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Quels sont les droits des enfants adoptés dans une succession ?

Une requête pour une adoption doit préciser si c’est une adoption plénière ou une adoption simple, ces deux formes d’adoption donnent des droits différents en cas de succession.

La filiation par adoption repose sur un acte de volonté et non sur une réalité biologique. Elle est créée par l’effet d’un jugement et est soumise à des conditions de fond et de forme décrites aux articles 343 à 370-5 du Code civil et aux articles 1165 à 1178-1 du Code de procédure civile. Elle se caractérise par une intervention administrative confiée aux services de l’aide sociale à l’enfance, qui délivre les agréments à l’adoption.

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L’adoption est « la création, par jugement, d’un lien de filiation d’origine exclusivement volontaire, entre deux personnes qui, normalement, sont physiologiquement étrangères ».

Depuis la loi n° 66-500 du 11 juillet 1966, le droit français en connaît deux formes : l’adoption plénière et l’adoption simple. La première institue un lien de filiation qui se substitue au lien de filiation préexistant s’il en existait un. Cette forme d’adoption est, en principe, irrévocable et entraîne une rupture avec la famille d’origine. La seconde crée une autre filiation, qui se superpose à celle préexistante. Elle est révocable et l’adopté reste attaché à sa famille d’origine et y conserve, en principe, tous ses droits.

De plus, pour donner une famille à un enfant qui n’en a pas, la réalité de l’adoption nous livre parfois un sentiment étrangement inverse. Mais l’adoption est aussi une institution tournée vers la protection de l’enfance. De ce conflit permanent entre intérêt des enfants et désirs des parents, surgissent des débats sur la nécessité de favoriser l’adoption simple au détriment du modèle de référence que constitue l’adoption plénière.

Selon l’article 1166 du Code de procédure civile, la demande aux fins d’adoption est portée devant le (Décr. no 2019-966 du 18 sept. 2019, art. 8, en vigueur le 1er janv. 2020) «tribunal judiciaire [ancienne rédaction: tribunal de grande instance]».

Le tribunal compétent est :

— le tribunal du lieu où demeure le requérant lorsque celui-ci demeure en France ;

— le tribunal du lieu où demeure la personne dont l’adoption est demandée lorsque le requérant demeure à l’étranger ;

— le tribunal choisi en France par le requérant lorsque celui-ci et la personne dont l’adoption est demandée demeurent à l’étranger.

— S’agissant des TGI compétents pour connaître des actions aux fins d’adoption ainsi que des actions aux fins de reconnaissance des jugements d’adoption rendus à l’étranger, lorsque l’enfant résidant habituellement à l’étranger a été, est ou doit être déplacé vers la France, V. COJ, art. D. 211-10-1.

En outre, en matière de droit des successions, les enfants adoptés ont des droits. Partant de ce constat, lorsque le défunt a eu des enfants et en a adopté un autre, que se passe-t-il lorsque les enfants naturels contestent la succession et remettent en cause la part de l’héritage revenant à l’adopté ?

Que faut-il entendre par adoption simple et adoption plénière ? Quels sont les droits conférés par le droit des successions à l’enfant adopté simplement à l’enfant adopté plénièrement ?

 

I. Adoption plénière et adoption simple

A. Adoption plénière

L’adoption est un acte reposant sur la volonté. L’adoption plénière provoque une rupture de tout lien juridique entre la famille d’origine et l’enfant adopté. L’adopté a, dans la famille de l’adoptant, les mêmes droits et les mêmes obligations qu’un enfant dont la filiation est légalement établie.

Les adoptants doivent, avant toute chose, obtenir un agrément délivré par l’aide sociale à l’enfance du conseil général de leur domicile à l’issue d’une procédure dont les modalités sont fixées aux articles L. 225-2 et suivants et R. 225-1 et suivants du Code de l’action sociale et des familles. Les assistants familiaux en sont toutefois dispensés (CASF, art. L. 225-2), tout comme celui qui souhaite adopter l’enfant de son conjoint.

  • Conditions tenant à l’adoptant

L’adoption ne peut être demandée que par un couple marié de sexe différent ou non ou une personne seule (Code civil, articles 343, 343-1 et 346, al. 1er).

L’adoption peut être demandée par deux époux mariés, à condition qu’ils ne soient pas séparés de corps, deux partenaires liés par un pacte civil de solidarité ou deux concubins. Les adoptants doivent être en mesure d’apporter la preuve d’une communauté de vie d’au moins un an ou être âgés l’un et l’autre de plus de vingt-six ans (Code civil, article 343, modifié par l’ordonnance n°2022-1292 du 5 octobre 2022) (6).

Si l’adoption est demandée par une personne seule, il faut qu’elle soit également âgée de plus de vingt-six ans. Elle peut être célibataire ou mariée. Lorsque la personne est mariée, non séparée de corps ou liée par un pacte civil de solidarité, le consentement de son conjoint ou partenaire est requis, à moins que celui-ci ne soit dans l’impossibilité de manifester sa volonté (Code civil, article 343-1, modifié par la loi n° 2022-219 du 21 février 2022) (7).

La condition d’âge n’est pas requise en cas d’adoption de l’enfant du conjoint, du partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou du concubin (Code civil, article 343-2, modifié par la loi n°2022-219 du 21 février 2022).

En plus de la condition d’âge de l’adoptant, le législateur pose également une condition liée à la différence d’âge entre l’adoptant et l’adopté. L’adoptant doit avoir quinze ans de plus que l’adopté. Cette différence est réduite à dix ans lorsque l’adoption concerne les enfants du conjoint de l’adoptant.

Toutefois, le tribunal peut, s’il y a de justes motifs, prononcer l’adoption lorsque la différence d’âge est inférieure à celle prévue par l’article 347 du Code civil, modifié par la loi n° 2022-219 du 21 février 2022.

  • Conditions relatives à l’adopté

Tout enfant n’est pas adoptable ; l’article 344 du Code civil (modifié par la loi n° 2022-219 du 21 février 2022) dresse donc la liste de ceux pouvant être adoptés :

« 1° Les mineurs pour lesquels les parents ou le conseil de famille ont valablement consenti à l’adoption ;

2° Les pupilles de l’Etat pour lesquels le conseil de famille des pupilles de l’Etat a consenti à l’adoption ;

3° Les enfants judiciairement déclarés délaissés dans les conditions prévues aux articles 381-1 et 381-2 ;

4° Les majeurs, en la forme simple et en la forme plénière dans les cas prévus à l’article 345 ».

Seul l’enfant qui n’a plus de lien avec sa famille d’origine, et pour lequel les parents consentent à l’adoption ou qui n’ont plus de droit sur l’enfant, peut être adopté.

Il faut en principe, afin d’adopter un enfant de façon plénière, que l’enfant soit âgé de moins de quinze ans et qu’il ait été accueilli au foyer de sa famille adoptive depuis au moins six mois (Code civil, article 345, al. 1er).

Toutefois, si l’enfant a plus de quinze ans, l’adoption plénière peut également être demandée, si les conditions en sont remplies, pendant la minorité de l’enfant et dans les trois ans suivant sa majorité :

« 1° Lorsque l’enfant a été accueilli avant ses quinze ans par des personnes qui ne remplissaient pas les conditions légales pour adopter ;

2° Lorsque l’enfant a fait l’objet d’une adoption simple avant ses quinze ans ;

3° Dans les cas prévus aux 2° et 3° de l’article 344 ;

4° Dans les cas prévus à l’article 370-1-3 ».

Dans tous les cas, si l’enfant a plus de treize ans, son consentement est requis (Code civil, article 345, 348-3). Cette disposition a été abrogée par l’ordonnance no 2022-1292 du 5 octobre 2022, à compter du 1er janvier 2023.

  • Consentement à l’adoption plénière

L’existence d’un lien de filiation n’est pas nécessairement un obstacle à l’adoption lorsque le ou les parents ont conservé l’autorité parentale, pourvu qu’ils donnent leur consentement (Code civil, article 348). À défaut, lorsque les parents de l’enfant sont décédés, dans l’impossibilité de manifester leur volonté ou s’ils ont perdu leurs droits d’autorité parentale, le conseil de famille donnera son consentement, après avis de la personne qui prend soin de l’enfant (Code civil, article 348-2, modifié par l’ordonnance n°2022-1292 du 5 octobre 2022).

En l’absence de lien de filiation établi, si l’enfant est un pupille de l’État ou s’il a été déclaré abandonné (Code civil, articles 381-1 et 381-2), le représentant légal de l’enfant doit consentir à l’adoption.

Le consentement est recueilli par le service de l’aide sociale à l’enfance si l’enfant lui est confié, devant un notaire français ou étranger ou devant les agents diplomatiques ou consulaires français (Code civil, article 348-3). Le consentement à l’adoption des enfants de moins de deux ans n’est valable que si l’enfant a été effectivement remis au service de l’aide sociale à l’enfance, sauf le cas où il existe un lien de parenté ou d’alliance jusqu’au sixième degré inclus entre l’adoptant et l’adopté ou dans les cas d’adoption de l’enfant du conjoint, du partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou du concubin (Code civil, article 348-4, modifié par l’ordonnance n°2022-1292 du 5 octobre 2022).

Le consentement donné à l’adoption peut être rétracté dans les deux mois (Code civil, article 348-3 ; C. pr. civ., art. 1165).

Une fois le délai de deux mois passés, si le consentement des parents n’a pas été rétracté, les parents peuvent encore demander la restitution de l’enfant si celui-ci n’a pas été placé en vue de l’adoption (1). Si la personne qui a recueilli l’enfant s’y oppose, les parents peuvent saisir le juge qui appréciera l’intérêt de l’enfant et ordonnera ou non la restitution (Code civil, article 348-3).

Ces dispositions concernant la rétraction du consentement donnée à l’adoption et la restitution de l’enfant ont été abrogées par l’ordonnance no 2022-1292 du 5 octobre 2022, à compter du 1er janvier 2023.

Le consentement est également requis lorsque l’enfant vient de l’étranger. En ce cas, quelle que soit la loi applicable, l’adoption requiert le consentement du représentant légal de l’enfant, « dans les conditions définies au premier alinéa de l’article 348-3 » (modifié par la loi n° 2022-219 du 21 février 2022).

Le consentement doit être libre, obtenu sans aucune contrepartie, après la naissance de l’enfant et éclairé sur les conséquences de l’adoption plénière, sur le caractère complet et irrévocable de la rupture du lien de filiation préexistant (Code civil, article 370-3). Cette disposition a été supprimée par la loi n° 2022-219 du 21 février 2022.

B. Adoption simple

L’adoption simple est une adoption laissant subsister des liens juridiques entre l’enfant adopté et sa famille d’origine, tout en créant des liens de filiation entre l’adoptant et l’adopté.

  • Conditions relatives à l’adoptant

Les adoptants doivent obtenir un agrément délivré par l’aide sociale à l’enfance du conseil général de leur domicile (CASF, art. L. 225-2 s.).

L’article 361 du Code civil (modifié par l’ordonnance no 2022-1292 du 5 octobre 2022 et entre en vigueur le 1er janvier 2023)  dispose que le lien de parenté résultant de l’adoption simple s’étend aux enfants de l’adopté.

Cet article précise également que le mariage est interdit :

« 1° Entre l’adoptant, l’adopté et ses descendants ;

2° Entre l’adopté et le conjoint ou le partenaire lié par un pacte civil de solidarité de l’adoptant ; réciproquement entre l’adoptant et le conjoint ou le partenaire lié par un pacte civil de solidarité de l’adopté ;

3° Entre les enfants adoptifs du même adoptant ;

4° Entre l’adopté et les enfants de l’adoptant.

Néanmoins, les prohibitions au mariage portées aux 3° et 4° ci-dessus peuvent être levées par dispense du Président de la République, s’il y a des causes graves.

La prohibition au mariage portée au 2° ci-dessus peut être levée dans les mêmes conditions lorsque la personne qui a créé l’alliance ou qui était liée par un pacte civil de solidarité est décédée. »

L’adoption simple ne peut être demandée que par deux époux mariés, à condition qu’ils ne soient pas séparés de corps, deux partenaires liés par un pacte civil de solidarité, deux concubins ou une personne seule dans les mêmes conditions que l’adoption plénière (Code civil, articles 361, 343, 343-1 et 346, al. 1er). Toutefois, l’exigence d’un accueil depuis six mois au foyer de l’adoptant n’est pas requise. En cas d’adoption de l’enfant du conjoint, il suffit que l’adoptant ait dix ans de plus que l’adopté.

  • Conditions relatives à l’adopté

Les conditions relatives à l’enfant adopté de manière simple sont les mêmes que celles relatives à l’adopté faisant l’objet d’une adoption plénière ; il en va de même pour les modalités de consentement des parents ou du conseil de famille (Code civil, article 361 et 347 s).

L’article 360 a été modifié par l’ordonnance no 2022-1292 du 5 octobre 2022, entre vigueur le 1er janvier 2023 et a été ainsi rédigé : « L’adoption simple confère à l’adopté une filiation qui s’ajoute à sa filiation d’origine selon les modalités prévues au présent chapitre. L’adopté continue d’appartenir à sa famille d’origine et y conserve tous ses droits.

Les prohibitions au mariage prévues aux articles 161 à 164 s’appliquent entre l’adopté et sa famille d’origine ».

Par ailleurs, le placement de l’enfant n’est pas nécessaire et l’adoption simple de l’enfant de son conjoint est toujours possible.

  • Consentement à l’adoption simple

Les parents par le sang doivent donner leur consentement à l’adoption, tout en gardant la possibilité de se rétracter dans un délai de deux mois (Code civil, articles 361, 348 et 348-3).

Cette possibilité de se rétracter a été supprimée par l’ordonnance n°2022-1292 du 5 octobre 2022, à compter du 1er janvier 2023. Aucun consentement n’est requis lorsque l’enfant est majeur (2).

II. Les droits conférés par le droit des successions à l’enfant adopté et  simplement à l’enfant adopté plénièrement

A. Les droits successoraux de l’adopté plénier

L’enfant adopté plénièrement cesse définitivement d’appartenir à sa famille par le sang. L’enfant perd tous les droits qu’il avait avec sa famille d’origine et n’est plus tenu légalement d’aucun devoir. Ce qui ne lui interdit pas pour autant de rechercher sa famille biologique (CASF, art. L. 147-2, L. 147-3). Cependant, les prohibitions à mariage sont maintenues entre l’adopté et sa famille d’origine (Code civil, article 356).

L’enfant adopté est considéré comme le véritable enfant de l’adoptant. Le lien de filiation nouvellement établi confère à l’adopté tous les droits et les devoirs en découlant. Il a la qualité d’héritier réservataire, même à l’égard des ascendants.

« Si l’enfant est âgé de plus de treize ans, son consentement est requis », cela a été ajouté par la loi n° 2022-219 du 21 février 2022 qui a modifié cet article.

L’enfant prendra donc le nom de l’adoptant dans les conditions (3) prévues par l’article 357 du Code civil. L’adopté peut également se voir attribuer de nouveaux prénoms par le tribunal saisi de l’adoption (Code civil, articles 361 et 357).

Les transmissions qui interviennent entre adoptants et adoptés ayant fait l’objet d’une adoption plénière bénéficient de plein droit du régime fiscal des transmissions à titre gratuit en ligne directe.

A ce titre, en tant qu’héritier réservataire, il peut exercer toute contestation liée à l’atteinte de sa réserve héréditaire par l’action en réduction (4). C’est une action spéciale par laquelle un héritier réservataire peut obtenir des bénéficiaires de libéralités consenties par le de cujus au-delà de la quotité disponible la restitution de la part excédentaire de ces libéralités afin de rétablir la réserve héréditaire qui a été entamée.

B. Les droits successoraux de l’adopté adopté pleinièrement

L’adopté plénièrement acquiert des droits successoraux dans sa famille adoptive, sans avoir, toutefois, la qualité d’héritier réservataire à l’égard des ascendants de l’adoptant (Code civil, article 368).

Si l’adopté décède sans descendants ou conjoint survivant, sa famille adoptive et sa famille d’origine vont se partager par moitié la succession, une fois les biens reçus par elles repris (Code civil, article 366, modifié par l’ordonnance no 2022-1292 du 5 octobre 2022 et entre vigueur le 1er janvier 2023).

L’enfant adopté simplement supporte normalement des droits de mutation à taux plein (60 %), sauf exception : notamment lorsque l’adopté est mineur au moment du décès de l’adoptant ou lorsque l’adopté majeur au moment du décès de l’adoptant a, soit dans sa minorité et pendant cinq ans au moins, soit dans sa minorité et sa majorité et pendant dix ans au moins, reçu de l’adoptant des secours et des soins non interrompus au titre d’une prise en charge continue et principale.

À l’instar de l’enfant adopté plénièrement et en tant qu’héritier réservataire, il peut exercer toute contestation liée à l’atteinte de sa réserve héréditaire par l’action en réduction (5). C’est une action spéciale par laquelle un héritier réservataire peut obtenir des bénéficiaires de libéralités consenties par le de cujus au-delà de la quotité disponible la restitution de la part excédentaire de ces libéralités afin de rétablir la réserve héréditaire qui a été entamée.

SOURCES :

  1. https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000007046617&fastReqId=445253108&fastPos=1
  2. https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000027153333&fastReqId=2026407204&fastPos=1
  3. https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000007052340&fastReqId=1432160648&fastPos=1
  4. https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000018397380&fastReqId=771794141&fastPos=1
  5. https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000036635142&fastReqId=502626338&fastPos=1
  6. https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/LEGIARTI000046369144/2022-10-07/
  7. https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/LEGIARTI000045199336/2022-02-23/