essence proprement personnelle du testament, attaché à la qualité d’indépendance de la personnalité juridique d’une personne.
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Le testament rédigé seul, sans l’aide ou l’accompagnement d’un notaire ou de toute autre personne qualifiée est appelé « testament olographe ». Ce terme désigne, en grec ancien entier (holo) et écrit (graphos).
Cette étymologie relève l’importance et toute la consistance du testament : elle reprend l’entier patrimoine du rédacteur, livré par écrit, à ses héritiers. Cette forme de testament a l’avantage d’être le moins coûteux, puisqu’aucune aide n’est nécessaire à sa rédaction. Il permet également de conserver le secret sur la transmission du patrimoine de son rédacteur.
Édifiant un ordre public de protection, la loi impose trois conditions de forme pour qu’un tel testament soit valable.
Il doit ainsi être : rédigé entièrement de la main de son auteur ; être daté de la main de son auteur ; signé de la main de son auteur. Ces trois conditions sont les seules nécessaires à l’établissement du testament olographe.
Ainsi, les conditions de l’article 970 du Code civil sont exhaustives : « Le testament olographe ne sera point valable s’il n’est écrit en entier, daté et signé de la main du testateur : il n’est assujetti à aucune autre forme ». Ces trois conditions permettent de vérifier l’origine du testament. Une expertise d’écriture pourra être, en effet, effectuée et la capacité de l’auteur du testament à la date de rédaction.
I – Obligation de rédaction manuscrite
Principe
L’obligation de rédaction manuscrite du testament découle de l’article 970 du Code civil, précité. Le testament ne peut, ainsi, être oral. Les enregistrements vidéo ou audio, les écritures sur ordinateur ou machine à écrire et les photocopies sont invalides.
Un arrêt de la Cour d’appel de Paris du 26 juin 2019 rappelle in fine cette prohibition : « Le fait qu’il reprenne en partie les termes du testament du 7 septembre 2010, déclaré nul plus avant, et qu’il ait été signé par le testateur en présence de trois témoins comme l’indique M. Z P dans ses écritures, tout comme la production de témoignages et d’un enregistrement vidéo ne peuvent suppléer au défaut des conditions de forme précitées, peu important dès lors la capacité à tester du défunt » (Cour d’appel de Paris – Pôle 03 ch. 01 – 26 juin 2019 / n° 17/04080).
Incapacité
S’agissant des personnes n’étant pas aptes physiquement à écrire un tel testament, elles seront obligées de s’adresser à un notaire.
Conditions de forme
S’agissant des conditions de formes relatives à la rédaction manuscrite, le testament peut être rédigé dans n’importe quelle langue et à l’aide de n’importe quel système d’écriture.
Le support d’écriture est indifférent. Par exemple, il est envisageable de rédiger son testament sur une serviette en papier, sur une nappe ou encore un mur (en ce sens : Cour de cassation – Chambre criminelle – 3 décembre 1998 / n° 98-81.763).
L’instrument d’écriture est également indifférent, un crayon à papier ou un stylo à plume sont valables. Néanmoins, il est préférable d’utiliser une encre qui ne s’efface pas facilement.
Le testament écrit par une autre personne qui recopie la volonté de l’auteur est refusé (en ce sens : Cour de cassation — Chambre criminelle — 6 février 1997 — n° 96-83.145). Cette exigence révèle l’extrême personnalité de l’acte de tester, et de l’importance des suites d’un tel acte.
L’aide d’une autre personne est cependant possible si le testament est écrit de la main de l’auteur avec la compréhension de ce qu’il écrit, par exemple, la personne fournit un modèle, ou soutient la main de l’auteur qui ne sait pas très bien écrire ou qui a des difficultés physiques à le faire.
On parle alors d’un testament olographe « à main guidée » (reconnu de longue date en jurisprudence. En ce sens : Cour de cassation – Première chambre civile – 11 février 1997 / n° 95-12.382 ; cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 18 janvier 2017, 15-27.535, Inédit).
Un testament rédigé seul peut comporter des ratures ou des tâches, néanmoins si elles entraînent un doute quant à la volonté de l’auteur il est préférable de réécrire entièrement le document.
Un testament rédigé seul peut comporter plusieurs pages, il est judicieux de les numéroter et de dater et signer chacune d’entre elles pour plus de sécurité juridique. L’acte ainsi rédigé aura moins de risque de faire l’objet d’une contestation portant sur la forme. Le seul testament original est valable, à l’exclusion de toute copie par un système de reproduction mécanique comme une photocopie (Cour de cassation – Première chambre civile – 19 avril 2005 / n° 02-16.447).
II – Obligation de dater
Principe
S’agissant de l’obligation de dater, elle permet de vérifier la capacité du testateur au moment de rédiger son testament et de juger de l’éventuelle postériorité par rapport à ce dernier, d’un autre testament.
La date doit comporter le jour, le mois et l’année. L’oubli d’un de ses éléments entraîne en principe la nullité du testament (Cour d’appel de Versailles – ch. 01 sect. 01 – 26 juin 2008 / n° 08/02475).
Toutefois, la jurisprudence se montre assez souple sur cet élément et les juges peuvent rechercher d’autres indices, au sein du testament, permettant de déterminer la date (en ce sens : Req. 4 juin 1934 : 1934 DH. 460 ; cours de cassation – Première chambre civile – 10 mai 2007 / n° 05-14.366).
Si cela ne permet pas de déterminer une date précise, le testament sera annulé. La mention de l’heure et du lieu de rédaction n’est pas nécessaire. Un testament rédigé seul qui a été élaboré en plusieurs étapes avec des dates différentes est admis. Il faut également préciser que la date peut figurer à tout endroit du texte : au début, dans le texte, à la fin par exemple.
Détermination judiciaire de la date
Face à une date incomplète, les juges peuvent sauver la validité du testament s’ils peuvent la déterminer au moyen d’indices intrinsèques, c’est-à-dire, internes au testament. Des indices extrinsèques peuvent également servir, mais ils doivent alors être corroborés par les éléments intrinsèques (en ce sens : Cour de cassation – Première chambre civile – 8 mars 1988 / n° 86-14.944).
Il est aussi admis que la détermination d’une période suffit à suppléer l’absence de date, dès lors qu’il n’est pas contesté que le testateur avait alors sa pleine capacité à tester et qu’aucun testament postérieur à cette période n’est venu révoquer le testament en question. En cas de semblables contestations, la détermination d’une période ne suffit cependant pas, il faut reconstituer la date exacte.
III – Obligation de signature
Principe
L’obligation de signer l’acte testamentaire assure que le testateur approuvait le contenu de son testament. La signature doit correspondre à celle habituellement utilisée par l’auteur, elle sera comparée et authentifiée grâce à des documents officiels en cas de contestation (Cour de cassation – Première chambre civile – 23 février 1983 / n° 82-10.856).
La signature n’a pas à correspondre à celle habituellement utilisée par l’auteur, quoique ce soit préférable. Elle peut consister en la simple écriture des noms et prénoms, sans graphisme particulier (il s’agit souvent, dans ces cas, d’incapacité ou d’inaptitude à l’écriture).
Le nom apposé en signature peut être le nom marital ou un pseudonyme s’il était habituellement utilisé par le testateur. La signature doit être faite même si le nom et le prénom de l’auteur sont mentionnés dans le corps du texte. Cette double exigence permet de sécuriser la validité du document et d’authentifier de manière plus certaine, l’acte.
La signature doit être apposée à la fin du texte, cela permet de prouver son lien avec le document et les éléments susmentionnés dans l’acte. Cela permet de prouver l’approbation par le testateur de la totalité de son testament.
Modifications du testament
Des modifications postérieures au testament sont possibles. Mais si elles constituent des dispositions testamentaires nouvelles et devront, à ce titre, être datées et signées.
Style à utiliser
De plus, certaines erreurs sont à éviter afin qu’il n’y ait aucun doute quant aux dernières volontés de l’auteur. En effet, il faut préférer l’utilisation de la première personne du singulier et du présent de l’indicatif au conditionnel qui peut être soumis à interprétation. Par exemple, « j’aimerais que X ait tel bien » donne « je lègue tel bien à X ».
Identification du légataire
Si un légataire est désigné, le mieux est de donner le plus d’information possible sur son identité (nom, prénom, adresse, lien de parenté). Il faut écrire de manière précise que le document en question fait office de testament. « Ceci est mon testament » écrit noir sur blanc au début du document le rend incontestable (Cour de cassation – Première chambre civile – 14 janvier 2003 / n° 00-18.526).
IV – Conclusion
En conclusion, il faut être le plus précis et clair possible. La conservation du testament olographe est également une question essentielle. Plusieurs options sont offertes à leurs auteurs.
Premièrement, la conservation par l’auteur. Cependant, le risque de perte, de vol ou de destruction est élevé. Il est également possible que le testament ne soit pas retrouvé. Deuxièmement, la conservation chez un notaire.
Ce dernier ne regardera pas le contenu du testament, mais pourra indiquer à l’auteur des problèmes de présentation, par exemple. Le notaire pourra, en outre, effectuer l’inscription du document au fichier central des dernières volontés, sur demande expresse de l’auteur (Cour de cassation – Première chambre civile – 8 juillet 2020 / n° 18-23.337).
Ce dernier est obligé de venir lui-même le déposer en fournissant un papier d’identité. Troisièmement, la conservation dans un coffre de banque. Cette conservation nécessite la location d’un coffre au nom de l’auteur.
Elle peut se révéler plus onéreuse donc. Quatrièmement, la conservation par un tiers. Toutefois, cela représente une grande responsabilité et une extrême confiance doit exister entre le tiers et l’auteur.
SOURCES :
ARTICLE 967 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/id/LEGISCTA000006150547/
ARTICLE 970 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/id/LEGISCTA000006150547/
COUR D’APPEL DE DE PARIS – PÔLE 03 CH. 01 – 26 JUIN 2019 / N° 17/04080 : https://www.doctrine.fr/d/CA/Paris/2019/CA0C803902E129E14EFAF
COUR DE CASSATION – CHAMBRE CRIMINELLE – 3 DÉCEMBRE 1998 / N° 98-81.763 : https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007580910/
COUR DE CASSATION — CHAMBRE CRIMINELLE — 6 FÉVRIER 1997 — N° 96-83.145 : https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007066545
COUR DE CASSATION – PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE – 11 FÉVRIER 1997 / N° 95-12.382 : https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007037809/
COUR DE CASSATION, CIVILE, CHAMBRE CIVILE 1, 18 JANVIER 2017, 15-27.535, INÉDIT : https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000033901681
COUR DE CASSATION – PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE – 19 AVRIL 2005 / N° 02-16.447 : https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007049926/
COUR D’APPEL DE DE VERSAILLES – CH. 01 SECT. 01 – 26 JUIN 2008 / N° 08/02475 : https://www-dalloz-fr.ezpaarse.univ-paris1.fr/documentation/Document?id=CA_VERSAILLES_2008-06-26_0802475
COUR DE CASSATION – PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE – 10 MAI 2007 / N° 05-14.366 : https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000017828621/<
COUR DE CASSATION – PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE – 8 MARS 1988 / N° 86-14.944 : https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007020229/
COUR DE CASSATION – PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE – 23 FÉVRIER 1983 / N° 82-10.856
COUR DE CASSATION – PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE – 14 JANVIER 2003 / N° 00-18.526 : https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007045190
COUR DE CASSATION – PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE – 8 JUILLET 2020 / N° 18-23.337 : https://www.mcj.fr/jurisprudence/cour-de-cassation-civile-chambre-civile-1-8-juillet-2020-18-23-337-inedit-1010736
QUE CHOISIR – SPÉCIAL SUCCESSION DONATION – MARS 2015
ÉTABLIR UN TESTAMENT : http://vosdroits.service-public.fr/particuliers/F770.xhtml
À QUOI SERT LE FICHIER CENTRAL DES DISPOSITIONS DE DERNIÈRES VOLONTÉS (FCDDV) ? : http://vosdroits.service-public.fr/particuliers/F15009.xhtml
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