Comment réclamer un héritage ?
En droit des successions, beaucoup de procédures commencent au décès du de cujus. C’est le point de départ de beaucoup d’actions car c’est le moment où le patrimoine du de cujus cesse d’exister au travers de cette personne, pour être transmis aux héritiers. La succession commence donc au jour du décès.
Chaque héritier devient alors le propriétaire d’une quote-part de l’héritage. Il dispose sur cette quote-part d’une liberté limitée, car il devient co-indivisaire avec les autres héritiers.
Ainsi, il ne peut, par exemple, aliéner des biens sans l’accord des co-indivisaires, ou avant le partage. Une telle situation peut également générer des conflits et des litiges entre les héritiers, voir avec d’autres personnes appelées à recueillir une partie de la succession.
Se pose la question de savoir comment réclamer un héritage ? Cette question, beaucoup d’héritiers se la posent, car ils estiment leurs droits successoraux violés, leur part d’héritage atteinte.
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Selon l’article 720 du Code civil : « les successions s’ouvrent par la mort, au dernier domicile du défunt ». L’article 735 du Code civil complète cette disposition en prévoyant que : « Les enfants ou leurs descendants succèdent à leurs père et mère ou autres ascendants, sans distinction de sexe, ni de primogéniture, même s’ils sont issus d’unions différentes ».
Les articles 736 et suivants du Code civil, prévoient eux les règles de dévolution de l’héritage en l’absence d’héritier de premier ordre. Ainsi, les règles légales permettent de répartir au mieux l’héritage, entre les différentes personnes intéressées à la succession.
On entend ici le terme « intéressé » au sens de lien familial et non d’intérêt personnel ou économique. De fait, selon les prescriptions légales, chaque héritier devient alors le propriétaire d’une quote-part de l’héritage.
Avant de développer la question relative à la réclamation d’un héritage, il est important de définir plus en détail la notion même d’héritage. .
Selon le dictionnaire de Droit privé, l’héritage peut se définir comme « le mot désigne le plus souvent le patrimoine formé de droits, de biens mobiliers et/ou immobiliers ainsi que les actions judiciaires s’y rapportant, que, par suite du décès d’une personne, ses successeurs sont appelés à recueillir. Au sens large, le mot “héritier” désigne toute personne qui dispose d’un droit dans une succession.
Au sens technique, le mot est réservé aux personnes qui depuis la Loi n° 2006-728 du 23 juin 2006 en l’absence de conjoint survivant sont énumérées par l’article 734 du Code civil, en raison de ce que leur droit est fondé sur l’appartenance familiale ».
C’est en effet que la loi précitée du 23 juin 2006 a permis d’instaurer plus d’égalité entres tous les enfants. L’héritage est la transmission de biens d’un défunt à ses héritiers. C’est la dévolution successorale. L’héritage, moyen juridique de perpétuation, est sans doute l’un des principes auquel les Français sont les plus attachés.
Toutefois, des conflits et litiges peuvent survenir entre les héritiers. Il est alors important de ne pas se laisser usurper ses droits. Il s’agit d’agir et de défendre la part qui lui revient.
Plusieurs procédures peuvent être mises en place à ce moment afin de favoriser le bon déroulement de la succession. Il faut toutefois noter qu’en cas de litige, saisir le juge est possible, voir peut s’avérer nécessaire. Par ailleurs, il est également important de souligner la possibilité de ne pas être averti d’un héritage qui vous bénéficie.
C’est une situation rare, mais qui peut néanmoins survenir à l’occasion d’une succession complexe, ou dans laquelle le de cujus n’avait plus de relations avec ses héritiers. Il s’agit dans ce cas probablement d’un recel successoral. Avant de présenter la procédure applicable à la contestation d’un recel successoral (II), il est important de revenir sur le déroulement d’un héritage.
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I. Le déroulement d’un héritage
Avant de détailler la procédure de réclamation d’un héritage, il est important de présenter les différentes étapes de la succession. Comme explicitée précédemment, la procédure commence au jour du décès de la personne. Cette personne est désignée juridiquement comme le « de cujus ».
Dans le cas où aucun bien immobilier ne se trouverait dans la succession en cause, un partage amiable est possible. (Cour de cassation Première chambre civile Cassation 4 juillet 2018 N° 17-22.999) et (Cour de cassation Première chambre civile, 15 novembre 2017 N° 16-23.136).
Dans le cas contraire, c’est-à-dire en présence de biens à partager, la présence d’un notaire sera indispensable. Le notaire s’occupera de réaliser un inventaire des biens en cause de succession, et de proposer un partage aux héritiers.
Ce dernier commencera ainsi par l’établissement d’une déclaration de succession, qu’il est nécessaire de déposer auprès de l’administration fiscale, dans un délai de 6 mois à compter du décès. C’est une exigence qui permet à l’administration de taxer la succession en cause.
Dans la majorité des cas, le notaire essaye également de parvenir, dans un premier temps, à une solution amiable. Cette solution amiable ne peut être que trop recommandée. Elle permet de parvenir à un consensus mieux accepté par les héritiers, et permet également de maintenir un équilibre et une entente familiale.
C’est la meilleure des solutions. Si celle-ci ne peut être trouvée, un recours devant le juge sera inévitable. Le juge du tribunal judiciaire aura alors la charge de trancher les difficultés qui se sont élevées entre les héritiers et de proposer des solutions, transmises directement au notaire.
Il arrive cependant parfois que les héritiers ne soient pas du tout avertis qu’une succession, pour lesquels ils peuvent avoir un intérêt, s’ouvre. Cette situation porte un nom, il s’agit du recel successoral.
La Cour de cassation a, par exemple, pu caractériser la dissimulation volontaire (non-révélation intentionnelle) par l’héritier du capital d’un contrat d’assurance vie, de recel successoral (Cour de cassation, 1re civile du 4 juin 2009, n° 08-15.093, n° 647 F – P + B). Pour cela, les juges du fond doivent caractériser l’intention frauduleuse dudit bénéficiaire de porter atteinte à l’égalité du partage (Cour de cassation, 1re civile du 16 mars 2016, n° 15-14.940).
L’élément matériel de dissimulation ne suffit donc pas en lui même. Il faut ajouter un élément intentionnel : l’expression de l’intention de porter atteinte à la part d’un autre.
Nous verrons ci-après la procédure applicable recel successoral.
II. Le recel successoral : réclamer un héritage
Comme expliciter précédemment, dans le cas où un héritier n’est pas averti qu’une succession a lieu en sa faveur, celui-ci fait face à une situation de recel successoral.
Le recel successoral sanctionne « en effet les héritiers rendus auteurs, complices ou receleurs de détournements de biens, d’actifs ou de droits successoraux » (Legavox, Le recel successoral). Le recel successoral est le « fait pour un héritier de détourner volontairement et frauduleusement un bien en vue de se l’approprier ou de dissimuler volontairement l’existence d’un autre héritier » (Définition du recel successoral, Chambre des Notaires de Paris).
Les conditions du recel successoral sont de deux ordres : un élément matériel, auquel s’ajoute un élément intentionnel. En ce qui concerne l’élément matériel. On retrouve ici l’utilisation de la technique du faux : falsification de document qui conduit à modifier le partage au profit de l’héritier, présentation d’un faux testament instituant l’héritier légataire …
Il peut s’agir également de la dissimulation. En effet, toute dissimulation de biens ou droits de succession est susceptible d’être qualifiée de recel. C’est ce que prévoit l’article 778 du Code civil : « Sans préjudice de dommages et intérêts, l’héritier qui a recelé des biens ou des droits d’une succession ou dissimulé l’existence d’un cohéritier est réputé accepter purement et simplement la succession, nonobstant toute renonciation ou acceptation à concurrence de l’actif net, sans pouvoir prétendre à aucune part dans les biens ou les droits détournés ou recelés.
Les droits revenant à l’héritier dissimulé et qui ont ou auraient pu augmenter ceux de l’auteur de la dissimulation sont réputés avoir été recelés par ce dernier ».
Pour ce qui est de l’élément intentionnel, le recel successoral suppose une intention frauduleuse de l’héritier de l’héritier qui entend rompre à son profit l’égalité du partage. C’est-à-dire que ses manœuvres volontaires ont pour seul but de diminuer l’actif, à son seul profit personnel.
La Cour d’appel de Colmar a, par exemple, pu considérer que les retraits non justifiés du compte bancaire d’un défunt dont l’héritier n’a pas spontanément évoqué l’existence, caractérisent une dissimulation et une volonté de rompre à son profit l’égalité du partage. Elle estime que les éléments matériel et intentionnel du recel successoral étaient réunis (Cour d’appel de Colmar, Chambre 2 A, 8 décembre 2022, n° 20/00620).
Le Code civil prévoit également la situation dans laquelle l’État serait amené à recueillir la succession. C’est une éventualité prévue par l’article 539 du Code civil, qui indique : « les biens des personnes qui décèdent sans héritier ou dont les successions sont abandonnées appartiennent à l’État ». En conséquence, si aucun héritier ne se manifeste, les biens en question dans la succession reviendront à l’État, qui en devient le propriétaire.
Par application combinée des dispositions de l’article 539 du Code civil, l’État peut prétendre aux successions des personnes qui décèdent sans héritiers ou aux successions qui sont abandonnées, à moins qu’il ne soit disposé autrement des biens successoraux par des lois particulières.
L’article 539 du Code civil dispose en effet : « Les biens des personnes qui décèdent sans héritiers ou dont les successions sont abandonnées appartiennent à l’Etat ».
Conformément à l’article 724 du Code civil qui dispose : « Les héritiers désignés par la loi sont saisis de plein droit des biens, droits et actions du défunt. Les légataires et donataires universels sont saisis dans les conditions prévues au titre II du présent livre. À leur défaut, la succession est acquise à l’État, qui doit se faire envoyer en possession », l’État doit demander l’envoi en possession.
Le Dictionnaire de Droit privé définit l’envoi en possession comme « une procédure par laquelle le Président du tribunal judiciaire statuant par ordonnance sur requête est appelé à autoriser certaines personnes qui sont désignées par la loi à l’effet de leur permettre d’entrer en possession des biens ou de la quotité des biens dépendants de la succession du défunt qui leur sont dévolu.
Les autres héritiers sont dits “saisis de plein droit” des biens, droits et actions du défunt. À défaut, d’héritiers la succession est dite “vacante”, c’est-à-dire qu’elle est acquise à l’État, qui doit aussi se faire envoyer en possession ».
Par ailleurs, une clause d’exhérédation totale à l’égard de l’État ne peut pas permettre de s’opposer à ce que l’État puisse recueillir la succession, par le biais de la déshérence, car l’État est souverain. La saisine de ces biens est conférée à l’Etat par le mécanisme de l’envoi en possession (Libéralités et successions, Manuel, publié le 18/10/2022).
Se pose alors la question de la procédure à suivre pour réclamer un héritage si l’Etat l’a déjà saisi. Pour répondre à cette question, il est possible de citer l’article 811-2 du Code civil qui dispose : « la déshérence de la succession prend fin en cas d’acceptation de la succession par un héritier » dans un délai de dix ans.
Selon les commentaires faits au sujet de l’ancien régime des successions en déshérence, l’État est, en fait, propriétaire sous condition résolutoire de la revendication des héritiers tant que la prescription ne lui est pas acquise. C’est-à-dire que l’État ne sera pleinement propriétaire, qu’au jour de prescription du délai de dix ans.
L’envoi en possession de l’État n’empêche donc pas un héritier d’accepter ou de réclamer la succession. Si le délai de dix ans est expiré, l’héritier doit prouver qu’il avait accepté la succession avant la prescription.
C’est ce que prévoit l’article 781 du Code civil : « Lorsque le délai de prescription mentionné à l’article 780 est expiré, celui qui se prévaut de sa qualité d’héritier doit justifier que lui-même ou celui ou ceux dont il tient cette qualité ont accepté cette succession avant l’expiration de ce délai ».
Ce délai court à partir du jour de l’ouverture de la succession, quelle que soit la date de l’envoi en possession de l’État. Il est alors possible de réclamer un héritage même s’il a été saisi par l’État. Cet article pose toutefois des conditions de temporalité avec une condition simple : le décès doit avoir pris place dans les dix années précédant la découverte de l’héritage.
Cette procédure demeure complexe et peut s’avérer longue. Il est ainsi recommandé de faire appel à un avocat, qui saura vous accompagner et vous guider dans ces démarches.
SOURCES :ARTICLE 720 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006430690/
ARTICLE 735 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/id/LEGIARTI000006431000/2002-07-01
DÉFINITION DE L’HÉRITAGE – DICTIONNAIRE DE DROIT PRIVÉ : https://www.dictionnaire-juridique.com/definition/heritage-heritier.php
COUR DE CASSATION PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE CASSATION 4 JUILLET 2018 N° 17-22.999 : https://www.doctrine.fr/d/CASS/2018/JURITEXT000037196779
COUR DE CASSATION PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE REJET 15 NOVEMBRE 2017 N° 16-23.136 : https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/arrets_publies_2986/premiere_chambre_civile_3169/2017_7946/novembre_8284/1188_15_38059.html
ARTICLE 778 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000020616239/
ARTICLE 539 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006428808/
DÉFINITION DE L’ENVOI EN POSSESSION – DICTIONNAIRE DE DROIT PRIVÉ : https://www.dictionnaire-juridique.com/definition/envoi-en-possession.php
ARTICLE 811-2 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000006432133&cidTexte=LEGITEXT000006070721COUR D’APPEL DE COLMAR, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 8 DÉCEMBRE 2022 N° 20/00620
https://www.labase-lextenso.fr/jurisprudence/CACOLMAR-08122022-20_00620?em=Cour%20d%27appel%20de%20colmar%2C%20Chambre%202%20A%2C%208%20d%C3%A9cembre%202022%2C%20%2020%2F00620
LIBÉRALITÉS ET SUCCESSIONS, MANUEL, PUBLIÉES LE 18/10/2022
NB. Dans la résolution de vos problèmes relatifs à la succession, nos avocats sont disposés à vous aider.