Indivision successorale : Comment en sortir rapidement ?
L’indivision successorale est une situation compliquée dans laquelle les proches d’une personne ainsi que ses héritiers se trouveront au moment de la disparition d’un membre de la famille.
L’indivision peut alors se définir comme une situation juridique temporaire dans laquelle plusieurs personnes exercent des droits de même nature sur un même bien ou sur une même masse de biens, sans pour autant que leurs parts respectives se trouvent matériellement divisées.
L’indivision successorale a pour particularité de se rencontrer au moment du décès d’une personne. C’est-à-dire qu’elle survient immédiatement et automatiquement après l’ouverture de la succession devant notaire. Dans cette hypothèse, le patrimoine du défunt sera automatiquement transmis en un bloc à ses héritiers.
Chacun de ces héritiers sera alors propriétaire d’une part non identifiable, du patrimoine du défunt. Il s’agira donc d’une fraction des biens composant la succession, mais sans plus de précisions sur celles-ci.
L’indivision successorale peut être mal vécue par les héritiers, car elle les oblige à s’entendre, à devoir concilier entre eux. De ce fait, les héritiers veulent majoritairement en sortir rapidement.
Pour se faire, il est recommandé de s’attacher des services d’un avocat qui sera compétent en matière de conseil et éventuellement d’action à l’encontre de l’indivision ou des héritiers (I). Celui-ci pourra ainsi manœuvrer parmi les multiples options pour mettre fin à cette situation (II).
I. Un recours conseillé à l’accompagnement par un avocat
À la suite de l’ouverture de la succession et lorsque l’indivision successorale est établie, il paraît être fondé de recommander l’accompagnement par un avocat. La matière successorale est en effet d’une complexité grandissante et l’accompagnement par un professionnel permet au mieux de défendre ses intérêts.
L’avocat est, en effet, capable de vous guider dans les démarches qui devront être menées si vous souhaitez sortir d’une indivision qui dure trop ou simplement parce que cette indivision devient, pour vous, difficile à gérer.
Peu importe le cadre dans lequel l’indivision sera établie, elle peut entraîner une gêne pour les personnes concernées. Qu’il s’agisse d’époux ou d’héritiers qui ne souhaiteraient pas s’entendre et rester propriétaires de tels biens. Être propriétaire seul est toujours plus aisé que propriétaire à plusieurs, c’est pourquoi sortir d’une indivision peut relever d’une particulière urgence.
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II. Moyens et méthodes pour quitter rapidement une indivision
Pour quitter une indivision successorale, plusieurs options existent. En réalisant une présentation rapide des différentes solutions pour sortir d’une indivision successorale, il est possible de distinguer les options qui impliquent la présence d’un juge et les solutions amiables entre indivisaires.
Pour sortir rapidement d’une indivision successorale, il paraît nécessaire de conseiller d’œuvre pacifiquement, dans la mesure du possible avec les autres co-indivisaires et œuvrer vers une sortie amiable de l’indivision. La sortie d’une indivision par voie judiciaire est, en effet, plus contraignante, longue et complexe.
A. Solutions extrajudiciaires
Vente des droits à un ou plusieurs co-indivisaires. La première méthode pour quitter une indivision consiste en la vente de ses droits. Ces droits pourront être vendus à des tiers comme aux autres indivisaires.
La vente de ses droits auprès d’un co-indivisaire est une opération qui doit être effectuée auprès d’un notaire. Elle est recommandée parce que plus aisée. Les droits restent ainsi « en famille ». Dans le cas où l’ensemble des parties est d’accord sur le montant des parts, la transaction est relativement simple.
Le notaire rédigera un acte de vente et l’indivisaire pourra sortir de l’indivision. Dans le cas contraire, des litiges peuvent apparaître et un expert devra être nommé pour évaluer le ou les biens. L’expert peut être proposé par les avocats ou par le notaire pour éviter les conflits.
Vente des droits à un tiers. À côté de cette première option, existe l’option consistant en la vente de ses droits à un tiers. Cette possibilité donne lieu à un droit de préemption par les autres héritiers. C’est-à-dire que les autres indivisaires auront la possibilité d’acheter prioritairement les droits mis à la vente, dans un impératif d’unité du patrimoine.
Ce droit de préemption est repris à l’article 815-14 du Code civil qui dispose « L’indivisaire qui entend céder, à titre onéreux, à une personne étrangère à l’indivision, tout ou partie de ses droits dans les biens indivis ou dans un ou plusieurs de ces biens est tenu de notifier par acte extrajudiciaire aux autres indivisaires le prix et les conditions de la cession projetée ainsi que les nom, domicile et profession de la personne qui se propose d’acquérir.
Tout indivisaire peut, dans le délai d’un mois qui suit cette notification, faire connaître au cédant, par acte extrajudiciaire, qu’il exerce un droit de préemption aux prix et conditions qui lui ont été notifiés. En cas de préemption, celui qui l’exerce dispose pour la réalisation de l’acte de vente d’un délai de deux mois à compter de la date d’envoi de sa réponse au vendeur.
Passé ce délai, sa déclaration de préemption est nulle de plein droit, quinze jours après une mise en demeure restée sans effet, et sans préjudice des dommages-intérêts qui peuvent lui être demandés par le vendeur.
Si plusieurs indivisaires exercent leur droit de préemption, ils sont réputés, sauf convention contraire, acquérir ensemble la portion mise en vente en proportion de leur part respective dans l’indivision. Lorsque des délais de paiement ont été consentis par le cédant, l’article 828 est applicable ».
Il faudra donc, avant d’entamer une telle vente, notifier par voie d’huissier, aux autres indivisaires, la volonté de céder ces droits. Un des héritiers pourra alors s’opposer à cette vente et racheter les parts en question. Ce droit de préemption des indivisaires permet d’éviter les conflits au sein d’une indivision. Dans le cadre successoral, cela illustre la volonté du législateur de permettre la conservation des biens dans la famille.
Dans un arrêt de la Cour d’appel de Lyon du 18 octobre 2022, une épouse qui expose que son époux avait consenti une donation à leur fils du 6e de la nue-propriété de l’immeuble et qu’il est nécessaire de purger le droit de préemption en cas de cession à un tiers à l’indivision selon les dispositions de l’article 815-14 du Code civil, déclare que la cour ne peut plus faire droit aux demandes des parties portant sur la cession de l’immeuble au bénéfice d’un tiers à l’indivision. L’époux confirme devant la cour que leur fils n’était ni présent, ni représenté dans le cadre de cette procédure et conclut lui aussi à la réformation du jugement.
La Cour d’appel de Lyon considère qu’il convient, conformément à l’accord des parties sur ce point et eu égard au fait que l’un des propriétaires indivis n’a pas été appelé dans l’instance en autorisation, de réformer le jugement déféré et de constater que l’épouse ne maintient pas devant la cour sa demande en autorisation de passer seule la vente du bien immobilier.
Vente du bien indivis. Il est également possible de quitter l’indivision en vendant le bien indivis seul ou à plusieurs. Le Code civil prévoit, en effet, à l’article 815-5-1 que : « Sauf en cas de démembrement de la propriété du bien ou si l’un des indivisaires se trouve dans l’un des cas prévus à l’article 836, l’aliénation d’un bien indivis peut être autorisée par le tribunal judiciaire, à la demande de l’un ou des indivisaires titulaires d’au moins deux tiers des droits indivis, suivant les conditions et modalités définies aux alinéas suivants.
Le ou les indivisaires titulaires d’au moins deux tiers des droits indivis expriment devant un notaire, à cette majorité, leur intention de procéder à l’aliénation du bien indivis. Dans le délai d’un mois suivant son recueil, le notaire fait signifier cette intention aux autres indivisaires.
Si l’un ou plusieurs des indivisaires s’opposent à l’aliénation du bien indivis ou ne se manifestent pas dans un délai de trois mois à compter de la signification, le notaire le constate par procès-verbal.
Dans ce cas, le tribunal judiciaire peut autoriser l’aliénation du bien indivis si celle-ci ne porte pas une atteinte excessive aux droits des autres indivisaires. Cette aliénation s’effectue par licitation. Les sommes qui en sont retirées ne peuvent faire l’objet d’un remploi sauf pour payer les dettes et charges de l’indivision.
L’aliénation effectuée dans les conditions fixées par l’autorisation du tribunal judiciaire est opposable à l’indivisaire dont le consentement a fait défaut, sauf si l’intention d’aliéner le bien du ou des indivisaires titulaires d’au moins deux tiers des droits indivis ne lui avait pas été signifiée selon les modalités prévues au troisième alinéa ».
En somme, pour réaliser une telle opération, il paraît nécessaire de détenir au minimum, deux tiers du bien. Cette majorité peut être atteinte par une seule personne ou par un groupe de co-indivisaires. Il faudra également une autorisation du Tribunal de justice et l’intervention d’un notaire. Pour que l’aliénation soit valable, il faut, au surplus, que celle-ci ne porte pas atteinte excessivement aux droits des autres indivisaires.
La Cour d’appel de Rennes dans un arrêt du 17 janvier 2023, précise que les dispositions de l’article 815-5-1 du Code civil ne sont pas applicables lorsque la liquidation des droits patrimoniaux, emportant partage de l’indivision post-communautaire, a été ordonnée. Par ailleurs, elle considère que l’autorisation du juge des tutelles n’est nullement nécessaire lorsqu’une juridiction ordonne la vente sur licitation d’un bien indivis dont l’un des indivisaires est sous protection.
Partage amiable. Une autre possibilité pour quitter l’indivision existe. Il s’agit du partage amiable. Le partage amiable se présente comme la manière la plus aisée pour quitter une indivision.
L’article 835 du Code civil dispose ainsi : « Si tous les indivisaires sont présents et capables, le partage peut intervenir dans la forme et selon les modalités choisies par les parties. Lorsque l’indivision porte sur des biens soumis à la publicité foncière, l’acte de partage est passé par acte notarié ».
Il est enfin possible de quitter une indivision par voie judiciaire. Cela implique une rupture de l’indivision par autorisation judiciaire.
B. Solutions judiciaires
La sortie de l’indivision par voie judiciaire pourra prendre plusieurs formes et apparaît comme la dernière solution.
Représentation judiciaire. Celle-ci pourra premièrement prendre la forme d’une représentation judiciaire.
Cette solution est codifiée à l’article 815-4 du Code civil qui dispose : « Si l’un des indivisaires se trouve hors d’état de manifester sa volonté, un autre peut se faire habiliter par justice à le représenter, d’une manière générale ou pour certains actes particuliers, les conditions et l’étendue de cette représentation étant fixées par le juge. À défaut de pouvoir légal, de mandat ou d’habilitation par justice, les actes faits par un indivisaire en représentation d’un autre ont effet à l’égard de celui-ci, suivant les règles de la gestion d’affaires ».
Dans ce cas, un autre indivisaire peut saisir le Tribunal de justice pour être habilité à représenter celui qui est hors d’état de manifester sa volonté. Pour cette demande de représentation de l’indivisaire, le tribunal devra autoriser ladite représentation dans l’étendue qui lui semble souhaitable : un seul acte, plusieurs actes… En somme, l’un des indivisaires va donner son consentement à la place de celui qui est empêché. Ce dernier aura toutefois la qualité de partie à l’acte.
Autorisation judiciaire. D’autre part, des autorisations judiciaires permettent de se dispenser du consentement d’un indivisaire, sans que celui-ci ne soit représenté. Cela rend la sortie plus facile mais plus conflictuelle. Plusieurs articles du Code civil prévoient cela. Nous pouvons citer les articles 815-5 à 815-7 du Code civil. Ces articles permettent de demander au juge l’autorisation de conclure un acte sans le consentement d’un indivisaire si celui-ci met en péril l’intérêt commun par son refus ou son silence.
L’autre cas de figure est lorsque le tribunal de justice, plus précisément son président, par ordonnance, ordonne une mesure urgente requise par l’intérêt commun. Dans ce cas, il n’est pas nécessaire que l’un des indivisaires s’y oppose. L’urgence à agir pour préserver les biens indivis suffit. Il peut s’agir d’interdire le déplacement de certains biens (815-7 du Code civil), de faire nommer un séquestre (815-7 du Code civil) qui permet la vente d’un bien indivis en cas de mesure urgente.
SOURCES :
ARTICLE 815-14 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006432469/
ARTICLE 815-5-1 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000039367468/
ARTICLE 835 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006432680/
ARTICLE 815-4 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/id/LEGISCTA000006136538/
https://www.labase-lextenso.fr/jurisprudence/CALYON-18102022-21_02241?em=Cour%20d%27appel%20de%20Lyon%20-%201%C3%A8re%20chambre%20civile%20B%2018%20octobre%202022%20%2F%20%2021%2F02241
https://www.labase-lextenso.fr/jurisprudence/CARENNES-17012023-22_06846?em=Cour%20d%27appel%20de%20rennes%2C%20R%C3%A9f%C3%A9r%C3%A9s%20Civils%2C%2017%20janvier%202023%2C%20%2022%2F06846