Droit de retour

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Le retour est une succession particulière qui, au décès d’une personne propriétaire d’un bien acquis à titre gratuit, fait revenir ce bien dans le patrimoine de l’auteur de la libéralité ou de ses descendants. Ce droit peut être d’origine légale ou conventionnelle.

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En outre, le droit de retour légal des père et mère a été institué afin d’assurer la conservation des « biens de famille ». Il est la contrepartie de la suppression de la réserve des ascendants.

Le droit de retour de l’article 738-2 du Code civil, s’exerce « dans tous les cas », c’est-à-dire même en cas d’aliénation des biens qui y sont soumis. Le défunt ne peut en priver ses bénéficiaires.

Clause de retour conventionnel : lorsque la donation consentie par le père ou la mère contient une clause de retour conventionnel, cette clause anéantit la donation en cas de précédés du donataire. Le retour légal ne peut donc jouer, sauf dans l’hypothèse où, à l’occasion d’une aliénation, le donateur a renoncé au retour conventionnel.

Dans ce cas, le retour, qui porte sur un bien qui a été aliéné, s’exerce en valeur.

Si le défunt laisse des descendants ou des ascendants privilégiés renonçant ou indignes, le droit de retour devrait jouer, comme en matière d’adoption simple, car le risque de passage des biens d’une famille à l’autre existe. La Cour de cassation a ainsi admis le jeu du droit de retour légal de l’article 738-2 Code civil en cas de renonciation des enfants du défunt (1).

I. Droit de retour légal

 A. Règles générales

Le droit de retour légal est fondé sur le principe de conservation des biens dans la famille. Lorsqu’il existe, le droit de retour légal conduit à distinguer deux successions : celle portant sur tous les biens autres que ceux concernés par le retour légal, dite « ordinaire », et celle portant sur le (s) bien (s) objet du droit de retour légal, dite « anormale ».

Chacune de ces successions est réglée indépendamment l’une et l’autre. Le retour légal produit tous les effets d’une succession. Le bénéficiaire reprend le bien dans l’état dans lequel il se trouve au décès. Il est tenu au passif lié aux biens concernés. Il bénéficie de l’option successorale.

B. Droit de retour légal dans la succession de l’adoption simple

Le droit de retour légal dans la succession de l’adopté simple joue aussi bien au profit de ses parents adoptifs que de ses parents par le sang (Code civil, article 368-1). Il est subordonné à la réunion de plusieurs conditions :

  • L’adopté doit être décédé sans descendants, ni conjoint survivant, ou bien ceux-ci ont renoncé à la succession ou ont été déclarés indignes de succéder, héritier, succession ;
  • Il laisse ses père et mère et/ou l’adoptant ou des descendants de ceux-ci ;
  • Il a reçu à titre gratuit des biens de la part de l’adoptant ou de ses pères et mères par le sang ;
  • Ces biens existent toujours en nature dans la succession de l’adopté. En cas de donation de somme équivalente, existe au moment du décès.

Les biens donnés retournent dans le patrimoine du donateur ou de ses descendants, sous réserve des droits acquis par les tiers. Le surplus des biens de l’adopté se divise par moitié entre la famille d’origine et la famille de l’adoptant.

II. Droit de retour légal des ascendants donateurs

Le défunt doit avoir été gratifié d’une donation entre vifs par son père ou par sa mère et doit être décédé sans descendance ou laisser des descendants renonçant (Code civil, article 738-2). Pour beaucoup, le droit de retour légal joue en présence du conjoint survivant.

Le droit de retour bénéficie uniquement aux père et mère, qui ne peuvent renoncer à leur droit de retour légal avant l’ouverture de la succession (Pacte sur succession futur prohibé), leur renonciation au droit de retour conventionnel étant sans effet sur le droit de retour légal (2).

Il s’exerce en nature si le bien donné a été conservé par le défunt ou, à défaut, en valeur jusqu’à concurrence de ce l’actif successoral. La valeur est appréciée au jour du décès.

Il ne produit effet que jusqu’à concurrence de la vocation successorale des père et mère, c’est-à-dire un quart pour chacun d’eux. La valeur du bien objet du droit de retour s’impute donc sur leurs droits successoraux dans la succession.

Il convient de préciser, également, qu’antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi n° 72-3 du 3 janvier 1972 (JO 5 janv) (4), les ascendants disposaient d’un droit de retour légal sur la totalité des biens donnés en cas de prédécès sans postérité des enfants donataires. Ce droit a, finalement, été supprimé par l’abrogation de l’ancien article 767 du Code civil. Cependant toutes les donations consenties antérieurement restent bénéficiaires de ce droit.

Ce droit n’était accordé qu’à l’ascendant qui avait fait donation au de cujus. Il ne portait que sur les biens ayant fait l’objet de la donation et qui se retrouvaient en nature dans la succession du donataire.

Ce droit de retour ouvrait une succession séparée de la succession ordinaire. Si l’ascendant optait pour l’acceptation de la succession anomale, il reprenait les biens donnés dans l’état où ils se trouvaient et participait au passif du de cujus dans la proportion de l’actif qu’il recevait. Si, à l’opposé, il refusait la succession, les biens faisant l’objet de la succession anomale étaient transférés vers le patrimoine de la succession ordinaire.

Mais désormais, en l’absence de stipulation d’un droit de retour conventionnel dans l’acte constitutif de la mutation entre vifs, les pères et mère bénéficient d’un droit de retour sur les biens ayant fait l’objet d’une donation par eux. Cependant ce droit de retour s’exerçant en valeur et seulement sur une quote-part des biens, il ne peut être qualifié de succession anomale (C. civ., art. 738-2).

A. Droit de retour légal en cas de concours entre conjoint survivant et collatéraux privilégiés

Lorsque le défunt laisse seulement un conjoint survivant et des collatéraux privilégiés, en principe le conjoint recueille toute la succession. Cependant, si le défunt avait reçu à titre gratuit des biens de ses ascendants, même dans le cadre d’un partage successoral (3), ces biens sont dévolus par moitié à ses frères et sœurs ou leurs descendants s’ils sont eux-mêmes descendants du ou des parents à l’origine de la transmission (Code civil, article 757-3).

Les biens doivent exister en nature dans le patrimoine du défunt au jour de l’ouverture de la succession. Le droit de retour est supplétif de la volonté du défunt. Celui-ci peut donc disposer de ces biens par testament au profit du conjoint ou d’un autre légataire.

Le droit de retour a lieu à une indivision entre le conjoint survivant et les bénéficiaires du droit de retour.

Donc en clair, lorsque le défunt est décédé sans descendance mais en présence d’un conjoint survivant, deux successions s’ouvrent :

-Une successions anormale selon l’origine des biens appartenant au défunt, lesquels sont transmis pour moitié au conjoint survivant et pour le surplus aux collatéraux privilégiés, eux-mêmes descendants des ascendants à l’origine de la transmission. Toutefois, la présence d’un legs universel fait obstacle à cette transmission anormale (TGI Paris, 2e ch., 12 mai 2015, no 27, act. 747).

Dès lors, aucune indemnité n’est due à la succession au titre de la soulte, si les biens ont été attribués au défunt à charge de soulte dans un partage successoral (5). Par ailleurs, l’article 757-3 du code civil ne fait aucune distinction selon que les biens sont dans le patrimoine du défunt à charge ou non de soulte. Étant observé que la l’article 2 de la loi du 26 juillet 2019 (6) (JO 27 juill.) modifie les dispositions de l’article 757-3 du code civil pour les biens situés en Polynésie française, pour les successions ouvertes depuis le 28 juillet 2019.

En effet, cet article dispose pour « l’application en Polynésie française de l’article 757-3 du code civil lorsque des biens immobiliers sont en indivision avec les collatéraux ou ascendants du défunt, ils sont dévolus en totalité à ses frères et sœurs ou à leurs descendants, eux-mêmes descendants du ou des parents prédécédés à l’origine de la transmission.

Le conjoint survivant qui occupait effectivement le bien à l’époque du décès à titre d’habitation principale bénéficie toutefois d’un droit d’usufruit viager sur la quote-part indivise du bien incluse dans la succession » ;

-Une succession ordinaire pour le reste des biens.

PS : Les biens reçus de son ascendant par le défunt en règlement d’une créance de salaire différé échappent au droit de retour légal des collatéraux privilégiés, selon une jurisprudence récente de la Cour de cassation, en date du 1er décembre 2021 (7).

En l’espèce, un enfant s’était vu attribué à l’occasion du partage de la succession d’un de ses parents des parcelles, dont une partie en règlement d’une créance de salaire différé. Il est décédé le 27 septembre 2011, en laissant pour lui succéder son époux. Lors du partage de cette succession, un litige est né entre le conjoint survivant et les sœurs de la défunte quant à l’assiette du droit de retour légal.

Pour dire que l’ensemble des biens attribués à la défunte par l’acte de partage, présents en nature au jour de l’ouverture de sa succession, constitue l’assiette du droit de retour légal de ses sœurs, la cour d’appel de Limoges avait retenu que, si le droit de retour légal ne peut porter, en valeur, que sur la moitié des biens qu’elle avait recueillis dans l’actif net de succession et non au titre de la créance de salaire différé, il devait pouvoir s’exercer sur l’intégralité des biens qui avaient été attribués à celle-ci, sans que le juge ne puisse, en l’état et en l’absence d’accord entre les parties, se prononcer sur l’attribution de lots indivis entre le conjoint survivant et les collatéraux privilégiés (CA Limoges, 5 déc. 2019, nº 18/006391).

Se faisant, alors que le droit de retour légal ne peut porter sur les biens attribués en règlement de la créance de salaire différé, la cour d’appel a violé les textes susmentionnés ; par conséquent la Cour de cassation a cassé l’arrêt et a estimé que les biens reçus de son ascendant par le défunt en règlement d’une créance de salaire différé échappent au droit de retour légal des collatéraux privilégiés.

B. Droit de retour conventionnel

Le droit de retour conventionnel peut être stipulé dans un acte de donation par une clause prévoyant que le bien retournera dans le patrimoine du donataire (Code civil, article 951). A la différence du droit de retour légal, le retour conventionnel a lieu même si le donataire laisse des descendants, sauf stipulation contraire expresse dans l’acte.

Le droit de retour suppose que le bien figure toujours dans le patrimoine du donataire à son décès. Mais la donation peut s’accompagner d’une clause d’inaliénabilité.

Comme l’écrivent MM. Prieur, Ferret et Giray, « la stipulation du droit de retour évitera une transmission des actions à des personnes “indésirables” dans la société, au profit desquelles le donataire aurait pu prendre des dispositions testamentaires. Même en cas de succession ab intestat, il évitera la dispersion des actions dans la famille à des frères et sœurs non concernés par la poursuite de l’activité de l’entreprise. Si le donataire laisse des enfants mineurs, il est également plus judicieux que les actions reviennent au donateur, si la veuve du donataire administratrice légale sous contrôle judiciaire des biens de ses enfants mineurs n’a pas la compétence nécessaire à la gestion de ce patrimoine professionnel » (Prieur, Ferret et Giray, Pacte familial et transmission d’entreprise, Dr. sociétés, Actes pratiques, 1992, no 6, p. 8).

Le droit de retour suppose que le bien figure toujours dans le patrimoine du donataire à son décès. Mais la donation peut s’accompagner d’une clause d’inaliénabilité. Cependant, une clause de retour conventionnel n’interdit pas l’entrée du bien dans la communauté universelle du donataire, même si le droit de retour est complété d’une interdiction d’aliéner. L’entrée en communauté universelle n’est pas une aliénation (8).

La stipulation d’un droit de retour portant sur un immeuble (ou sur des droits immobiliers) est soumise à publicité foncière (Décr. N° 55-22 du 4 janvier 1955 article 28, 2° et 30,1).

Le droit de retour opère de plein lors du décès du donataire, par conséquent, la renonciation au droit de retour n’est pas possible avant le décès du donataire

Il opère de façon rétroactive : le donataire est censé n’avoir jamais été propriétaire des biens (9). Il est considéré comme un possesseur de bonne foi. Il n’est pas tenu de restituer les fruits et revenus du bien et ne répond pas de son usure normale ou de sa destruction par cas fortuit.

Le donateur doit rembourser les dépenses nécessaires ou utiles faites sur le bien. Les droits des tiers sont rétroactivement anéantis, sous réserve de la théorie du propriétaire apparent.

Par ailleurs, la renonciation au droit de retour conventionnel n’emporte pas renonciation au droit de retour légal de l’article 738-2 du code civil (10).

Le droit de retour conventionnel s’exerce indépendamment des droits successoraux du donateur dans la succession du donataire.

SOURCES :

  1. https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000025921771&fastReqld=1451274114&fastPos=1
  2. https://www.legifrance.gouv.fr/rechJuriJudi.do?reprise=true&page1
  3. https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000036697079&fastReqld=836285396&fastPos=1
  4. https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000000875196/
  5. https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000036697079
  6. https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000038827241/
  7. https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000044440916?init=true&page=1&query=20-12.315&searchField=ALL&tab_selection=all
  8. https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000030382398
  9. https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000031226813/
  10. https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000031374967/

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