L’influence du régime matrimonial sur le droit successoral

Le régime matrimonial du défunt joue aussi un rôle dans la détermination du patrimoine faisant ou non partie de la succession. En tant qu’héritiers, selon le régime matrimonial du conjoint ou compagnon survivant, les droits ne sont pas les mêmes.

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A. Régime de la communauté légale

Le régime le plus courant est celui de la communauté réduite aux acquêts, ayant vocation à s’appliquer d’office en l’absence de contrat de mariage. Seuls les revenus et les biens achetés en commun après le mariage appartiennent aux deux époux, tandis que chacun conserve ses biens propres acquis avant leur union, ainsi que ceux reçus par donation ou succession.

Dans le cas d’une communauté réduite aux acquêts aussi dite communauté légale, il convient de liquider le régime matrimonial, ce qui fera entrer dans la succession les biens propres du défunt et de la moitié des biens communs.

La première chambre civile dans un arrêt du 2 mai 2024 (Cass. 1re civ., 2 mai 2024, no 22-15238) rappelle que lors de la dissolution de la communauté, chacun des époux reprend les biens qui n’étaient pas entrés en communauté, s’ils existent en nature, ou les biens qui y ont été subrogés.

Elle rappelle que lorsque la juridiction est saisie d’une demande de reprise d’une somme d’argent, elle doit vérifier qu’elle existait encore et est restée propre à la date de la dissolution de la communauté. (3)

La succession est alors amenée à porter sur les biens propres de l’époux défunt, ainsi que la seconde moitié des biens communs du couple. L’époux survivant peut par conséquent prétendre à une partie de ces biens, en qualité d’héritier.

B. Régime de la communauté universelle

Le régime de la communauté universelle, quant à lui, entraîne la mise en commun de la totalité des biens des deux époux, qu’ils aient été acquis antérieurement ou durant le mariage.

Il y a alors création d’un patrimoine unique entre les conjoints(https://avocat-droit-succession-cahen.fr/avant-prevoir/peut-on-contester-le-dernier-mariage-de-ses-parents-pour-abus-de-faiblesse/)

Dans le cas d’un régime de la communauté universelle, il est nécessaire de savoir s’il y a ou non une clause d’attribution intégrale :

En l’absence d’une clause d’attribution intégrale.  Il n’y aura qu’un seul patrimoine et donc tous les biens acquis avant ou pendant le mariage sauf les biens dits « propres par nature » tels que les vêtements feront partie du patrimoine sans distinction entre les biens du défunt et ceux de l’époux survivant. Dans ce cas, l’époux survivant reste propriétaire de la moitié des biens et la succession se fera sur l’autre moitié.

En présence d’une clause d’attribution intégrale. Le conjoint survivant reçoit au décès l’intégralité du patrimoine et les héritiers recevront leur part lors du décès de ce conjoint survivant.

C’est un choix très courant que les époux mariés sous communauté (https://avocat-droit-succession-cahen.fr/?s=regime+matrimonial&x=0&y=0) universelle prévoient une clause d’attribution intégrale au survivant. Dans ce cas, la totalité du patrimoine du couple revient au conjoint survivant, sans que les autres héritiers ne puissent prétendre à une partie des biens. Il s’agit alors d’une exception notoire à la réserve héréditaire.

Ce n’est en revanche pas applicable en cas de remariage et en présence d’enfants d’un lit précèdent, puisque la réserve héréditaire doit être garantie à ces derniers.

La première chambre civile dans un arrêt du 15 janvier 2020 (Cass. 1re civ., 15 janv. 2020, n° 18-25030) a précisé qu’une clause d’attribution intégrale de la communauté stipulant « qu’en cas de dissolution de la communauté par le décès de l’un d’eux, tous les biens meubles ou immeubles qui composeront celle-ci et sans exception appartiendront en pleine propriété au conjoint survivant, sans que les héritiers vivants ou représentés puissent prétendre y avoir droit » exclut la reprise, par les héritiers du conjoint, des apports et capitaux tombés dans la communauté du chef de celui-ci. (2)

C. Régime de la séparation de biens

Ce régime matrimonial n’entraîne la constitution d’aucun patrimoine commun. Ainsi, les biens acquis par les époux avant et pendant leur vie commune demeurent la propriété personnelle de celui les ayant achetés.

Dans le cas d’un régime de séparation de biens, l’époux survivant reste propriétaire de ses biens personnels et de la part de biens indivis lui revenant.

La succession se fait donc sur tous les biens personnels du défunt ainsi que sur sa part de biens communs. On parle de biens indivis lorsque les deux époux ont un droit de propriété sur ces biens. Par exemple, si un bien immobilier est acheté en indivision alors chaque époux est propriétaire de la proportion fixée dans l’acte d’achat. Si l’acte d’achat ne prévoit rien, alors les époux sont réputés détenir la moitié chacun.

La première chambre civile dans un arrêt du 9 juin 2022 (Cass. 1re civ., 9 juin 2022, no 20-21277) a précisé l’apport en capital de fonds personnels, effectué par un époux en régime de séparation de biens, pour financer l’acquisition ou l’amélioration d’un bien indivis affecté à l’usage familial, ne participe pas de l’exécution de son obligation de contribuer aux charges du mariage, sauf convention contraire des époux. (4)

D. Régime du PACS

Le pacte civil de solidarité n’est pas un régime matrimonial, mais cette union civile concerne un très grand nombre de couples.

Depuis le 1e janvier 2007, les partenaires du PACS sont en principe soumis au régime de la séparation des biens. En revanche, contrairement aux époux dans le mariage, les partenaires de PACS ne sont pas héritiers l’un de l’autre.

Seul un testament peut permettre au partenaire survivant d’hériter du défunt. S’il n’y a pas de testament, alors il reviendra au partenaire seulement sa part de biens indivis et ses biens personnels. En l’absence de testament, les partenaires ne peuvent pas hériter l’un de l’autre.

Le partenaire pacsé dispose d’un droit de jouissance temporaire d’une année sur le logement servant de résidence principale. Il pourra donc continuer à occuper le logement et à utiliser les meubles qui le garnissent. Passé ce délai, ce droit cesse.

E. Les dispositions protectrices du conjoint

Le testament

Pour améliorer les droits du conjoint survivant, chaque époux peut rédiger un testament accordant à l’autre la plus grosse part autorisée par la loi soit la « quotité disponible spéciale entre époux » (¾ en usufruit + ¼ en pleine propriété).

En l’absence d’enfant, il est possible de léguer la totalité de son patrimoine à son partenaire pacsé puisqu’il n’y a pas d’héritier réservataire. Toutefois, les parents du défunt, s’ils sont encore en vie, peuvent demander à récupérer les biens donnés à leur enfant décédé dans la limite d’un quart de la succession par parent en vie. S’il a un ou des enfants, son legs est limité à la quotité disponible.

En revanche, le concubin n’étant pas héritier, il n’est pas intéressant de l’avantager via testament à cause de la fiscalité de 60%.

La donation au dernier vivant

La donation au dernier vivant permet au conjoint survivant de recevoir une part plus importante que celle que la loi lui accorde.

Contrairement aux autres donations(https://avocat-droit-succession-cahen.fr/avant-prevoir/quelle-difference-entre-donation-entre-epoux-et-donation-au-dernier-vivant),

la donation au dernier vivant ne prend pas effet immédiatement. Elle ne jouera qu’au décès du donateur et ne portera que sur les biens existants à ce jour.

Par cette donation, le conjoint peut recevoir tout l’usufruit de la succession et ce qu’il y ait des enfants issus de différentes unions ou non.

La société d’acquêts

L’adoption d’une clause de société d’acquêts dans un contrat de mariage constitue une solution sûre et efficace pour essayer de compenser la sévérité du régime séparatiste pour le conjoint le moins bien loti.

La clause peut porter sur des biens présents et/ou à venir. Si elle concerne la résidence principale et son mobilier, alors, il est possible de prévoir l’inclusion de ce bien dans la société d’acquêts avec clause d’attribution intégrale au survivant, en propriété ou en usufruit, avec une renonciation à l’action en retranchement des enfants.

La clause de préciput

La clause de préciput est prévue à l’article 1515 du Code civil. C’est une convention par laquelle les époux stipulent que le conjoint survivant a droit à certains biens prédéfinis ou à une somme d’argent dans le patrimoine commun.

La clause de préciput, insérée dans le contrat matrimonial, permet de léguer à son conjoint un ou plusieurs biens communs, choisis au préalable par les époux.

Cette clause peut être incluse dès la conclusion du mariage, mais également au cours de celui-ci. Le conjoint survivant peut ainsi prélever sur le patrimoine commun, et avant tout partage un ou plusieurs biens ou une somme d’argent.

D’un point de vue fiscal, cet avantage n’est pas considéré comme une donation, mais comme une convention matrimoniale. Le bien objet de la clause est donc uniquement soumis au droit de partage de 1% lors du prélèvement. Il peut être intéressant d’introduire cette clause pour les contrats d’assurance-vie souscrits après le mariage avec des biens communs.

Le tribunal judiciaire de Lille, dans une décision en date du 4 avril 2022 (TJ Lille, 4 avr. 2022, no 20/03477) a jugé qu’une cluse de préciput n’était pas soumise à l’application de droits de partage, en raison de sa nature civile. (5)

En revanche, le préciput ne peut s’appliquer dans le cadre d’un régime de séparation des biens.

L’avantage procuré au conjoint survivant échappe aux règles de la réduction pour atteinte à la réserve. Il est donc possible de dépasser la quotité disponible et de donner la résidence principale, les éventuels autres biens immobiliers ainsi que les comptes ouverts au nom du couple. Elle permet également, pour les époux n’ayant qu’un patrimoine commun, de léguer la totalité de ce patrimoine à son conjoint survivant.

En revanche, cette règle ne s’applique pas en présence d’enfants qui ne sont pas nés du mariage.

 

SOURCES :

 

  1. 1re civ., 15 janv. 2020, n° 18-25030 https://juricaf.org/arret/FRANCE-COURDECASSATION-20200115-1825030
  2. 1re civ., 2 mai 2024, no22-15238 https://www.courdecassation.fr/decision/66332ca1cbff4d0008b074b5
  3. 1re civ., 9 juin 2022, no20-21277 https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000045905066?init=true&isAdvancedResult=true&page=3&pageSize=10&query=%7B%28%40ALL%5Bt%22mariage%22%5D%29+%26%26+%28%40ALL%5Bt%22divorce%22%5D%29%7D&tab_selection=all&typeRecherche=date
  4. TJ Lille, 4 avr. 2022, no20/03477 https://www-labase-lextenso-fr.ezpum.scdi-montpellier.fr/gazette-du-palais/GPL442z0