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Comment prouver un abus de faiblesse ?

L’abus de faiblesse se caractérise par le fait de profiter de la vulnérabilité de quelqu’un pour lui faire faire quelque chose qu’il ou elle n’aurait pas fait autrement. L’auteur d’un abus de faiblesse peut aussi exercer des pressions graves et répétées pour manipuler la victime afin d’obtenir d’elle ce qu’il souhaite.  

L’abus de faiblesse engendre donc un vice du consentement. La personne victime d’un abus de faiblesses peut alors porter plainte contre l’auteur des faits afin de le condamner et recevoir des dommages-intérêts.

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Il s’agit d’un délit qui est caractérisé à l’article 223-15-2 du Code pénal à titre principal. Cet article prévoit également une sanction de 3 ans de prison et de 375 000 € d’amende à destination de la personne qui profitera de cet abus de faiblesse. Cet article du Code pénal incrimine l’abus frauduleux de l’état d’ignorance ou de situation de faiblesse de la victime. À noter que l’abus de faiblesse est puni tant sur le plan pénal que civil.

À titre complémentaire, le coupable risque une peine complémentaire définie par l’article 223-15-3 du Code pénal, notamment l’interdiction des droits civiques, civils et de famille suivant les modalités prévues par l’article 131-26 du Code pénal.

De plus, l’interdiction prévue par l’article 131-27 du même code, d’exercer une fonction publique ou d’exercer l’activité professionnelle ou sociale dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise pour une durée de 5 ans au plus.

L’article 223-15-2 du Code pénal établit des circonstances aggravantes. Notamment lorsque l’infraction est commise par le dirigeant de fait ou de droit d’un groupement qui poursuit des activités ayant pour but ou pour effet de créer, de maintenir ou d’exploiter la sujétion psychologique ou physique des personnes qui participent à ces activités, les peines sont portées à 5 ans d’emprisonnement et à 750 000 euros d’amende.

La loi n° 2023-22 du 24 janvier 2023 a complété l’article 223-15-2 du Code pénal par un alinéa 3 qui dispose que lorsque l’infraction est commise en bande organisée par les membres d’un groupement qui poursuit des activités ayant pour but ou pour effet de créer, de maintenir ou d’exploiter la sujétion psychologique ou physique des personnes qui participent à ces activités, les peines sont portées à sept ans d’emprisonnement et à un million d’euros d’amende.

De plus, les personnes morales déclarées responsables pénalement risquent au titre de l’article 223-15-4 du Code pénal outre une amende, les peines prévues à l’article 131-39 du Code pénal.

La complice de l’abus de faiblesse est elle aussi punissable et le complice risque la même peine que l’auteur des faits.

À retenir que l’abus de faiblesse doit se différencier de l’abus de confiance. En effet, l’abus de confiance consiste à détourner les biens ou les fonds de la victime qui lui a accordé sa confiance. Tandis que l’abus de faiblesse consiste, comme vu précédemment, à profiter de la vulnérabilité de la personne pour la conduire à faire ou s’abstenir de faire un acte pouvant lui causer un préjudice grave.

Un arrêt en date du 26 septembre 2002 retient que le délit d’abus de faiblesse au préjudice d’une personne vulnérable n’entre pas dans l’énumération limitative de l’article 706-14 du Code de procédure pénale.

LES PERSONNES TOUCHÉES PAR LES ABUS DE FAIBLESSE

La majorité des personnes touchées par les abus de faiblesse sont des personnes présentant une certaine vulnérabilité. Il est ainsi possible de distinguer trois principales catégories de personnes touchées par de tels abus : les mineurs, les personnes en état de sujétion psychologique et physique et les personnes souffrant d’une vulnérabilité particulière.

PROUVER UN ABUS DE FAIBLESSE

Prouver un abus de faiblesse nécessite la réunion de plusieurs éléments. On distingue, d’une part, un élément matériel et, d’autre part, un élément intentionnel. Auxquels peut s’ajouter un élément moral.

PROUVER UN ABUS DE FAIBLESSE AVEC UN ÉLÉMENT MATÉRIEL

Tout d’abord, pour pouvoir prouver un abus de faiblesse, il est nécessaire de démontrer la présence d’un élément matériel. Celui-ci constitue en fait la démonstration de la vulnérabilité de la personne.

La victime d’un abus de faiblesse doit se trouver dans un état d’ignorance ou une situation de faiblesse, comme énumérée précédemment par l’article 223-15-2 du Code pénal.

L’élément matériel se caractérise par un acte répréhensible. L’acte est le fait d’abuser frauduleusement de la situation de la victime pour l’inciter à un acte ou à une abstention qui lui cause un préjudice.

PROUVER UN ABUS DE FAIBLESSE AVEC UN ÉLÉMENT INTENTIONNEL

Prouver un abus de faiblesse nécessite également la présence d’un élément intentionnel. Il s’agit ici de démontrer que la personne accusée voulait abuser de la victime en ayant conscience de son état. En d’autres termes il est ici nécessaire de démontrer le préjudice.

Il faut ici souligner que le préjudice peut ne pas directement toucher la victime : c’est le cas pour un testament qui prend effet au moment du décès du légataire. Cet exemple du testament a été établi par la Cour de cassation dans son arrêt Cass. Crim., 15 novembre 2015, n° 04/86 051.

Un arrêt rendu par la chambre criminelle de la Cour de cassation en date du 19 février 2014 retient que la Cour d’appel a caractérisé les éléments matériel et intentionnel du délit d’abus de faiblesse d’un chef de service en psychiatrie sur sa patiente atteinte de troubles bipolaires. L’acte auquel la victime a été conduite est considéré tant matériel que juridique depuis cet arrêt du 19 février 2014.

L’acte répréhensible doit également être de nature à causer un préjudice grave à la victime sans la nécessité que ce préjudice soit réalisé. (Cass. Crim. 12 janv. 2000).

PROUVER UN ABUS DE FAIBLESSE AVEC UN ÉLÉMENT MORAL

L’article 121-3 du Code pénal dispose que l’infraction doit être intentionnelle. Le délit d’abus frauduleux de l’état d’ignorance ou de la situation de faiblesse est une infraction intentionnelle. Il faut démontrer que l’auteur a eu connaissance de l’état d’ignorance ou de la situation de faiblesse de la victime.

L’auteur doit également avoir la volonté d’exploiter cet état d’ignorance ou situation de faiblesse de la victime pour y soustraire un acte ou une abstention dont il connaissait le caractère d’un préjudice grave.

Constitue également un acte préjudiciable le fait, pour une personne vulnérable, de disposer de ses biens par testament en faveur de la personne qui l’a obligée à cette disposition retenue par un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation en date du 15 novembre 2005.

En effet, l’abus de faiblesse doit s’apprécier seulement au regard de l’état de particulière vulnérabilité au moment où est accompli l’acte gravement préjudiciable à la personne d’après un arrêt en date du 26 mai 2009. 08-85-601 (5).

La Cour d’appel de Montpellier, dans un arrêt du 9 décembre 2022, considère que le donateur était en possession de ses facultés psychiques et a consenti librement la donation de ses véhicules, dont il n’avait plus l’utilité eu égard aux pathologies qui l’affaiblissaient physiquement, au bénéfice des donataires qu’il avait la volonté déterminée de gratifier en raison de leurs liens de proximité et d’affection.

La cour constate qu’aucun abus de faiblesse frauduleux n’a été commis par les donataires sur le donateur tel que l’invoquent les intimés sans en rapporter la preuve. Elle décide par conséquent d’infirmer la décision du premier juge qui a prononcé la nullité des donations consenties par le donateur.

DÉNONCER UN ABUS DE FAIBLESSE

Prouver l’abus de faiblesse est une étape importante, mais il s’agit ensuite de le dénoncer. L’inconvénient de cette procédure réside dans le fait que c’est la victime qui doit porter plainte ; ce qui peut s’avérer particulièrement difficile dans la mesure où celle-ci n’est pas nécessairement consciente d’être abusée. Cette procédure est d’autant plus délicate qu’un délai de prescription est établi à trois ans. Le point de départ de ce délai est celui du moment du prélèvement du patrimoine à la victime.

En revanche, il est possible de dénoncer un abus de faiblesse, et donc de porter plainte, si la personne souffre de cet abus de faiblesse et est directement touchée par celui-ci, et même si la victime de l’abus de faiblesse ne s’estime pas lésée : c’est l’exemple de l’affaire Bettencourt. Cette possibilité a donc été soulignée par la Cour de cassation dans son arrêt Cass. Crim., 31 janvier 2012, n° 11-85-464 (6).

Une personne victime d’un abus de faiblesse dispose d’un délai de 6 ans pour porter plainte à compter de la découverte des actes délictueux, en cas d’actes répétés, c’est le dernier acte commis qui fera établir le délai, d’après l’article 8 du Code de procédure pénale.

Ainsi, nous vous avons livré les clés afin de prouver un abus de faiblesse. Toutefois, la procédure de dénonciation de celui-ci peut être complexe. C’est pourquoi vous faire accompagner par un avocat apparaît certainement comme une nécessité.

SOURCES :
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007044677/
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007071078/
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000028641711/
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007069543/
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000020767226/
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000025293872/
https://www.lemonde.fr/affaire-bettencourt/
https://www.lepetitjuriste.fr/labus-frauduleux-de-letat-dignorance-de-situation-de-faiblesse-2/#:~:text=La%20jurisprudence%20pr%C3%A9cise%20toujours%20que%20%C2%AB%20l%E2%80%99abus%20de,les%20actes%20qui%20lui%20%C3%A9taient%20gravement%20pr%C3%A9judiciables%20%C2%BB.
https://www.courdecassation.fr/publications_26/rapport_annuel_36/rapport_2009_3408/etude_personnes_3411/criminelle_cour_3422/jurisprudence_chambre_3439/comportement_auteur_ses_consequences_15358.html
https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F35140
https://www.info-juri.fr/porter-plainte-contre-abus-faiblesse-recours/
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000047046768/#JORFARTI000047046800https://www.labase-lextenso.fr/jurisprudence/CAMONTPELLIER-09122022-22_00459?em=Cour%20d%27appel%20de%20montpellier%2C%201re%20chambre%20de%20la%20famille%2C%209%20d%C3%A9cembre%202022%2C%20%2022%2F00459