Les cas de révocation d’une donation
En règle générale, une fois une donation effectuée, elle est irrévocable. En d’autres termes, le donateur ne peut pas récupérer le bien donné. Cependant, une clause de retour peut être insérée, stipulant que si le bénéficiaire décède avant le donateur, le bien sera restitué à ce dernier.
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La loi prévoit également certaines exceptions permettant la révocation d’une donation, dont deux pour les donations entre époux et trois indépendantes de la volonté du donateur :
- Inexécution des charges
- Ingratitude (sauf entre époux)
- Survenance d’enfants
Pour invoquer l’un de ces motifs de révocation, une action en justice est nécessaire.
I. La révocation pour inexécution des charges
Une donation peut être assortie de conditions, appelées charges, que le bénéficiaire doit respecter. Ces charges doivent être licites et morales. Par exemple, il peut être exigé une rente viagère, un hébergement, ou la non-vente du bien en contrepartie de la donation. Une clause peut également prévoir la révocation automatique de la donation en cas de non-respect des charges.
Si cette clause n’existe pas, il est envisageable d’intenter une action en justice pour obtenir la révocation de la donation pour non-exécution des charges, avec représentation obligatoire par un avocat. Si le bénéficiaire de la donation est décédé, l’action sera engagée contre sa succession et ses héritiers.
Trois conditions doivent être remplies :
- La charge doit avoir été la cause déterminante de la donation,
- Son inexécution doit être grave,
- Elle ne doit pas être imputable au donateur.
Si la révocation est prononcée alors que le bénéficiaire avait une rente viagère, le donateur n’aura pas à restituer les arrérages, c’est-à-dire les sommes obtenues périodiquement au titre de la rente viagère.
La révocation pour inexécution des charges peut être demandée pour toutes les donations, mais ne saurait reposer sur une cause illicite. (Civ. 1re, 30 nov. 2022, n°21-11.507 (1).
L’action appartient au donateur ou à ses héritiers en cas de décès sauf si la charge était personnelle au donateur ou si celui-ci a renoncé de son vivant à l’action en révocation (lorsque la donation porte sur une œuvre d’art, l’action appartient à tout héritier puisqu’elle a pour finalité la restitution de biens corporels, sans distinguer entre les titulaires du droit moral et les titulaires des droits pécuniaires. (Civ. 1re, 16 janv. 2019, n° 18-10.603 (2)
es créanciers du donateur peuvent également agir à la place de leur débiteur par la voie de l’action oblique lorsque la charge est de nature patrimoniale conformément à l’article 1341-1 du Code civil.(3)
Le tribunal peut prononcer une révocation totale ou partielle. Le bénéficiaire de la donation peut également demander en justice la modification de la charge si celle-ci est jugée trop lourde.
II. Révocation pour cause d’ingratitude du donataire envers le donateur
L’ingratitude du donataire est une notion strictement définie par l’article 955 du Code civil (4). Aux termes de ce texte, le donataire doit être considéré comme ingrat « 1° [s’il] a attenté à la vie du donateur, 2° s’il s’est rendu coupable envers lui de sévices, délits ou injures graves, 3° s’il lui refuse des aliments ».
La révocation d’un don peut être demandée si le bénéficiaire a fait preuve d’ingratitude envers le donateur. La révocation pour ingratitude n’est pas possible pour les donations faites en vue du mariage.
L’ingratitude doit avoir été commise après la donation. Trois situations sont considérées comme ingratitude :
- Si le bénéficiaire a attenté à la vie du donateur,
- S’il s’est rendu coupable de sévices, délits ou injures graves envers le donateur,
- s’il refuse tout soutien financier au donateur alors que celui-ci est sans ressources.
Pour obtenir la restitution du don, il faut demander la révocation pour cause d’ingratitude dans l’année suivant le délit ou le moment où le donateur en a eu connaissance. Les héritiers peuvent intenter l’action si le donateur décède dans l’année.
L’action en révocation pour ingratitude répond à des conditions strictes. Le point de départ du délai peut être reporté au jour de la condamnation définitive du donataire. Mais l’article 955 du Code civil (4) exige que les faits caractérisant l’ingratitude du donataire soient commis à l’encontre du donateur. (Civ 1re, 30 janv. 2019, n° 18-10.09 (5)
Le bénéficiaire devra restituer la valeur des objets s’ils ont été vendus ainsi que les fruits à partir du jour de la demande. Par exemple, si le don est un appartement, le bénéficiaire devra restituer l’appartement ainsi que les loyers perçus à partir du jour de la demande de révocation.
III. La révocation pour cause de survenance d’enfant
Ce cas de révocation n’est pas applicable entre époux. Pour les donations réalisées avant le 1er janvier 2007, la révocation était automatique. Depuis cette date, la révocation n’est plus automatique et doit être stipulée dans l’acte authentique de donation.
Par la suite, il sera nécessaire d’intenter une action en justice. Cette action peut être engagée si le donateur n’avait aucun enfant au moment de la donation.
L’annulation ne peut intervenir de plein droit et devra donc être demandée par le donateur dans un délai de 5 ans à compter de la naissance de l’enfant ou de l’adoption. Une adoption plénière permet également d’utiliser ce motif de révocation.
Conformément aux dispositions de l’article 963 du Code civil (6), la révocation aura un effet rétroactif, de sorte que les biens objet de la donation seront restitués au donateur, libres de toutes charges constituées du chef du donataire.
Dans ce cas, les droits de donation versés sont également restituables.
IV. La clause de retour
Une clause de retour peut être ajoutée à une donation, stipulant que si le bénéficiaire décède avant le donateur, le bien donné sera restitué au donateur. Cette clause permet de prévoir le retour du bien dans le patrimoine du donateur en cas de décès prématuré du bénéficiaire.
Principes de la clause de retour :
- Automatique : La clause de retour peut être automatique, ce qui signifie qu’elle prend effet sans nécessiter d’action en justice.
- Prévue dans l’acte de donation : Pour être valide, la clause de retour doit être explicitement mentionnée dans l’acte de donation.
- Effet : En cas de décès du bénéficiaire avant le donateur, le bien donné revient automatiquement au donateur, évitant ainsi que le bien ne tombe dans la succession du bénéficiaire.
Exemple d’application :
- Bien immobilier : Si une personne donne un appartement à son enfant avec une clause de retour et que l’enfant décède avant le parent, l’appartement retourne au parent.
- Biens mobiliers : La clause de retour peut également s’appliquer aux biens mobiliers, comme des œuvres d’art ou des bijoux.
Avantages :
- Protection du patrimoine : Cette clause protège le patrimoine du donateur en cas de décès prématuré du bénéficiaire.
- Simplicité : Elle évite les complications juridiques et les conflits successoraux en cas de décès du bénéficiaire.
Limitations :
- Inapplicable entre époux : La clause de retour ne peut pas être appliquée dans le cadre des donations entre époux.
- Doit être expressément stipulée : Elle n’est valable que si elle est expressément prévue dans l’acte de donation.
En somme, la clause de retour est un outil juridique permettant au donateur de récupérer le bien donné en cas de décès du bénéficiaire, assurant ainsi une certaine protection de son patrimoine.
SOURCES :
- https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000046683031
- https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000038060620
- https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000032035225
- https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006433886/2006-07-01
- https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000038112070
- https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006433964