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Porte-fort et succession

On peut se porter fort en promettant le fait d’un tiers (C. civ. art. 1204, al. 1).

La promesse de porte-fort ou clause de porte-fort est, en matière contractuelle, la convention par laquelle une personne prend l’engagement à l’égard d’une autre d’obtenir d’un tiers le consentement nécessaire à la validité d’un contrat, sous forme d’une approbation ou d’une ratification de ce contrat.

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La technique du porte-fort met en évidence trois personnages : celui qui se porte-fort pour autrui, dénommé « promettant » ou encore « porte-fort » ; celui pour lequel on se porte fort, dénommé « tiers », tout du moins tant qu’il n’a pas ratifié ; le cocontractant du promettant, appelé « bénéficiaire » de la promesse.

Par ce procédé, une personne dépourvue de pouvoir de représentation contracte avec une autre une opération, en s’engageant à obtenir le consentement qui fait défaut, et sous la sanction d’être tenue à des dommages et intérêts si le tiers dont le consentement est requis refuse de ratifier le contrat passé en son nom. En réalité, le tiers pour lequel le promettant s’est porté fort ne sera personnellement engagé que lorsqu’il aura ratifié le contrat.

Aujourd’hui, la promesse de porte-fort n’est plus qu’exceptionnellement utilisée et doit d’ailleurs être déconseillée pour une opération aussi grave qu’une vente ou une acquisition d’immeuble. Pour cette raison, les développements qui lui sont consacrés ici seront brefs et limités à l’hypothèse la plus fréquemment rencontrée en pratique, celle d’une vente réalisée avec promesse de ratification par un vendeur incapable.

Le contrat conclu avec promesse de porte-fort est considéré comme provisoirement valable. Les droits de mutation sont immédiatement exigibles et l’acte est soumis à la formalité de publicité foncière.

Le contrat est cependant inopposable au tiers dont la ratification est nécessaire à sa validité définitive. Celui-ci, s’il refusait la ratification, pourrait agir en revendication à l’encontre de l’acquéreur.

Le promettant est libéré de toute obligation si le tiers accomplit le fait promis. Dans le cas contraire, il peut être condamné à des dommages et intérêts (C. civ. art. 1204, al. 2). Le promettant qui n’a pas réussi à convaincre le tiers de tenir l’engagement promis engage donc sa responsabilité envers le bénéficiaire de la promesse, sans pouvoir contester la validité de cet engagement ni se prévaloir du fait que le tiers ne s’est pas engagé à titre principal (1).

Par ailleurs, si le contrat n’est pas ratifié par le tiers, pour cause de refus ou d’impossibilité, il ne peut plus produire effet et est anéanti.

Selon une partie de la doctrine ancienne, le contrat pourrait être maintenu lorsque le contrat considéré n’intéresse pas uniquement comme cocontractant le tiers pour lequel on s’est porté fort, mais également des personnes majeures et maîtresses de leurs droits (ce qui serait le cas, par exemple, si la vente concernait des indivisaires dont certains ou l’un d’entre eux seraient majeurs, et l’un ou les autres incapables mineurs).

Dans ce cas, le tiers, bien qu’il n’ait pas consenti, serait obligé en application du mécanisme de la gestion d’affaires.

Le décès du promettant laissant à sa survivance le tiers acceptant sa succession est une hypothèse fréquente dans la mesure où c’est généralement un parent, administrateur d’un enfant mineur, qui contracte en se portant fort de la ratification par celui-ci.

En sa qualité de tiers au contrat, l’héritier reste libre de refuser la ratification ; mais ce faisant, il est tenu d’indemniser, en qualité de successeur du promettant, le bénéficiaire cocontractant (2).

En revanche, le tiers héritier (acceptant) du promettant décédé serait tenu par le contrat et ne pourrait pas le critiquer si le promettant était intervenu à l’acte non seulement pour promettre la ratification, mais également comme contractant autonome (par exemple, comme coïndivisaire vendeur, conjointement avec le mineur incapable), à ce titre tenu à garantie.

Il serait lui-même tenu à garantie vis-à-vis du tiers, en sa qualité de successeur du promettant, et ne pourrait évincer le cocontractant bénéficiaire de la promesse.

L’usage d’une promesse de porte-fort est opportun en pratique dans le cadre de la gestion d’une indivision, notamment lorsque tous les indivisaires doivent consentir à l’exécution d’un acte de disposition (vente, hypothèque…), en l’absence d’un mandat exprès ou tacite au profit de l’un d’eux.

 

I. Porte-fort dans une succession

A. Dans un héritage

Concernant les successions, seul un héritier peut se porter fort. Il le fait en principe quand d’éventuels autres héritiers sont absents, inconnus ou injoignables.

Ce sont parfois des organismes officiels qui demandent à un héritier une attestation de porte-fort : organisme de retraite ou de Sécurité sociale, caisse d’allocations familiales, etc. L’organisme n’a alors qu’un seul interlocuteur, le porte-fort.

En matière d’héritage, le porte-fort :

certifie sur l’honneur être héritier ;

s’engage à effectuer toutes démarches en lien avec la succession, dans l’intérêt de l’ensemble des héritiers et dans le respect de leurs droits (il s’engage à défendre et représenter leurs intérêts et pas seulement les siens) ;

en échange, il peut aussi recevoir des sommes d’argent, puisqu’il se déclare héritier.

B. Comment se porter fort en matière d’héritage ?

L’héritier doit demander une attestation de porte-fort en mairie (c’est une sorte de déclaration préremplie). En principe, la mairie ne la délivre que si les sommes en jeu sont inférieures à 5 000 € environ.

L’héritier doit fournir des pièces justificatives, au minimum une pièce d’état civil et un livret de famille. Il atteste sur l’honneur que les renseignements sont exacts et complets. Il doit en particulier certifier sur l’honneur qu’un tel est décédé.

Il indique également que le défunt a laissé telles personnes pour seuls héritiers apparents et affirme que ces héritiers ont le droit de recevoir toutes les sommes qui peuvent relever de la succession du défunt.

L’attestation se conclut par une formule du type : « En foi de quoi je me porte fort et caution au nom des autres cohéritiers ».

L’héritier doit signer l’attestation, en principe devant un officier d’état civil. Une fois muni de cette attestation, le porte-fort peut effectuer les démarches en lien avec la succession.

 

II. Porte-fort et héritier

A. En cas d’existence d’un héritier protégé

Une promesse de porte-fort est donc un acte en vertu duquel un des héritiers se porte-fort pour les autres, en agissant seul. Ce sera notamment le cas lorsque l’un des héritiers n’a pas la capacité actuelle de réaliser l’opération juridique envisagée sur la succession, mais dont la situation implique qu’il aura un jour cette capacité, puisque la ratification de la promesse devra être effective (3).

Sont ici visés les héritiers mineurs ou majeurs protégés. La promesse de porte-fort s’apparentant juridiquement à une promesse de ratification, une opération dans laquelle ces personnes protégées interviennent est dès lors tout à fait possible.

B. Les obligations de l’héritier porte-fort

Comme précédemment évoqué, il est fréquent que des organismes (Sécurité sociale, mutuelles, établissements bancaires, compagnies d’assurance) aient des sommes à verser au crédit de la succession. Dans ce cas, l’héritier porte-fort est seul habilité à recevoir les créances pouvant revenir à la succession. Dès lors, dans le cadre de ses attributions contractuelles, il se trouve personnellement obligé et peut voir ainsi sa responsabilité engagée envers l’organisme destinataire.

Ainsi rappelé plus avant, l’attestation de porte-fort permet aux héritiers d’apporter la preuve de leur qualité d’héréditaire. Toutefois, un tel document n’est valable que pour des sommes inférieures à 5 500 € : si le montant est supérieur, un notaire devra établir un certificat d’hérédité.

Enfin, il convient de préciser que l’héritier porte-fort s’engage à réaliser toutes les démarches relatives à la succession, dans l’intérêt de l’ensemble des héritiers et dans le respect de leurs droits.

 

Sources :

  1. https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000030496471?init=true&page=1&query=14-13.694+&searchField=ALL&tab_selection=all
  2. https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000006995183?init=true&page=1&query=74-10.356+&searchField=ALL&tab_selection=all
  3. https://succession.ooreka.fr/astuce/voir/301497/porte-fort-succession-qu-est-ce-que-c-est