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Le conjoint survivant est-il protégé ?

À défaut de testament, c’est la loi qui détermine la dévolution successorale, c’est-à-dire les personnes ayant vocation à recueillir la succession du défunt.

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Depuis la loi du 3 décembre 2001 (1), dans les successions « ab intestat », le législateur a renforcé la protection du conjoint survivant en le considérant désormais comme un héritier.

Dans la plupart des cas, le veuvage entraîne une diminution des ressources financières. Pour le conjoint survivant, la principale préoccupation est de maintenir son niveau de vie, en particulier son logement.

 

I. Qui à la qualité de conjoints survivants ?

L’article 732 du Code civil (2) dispose que « le conjoint survivant non divorcé est successible ».

En revanche, le partenaire pacsé et le concubin, n’étant pas mariés, ne sont pas considérés comme des conjoints survivants et ne peuvent donc pas bénéficier des mêmes droits. Pour qu’ils puissent prétendre à une part de la succession de leur partenaire ou concubin décédé, il faut que le défunt ait préalablement établi un testament en leur faveur.

La réforme du droit des successions et des libéralités du 23 juin 2006 (3) renforce à nouveau les droits du conjoint survivant. Les droits légaux de ce dernier dépendent de la composition de la famille et varient selon la qualité et le rang des héritiers appelés à la succession. Il bénéficie également de droits concernant le logement de la famille.

 

II. Les droits du conjoint survivant en concurrence avec d’autres héritiers

A. En présence de descendants

Les descendants sont des héritiers réservataires, ce qui signifie qu’ils ne peuvent pas être privés d’une partie de la succession du défunt. Le conjoint survivant, quant à lui, n’est pas un héritier réservataire, sauf en l’absence de descendants.

  • En présence d’un ou plusieurs enfants communs entre le défunt et son époux : Le conjoint survivant a droit à un quart en pleine propriété ou à la totalité en usufruit des biens existants au jour du décès comme le précise l’article 757 du Code civil (4). Il est libre de choisir l’option qu’il préfère et dispose d’un délai de trois mois à compter de la demande des autres héritiers pour se positionner. Passé ce délai, il sera réputé avoir opté pour l’usufruit selon l’article 758-3 du Code civil (5). Il sera également réputé avoir opté pour l’usufruit s’il décède avant de s’être positionné.
  • En présence d’un ou plusieurs enfants issus uniquement du défunt : Le conjoint survivant n’aura plus la faculté de choisir et n’aura droit qu’à un quart en pleine propriété de la succession.

B. En présence d’autres héritiers

Si le défunt n’a pas de descendants, il faut opérer une distinction selon la situation familiale.

  • En concurrence avec les ascendants privilégiés : Les ascendants privilégiés sont les parents du défunt. Si les deux parents sont en vie au jour du décès, ils ont chacun droit à un quart en pleine propriété de la succession, et le conjoint survivant recueillera l’autre moitié des biens existants. Si un seul parent est en vie, il recueillera un quart en pleine propriété de la succession et le conjoint survivant recueillera les trois quarts restants (article 757-1 alinéa 2 du Code civil (6). Si les parents du défunt sont décédés, le conjoint survivant recueillera la totalité de la succession, sous réserve de la présence de collatéraux privilégiés.
  • En concurrence avec les collatéraux privilégiés : Les collatéraux privilégiés sont les frères et sœurs du défunt et leurs enfants. Bien qu’ils ne bénéficient pas d’une réserve sur la succession, ils disposent d’un droit de retour sur la moitié des biens reçus des ascendants par succession et/ou donation, et qui se retrouvent en nature dans la succession (article 757-3 du Code civil (7). Par exemple, si le défunt a reçu par donation une maison et qu’il décède en laissant son conjoint et son frère, et que cette maison figure dans son patrimoine au jour du décès, le frère pourra hériter de la moitié de cette maison « de famille ». Ce droit de retour permet de conserver partiellement les « biens de famille » dans la famille, en évitant qu’ils reviennent intégralement au conjoint survivant. Dans tous les autres cas, le conjoint survivant recueillera l’intégralité de la succession.

 

III. Les droits spécifiques du conjoint survivant concernant le logement

La loi protège également le conjoint survivant en matière de logement familial, offrant deux régimes protecteurs : le droit temporaire au logement et le droit viager au logement.

A. Le droit temporaire au logement

Ce droit permet au conjoint survivant d’habiter pendant un an dans le logement principal occupé au moment du décès, sans avoir besoin d’en faire la demande.

  • Logement appartenant aux époux ou en totalité au défunt : Le conjoint survivant bénéficie de la jouissance gratuite du logement et de son mobilier pendant un an.
  • Logement appartenant en partie indivise au défunt ou loué par les époux : Les loyers ou l’indemnité d’occupation seront remboursés par la succession pendant un an (article 763 du Code civil (8). Ce droit temporaire s’applique également aux personnes pacsées et ne peut être révoqué par le défunt, car il s’agit d’un avantage matrimonial et non successoral.

B. Le droit viager au logement

Conformément à l’article 764 du Code civil (9), le conjoint survivant qui occupe à titre d’habitation principale un logement appartenant aux époux ou entièrement au défunt a un droit d’habitation et d’usage sur le mobilier jusqu’à son décès.

Ce droit peut être révoqué par testament notarié.

Pour bénéficier de ce droit, le conjoint survivant doit se manifester dans l’année suivant le décès. Un inventaire des meubles et un état de l’immeuble peuvent être dressés pour éviter les contestations ultérieures.

Le conjoint survivant peut louer le logement si celui-ci n’est plus adapté à ses besoins, afin de générer des ressources pour une nouvelle solution d’hébergement. La location ne peut pas être à usage commercial ou agricole.

Le droit viager au logement est déduit des droits légaux du conjoint survivant et ne les cumule pas. Par exemple, un conjoint survivant avec des enfants non communs n’a droit qu’à 1/4 en pleine propriété, et son droit d’usage viager sera déduit de cette part conformément à l’article 765 du Code civil (10). Si la valeur de ce droit est inférieure à sa part de succession, il a droit à un complément. Le conjoint survivant et les autres héritiers peuvent convertir ce droit en rente viagère ou en capital d’un commun accord.

C. Comment transmettre le logement par testament ou par une donation entre époux ?

Le défunt peut léguer l’intégralité de la propriété du logement par testament. Il peut ainsi décider d’utiliser sa quotité disponible pour attribuer sa part du logement à son conjoint survivant.

  • En présence d’un enfant, la loi réserve la moitié du patrimoine à cet enfant, et l’autre moitié constitue la quotité disponible.
  • Avec deux enfants, chaque enfant reçoit un tiers du patrimoine, laissant un tiers comme quotité disponible.
  • Avec trois enfants ou plus, la quotité disponible est d’un quart, les enfants se partageant les trois quarts restants à parts égales.

En ayant fait une donation entre époux ou donation au dernier vivant qui prend effet au décès, le défunt peut augmenter les droits de son conjoint survivant. Dans ce cas, l’époux défunt peut allouer à son conjoint une quotité spéciale entre époux.

Cette quotité permet trois options : l’usufruit de tous les biens de la succession, la quotité disponible ordinaire, ou le quart en pleine propriété et les trois quarts en usufruit.

Cependant, si le défunt laisse des enfants d’une première union, les droits du conjoint survivant sont limités. Pour éviter que ses droits ne concurrencent ceux des beaux-enfants par un démembrement de propriété, il ne peut recevoir que le quart de la propriété, conformément à la loi successorale. Dans ce contexte, les mécanismes du régime matrimonial peuvent être avantageusement activés.

D. Comment aménager le régime matrimonial pour transmettre le logement ?

De leur vivant, les époux peuvent prévoir des dispositions pour transférer la pleine propriété d’un bien au conjoint survivant. Par exemple, ils peuvent inclure une clause de préciput dans leur contrat de mariage. Cette clause permet au conjoint survivant de prélever un bien déterminé parmi les biens communs. Ce bien est alors considéré comme lui appartenant en propre et n’est pas inclus dans la succession du défunt. Cette méthode permet de contourner la limitation de la quotité disponible, car le transfert de propriété se fait dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial et non selon les règles successorales.

E. Le partenaire survivant d’un PACS peut-il conserver le domicile commun ?

Les droits du partenaire survivant concernant le domicile commun varient selon que le défunt était locataire ou propriétaire. Toutefois, dans tous les cas, le partenaire survivant bénéficie d’un droit de jouissance gratuite de la résidence principale, sauf si une disposition testamentaire en décide autrement.

  • Partenaire locataire 

 Si le partenaire décédé était locataire de la résidence commune, le statut du partenaire survivant par rapport au bail détermine les droits applicables.

  • Survivant cotitulaire du bail

Si le partenaire survivant est cotitulaire du bail, il a un droit exclusif sur le contrat de location, ce qui empêche les héritiers d’avoir des droits sur le domicile commun. Le partenaire survivant peut devenir cotitulaire soit au moment de la signature du bail, soit ultérieurement en demandant conjointement au propriétaire d’être ajouté au bail.

Le partenaire survivant bénéficie d’un droit de jouissance gratuite du logement pendant un an à partir de la date du décès. Durant cette période, la succession doit rembourser le loyer. Ces dispositions sont précisées aux articles 763 (11) et 515-6 du Code civil (12), sauf si le défunt a décidé autrement par testament. Le partenaire survivant peut aussi choisir de résilier le bail en donnant son préavis au propriétaire.

  • Survivant non-cotitulaire du bail

 Si le partenaire survivant n’est pas cotitulaire du bail, il a le droit de demander le transfert du bail de location à son nom après le décès du partenaire titulaire. Cependant, ce droit n’est pas exclusif. D’autres proches, tels que les descendants et les ascendants, peuvent également demander l’attribution du bail.

En cas de conflit, c’est le juge du tribunal du ressort géographique du logement qui tranchera.

  • Partenaire propriétaire

Lorsque le partenaire décédé était propriétaire du logement commun, deux situations peuvent se présenter : soit il était en copropriété avec le partenaire survivant, soit il était seul propriétaire. Les règles qui s’appliquent dépendent de la situation du partenaire survivant par rapport au titre de propriété de la résidence commune.

  • Partenaires copropriétaires

Si les partenaires de PACS étaient copropriétaires du logement, celui-ci tombe en indivision au décès de l’un d’entre eux, et le partenaire survivant devient copropriétaire avec les héritiers.

Cependant, pendant la première année suivant le décès, le partenaire survivant copropriétaire conserve son droit de jouissance gratuite à compter de la date du décès, y compris sur le mobilier présent dans le logement.

Le partenaire survivant peut également demander l’attribution préférentielle du bien, ce qui lui confère une priorité d’achat sur le logement. Toutefois, cette prérogative ne s’apparente pas à une donation dans le cadre du PACS, n’est pas systématique, et nécessite une disposition testamentaire du défunt. Le partenaire survivant doit formuler cette demande lors de la succession.

  • Défunt seul propriétaire

Si le défunt était seul propriétaire de la résidence principale, le partenaire survivant n’a pas de privilèges particuliers, mais il bénéficie du droit de jouissance gratuite de la résidence principale et du mobilier pour une année, à condition qu’il occupait le logement au moment du décès et que celui-ci soit bien la résidence principale.

 

SOURCES :

  1. https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000000582185/
  2. https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006430936
  3. https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000000637158
  4. https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006431087
  5. https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006431260
  6. https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006431219
  7. https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006431238
  8. https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006431112/2002-07-01
  9. https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006431120/2002-07-01
  10. https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006431122/2002-07-01
  11. https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006431112/2002-07-01
  12. https://www.legifrance.gouv.fr/loda/article_lc/LEGIARTI000006428547/2021-08-02