Rupture de l’indivision : les solutions possibles
Lorsqu’il y a plusieurs héritiers, ou héritiers et légataires, une indivision existe entre eux, on parle d’indivision successorale.
Le site gouvernemental économie.gouv définit l’indivision comme suit : « Après un décès, le patrimoine du défunt est en indivision, s’il y a plusieurs héritiers.
Cela signifie que les biens de la succession appartiennent indistinctement à tous les héritiers sans que leurs parts respectives ne soient matériellement individualisées. Les biens composant l’indivision sont appelés biens indivis. Chaque membre de l’indivision, appelé indivisaire ou cohéritier se voit alors attribuer une part sous forme de quote-part. L’indivision n’est qu’une étape transitoire dans le règlement de la succession. Elle s’achève avec le partage du patrimoine ».
L’indivision commencera à l’ouverture de la succession. La succession, selon l’article 720 du Code civil : « Les successions s’ouvrent par la mort, au dernier domicile du défunt ». Cette situation transitoire ne prendra fin qu’au moment du partage entre les héritiers et légataires.
Une indivision correspond donc à une situation dans laquelle se trouvent des héritiers qui deviennent collectivement propriétaires d’un patrimoine. Néanmoins, devenir propriétaire d’un tel bien peut apparaître comme dommageable pour certains héritiers. En effet, l’indivision n’est pas quelque chose de toujours aisé à gérer. De nombreux conflits peuvent éclater en co-indivisaires et rendre la succession éminemment complexe.
Il peut exister plusieurs types d’indivisions : due au mariage, conventionnelle, ou bien successorale. Lorsque celle-ci est successorale, elle peut poser davantage de problèmes, car le nombre d’indivisaires peut être considérable. De plus, cette situation peut raviver les peines liées au décès.
Il faut cependant noter qu’il est toujours possible de sortir d’une indivision. Il n’est ainsi jamais obligatoire de demeurer en indivision et subir des effets qui peuvent être notoires.
En effet, l’article 815 du Code civil dispose : « Nul ne peut être contraint à demeurer dans l’indivision et le partage peut toujours être provoqué, à moins qu’il n’y ait été sursis par jugement ou convention ». La question de la fin d’une indivision se retrouve souvent au niveau successoral, car chacun des héritiers se trouvera souvent propriétaire indivisaire de certains biens du de cujus qu’ elle ne voudra pas forcément conserver.
Plusieurs solutions légales existent pour sortir d’une indivision. La rupture de l’indivision pourra ainsi se faire de façon amiable ou par voie judiciaire. Un partage forcé peut également avoir lieu. Cette dernière solution ne doit pas être premièrement recommandée. Il s’agit en effet d’une situation complexe qui pourra créer d’autres problèmes, notamment au sein de l’enceinte familiale. Dans un cadre purement successoral, la rupture de l’indivision aura lieu avec le partage.
Plusieurs solutions seront ainsi successivement présentées : d’abord la possibilité de vendre ses droits, puis la possibilité de vendre un bien, le partage amiable et enfin la voie de sortie judiciaire.
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I. Sortir de l’indivision en vendant ses droits
La sortie de l’indivision peut survenir à la suite d’une vente de ses droits dans l’indivision. Celle-ci pourra se faire soit auprès des autres héritiers, soit auprès d’un tiers.
Vente à un autre héritier. Cette opération doit être effectuée auprès d’un notaire. Dans le cas où l’ensemble des parties sont d’accord sur le montant des parts et les obligations essentielles, la transaction est plutôt simple.
Dans le cas contraire, des litiges peuvent apparaître et un expert pourra être chargé de l’évaluation du ou des biens si cela paraît indispensable. L’expert peut être proposé par les avocats ou par le notaire, afin d’éviter les conflits.
Vente à un tiers. Afin de sortir d’une indivision, il est possible de vendre ses droits à un tiers. Cette possibilité donne lieu à un droit de préemption par les autres héritiers. Ceux-ci disposent ainsi d’un droit de préférence permettant de conserver les biens dans un impératif d’unité familiale.
L’article 815-14 du Code civil dispose ainsi : « L’indivisaire qui entend céder, à titre onéreux, à une personne étrangère à l’indivision, tout ou partie de ses droits dans les biens indivis ou dans un ou plusieurs de ces biens est tenu de notifier par acte extrajudiciaire aux autres indivisaires le prix et les conditions de la cession projetée ainsi que les nom, domicile et profession de la personne qui se propose d’acquérir.
Tout indivisaire peut, dans le délai d’un mois qui suit cette notification, faire connaître au cédant, par acte extrajudiciaire, qu’il exerce un droit de préemption aux prix et conditions qui lui ont été notifiés.
En cas de préemption, celui qui l’exerce dispose pour la réalisation de l’acte de vente d’un délai de deux mois à compter de la date d’envoi de sa réponse au vendeur. Passé ce délai, sa déclaration de préemption est nulle de plein droit, quinze jours après une mise en demeure restée sans effet, et sans préjudice des dommages-intérêts qui peuvent lui être demandés par le vendeur.
Si plusieurs indivisaires exercent leur droit de préemption, ils sont réputés, sauf convention contraire, acquérir ensemble la portion mise en vente en proportion de leur part respective dans l’indivision.
Lorsque des délais de paiement ont été consentis par le cédant, l’article 828 est applicable ». Avant d’entamer une telle vente, il est nécessaire de notifier par voie d’huissier les autres héritiers de la vente projetée, avec le nom de l’acheteur, son domicile et sa profession.
Il faut alors noter qu’à ce moment, un héritier peut alors s’opposer à cette vente et racheter les parts en question. Ce droit de préemption des autres héritiers est la conséquence de la volonté par le législateur de permettre la conservation des biens dans la famille.
II. Sortir de l’indivision en vendant le bien, seul ou à plusieurs
Le Code civil à l’article 815-5-1 prévoit la possibilité de sortir d’une indivision en procédant à la vente du bien indivis. Cet article dispose ainsi : « Sauf en cas de démembrement de la propriété du bien ou si l’un des indivisaires se trouve dans l’un des cas prévus à l’article 836, l’aliénation d’un bien indivis peut être autorisée par le tribunal judiciaire, à la demande de l’un ou des indivisaires titulaires d’au moins deux tiers des droits indivis, suivant les conditions et modalités définies aux alinéas suivants.
Le ou les indivisaires titulaires d’au moins deux tiers des droits indivis expriment devant un notaire, à cette majorité, leur intention de procéder à l’aliénation du bien indivis. Dans le délai d’un mois suivant son recueil, le notaire fait signifier cette intention aux autres indivisaires.
Si l’un ou plusieurs des indivisaires s’opposent à l’aliénation du bien indivis ou ne se manifestent pas dans un délai de trois mois à compter de la signification, le notaire le constate par procès-verbal.
Dans ce cas, le tribunal judiciaire peut autoriser l’aliénation du bien indivis si celle-ci ne porte pas une atteinte excessive aux droits des autres indivisaires. Cette aliénation s’effectue par licitation. Les sommes qui en sont retirées ne peuvent faire l’objet d’un remploi sauf pour payer les dettes et charges de l’indivision.
L’aliénation effectuée dans les conditions fixées par l’autorisation du tribunal judiciaire est opposable à l’indivisaire dont le consentement a fait défaut, sauf si l’intention d’aliéner le bien du ou des indivisaires titulaires d’au moins deux tiers des droits indivis ne lui avait pas été signifiée selon les modalités prévues au troisième alinéa ».
Pour ce faire, il est donc nécessaire de détenir au moins 2/3 des parts de l’indivision. Cette majorité peut être atteinte par une seule personne ou par plusieurs co-indivisaires. Il faudra également une autorisation du Tribunal de justice et l’intervention d’un notaire.
Pour que l’aliénation soit valable, il faut ainsi que celle-ci ne porte pas une atteinte excessive aux droits des autres indivisaires, autres héritiers dans le cadre d’une indivision successorale.
III. Sortir de l’indivision en réalisant un partage amiable
Prévu à l’article 835 du Code civil, le partage amiable est une solution permettant d’obtenir le plus facilement, une sortie de l’indivision. Il faudra, à cet effet, un accord des autres co-indivisaires.
Cet article dispose ainsi : « Si tous les indivisaires sont présents et capables, le partage peut intervenir dans la forme et selon les modalités choisies par les parties. Lorsque l’indivision porte sur des biens soumis à la publicité foncière, l’acte de partage est passé par acte notarié ».
Cette solution doit être privilégiée, car elle privilégie le consensus sur le conflit. Elle permet une meilleure acceptation par les autres co-indivisaires.
IV. Sortir de l’indivision par voie judiciaire
La sortie d’une indivision peut prendre la forme d’une autorisation judiciaire. Celle-ci peut prendre la forme d’une représentation judiciaire en matière d’indivision.
C’est ce que prévoit l’article 815-4 du Code civil : « Si l’un des indivisaires se trouve hors d’état de manifester sa volonté, un autre peut se faire habiliter par justice à le représenter, d’une manière générale ou pour certains actes particuliers, les conditions et l’étendue de cette représentation étant fixées par le juge ».
Dans ce cas, un autre indivisaire peut saisir le Tribunal de justice (TJ) pour être habilité à représenter celui qui est hors d’état de manifester sa volonté. Pour cela, le TJ doit autoriser cette représentation dans l’étendue qui lui semble souhaitable (un ou plusieurs actes particuliers). L’un des indivisaires va ainsi donner son consentement à la place de celui qui est empêché. L’indivisaire empêché aura néanmoins la qualité de partie à l’acte.
Des autorisations judiciaires permettent également de se dispenser du consentement d’un indivisaire, sans que celui-ci ne soit représenté. Cela rend la sortie plus facile. Ces situations sont régies par les articles 815-5 à 815-7 du Code civil.
L’article 815-5 du Code civil prévoit ainsi : « Un indivisaire peut être autorisé par justice à passer seul un acte pour lequel le consentement d’un co-indivisaire serait nécessaire, si le refus de celui-ci met en péril l’intérêt commun. Le juge ne peut, à la demande d’un nu-propriétaire, ordonner la vente de la pleine propriété d’un bien grevé d’usufruit contre la volonté de l’usufruitier.
L’acte passé dans les conditions fixées par l’autorisation de justice est opposable à l’indivisaire dont le consentement a fait défaut ». L’article 815-7 du Code civil prévoit, lui : « Le président du tribunal peut aussi interdire le déplacement des meubles corporels sauf à spécifier ceux dont il attribue l’usage personnel à l’un ou à l’autre des ayants droit, à charge pour ceux-ci de donner caution s’il l’estime nécessaire ».
Il existe donc une possibilité de demander au juge, l’autorisation de conclure un acte sans le consentement d’un indivisaire si celui-ci met en péril l’intérêt commun dans son refus ou dans son silence. L’autre cas de figure est lorsque le TJ ordonne une mesure urgente requise par l’intérêt commun.
Dans ce cas, il ne sera pas nécessaire que l’un des indivisaires s’y oppose, il y a juste une urgence à agir pour préserver les biens indivis. Il peut s’agir d’interdire le déplacement de certains biens (815-7 du Code Civil), de faire nommer un séquestre (815-7 du Code Civil) qui permet la vente d’un bien indivis en cas de mesure urgente.
Enfin, la sortie d’une indivision est possible par licitation. La licitation (vente aux enchères du bien et partage par la vente des droits).
L’article 1377 du Code civil dispose ainsi : « Le tribunal ordonne, dans les conditions qu’il détermine, la vente par adjudication des biens qui ne peuvent être facilement partagés ou attribués.
La vente est faite, pour les immeubles, selon les règles prévues aux articles 1271 à 1281 et pour les meubles, dans les formes prévues aux articles R. 221-33 à R. 221-38 et R. 221-39 du code des procédures civiles d’exécution ». L’article 1378 poursuit : « Si tous les indivisaires sont capables et présents ou représentés, ils peuvent décider à l’unanimité que l’adjudication se déroulera entre eux. À défaut, les tiers à l’indivision y sont toujours admis ».
V. Compétence judiciaire
Seul le Tribunal de justice du lieu d’ouverture de la succession pourra être saisi par l’assignation d’un héritier avec représentation d’un avocat obligatoire dans le cadre d’une procédure pour rupture d’indivision.
L’article 841 du Code civil prévoit ainsi : « Le tribunal du lieu d’ouverture de la succession est exclusivement compétent pour connaître de l’action en partage et des contestations qui s’élèvent soit à l’occasion du maintien de l’indivision soit au cours des opérations de partage.
Il ordonne les licitations et statue sur les demandes relatives à la garantie des lots entre les copartageants et sur celles en nullité de partage ou en complément de part ». Un notaire sera alors chargé de suivre les opérations de liquidation et de partage, d’établir un acte de partage ou un procès-verbal de difficultés en cas de contestation, relatant le résultat des opérations dans un état liquidatif soumis à homologation du tribunal.
SOURCES :
DÉFINITION DE L’INDIVISION – ÉCONOMIE.GOUV : https://www.economie.gouv.fr/particuliers/heritage-succession-indivision
ARTICLE 720 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006430690/
ARTICLE 815 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006432351/
ARTICLE 835 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006432680/
ARTICLE 815-5 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006433219/
ARTICLE 815-7 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006432406
ARTICLES 1377 ET 1378 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/id/LEGISCTA000006181714/
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