Comment dénoncer un abus de faiblesse ?

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L’abus de faiblesse est un délit qui implique l’abus de la condition de faiblesse d’une personne. Un tiers ou une personne proche profite de manière malhonnête de l’état de faiblesse d’une personne. L’abus de faiblesse se rencontre dans toutes les sphères de la société et dans tous les cas de figure. On la retrouve cependant, le plus souvent, chez les personnes âgées.

L’abus de faiblesse peut être caractérisé dans diverses matières du droit. Ainsi, une relation contractuelle peut être la source d’un abus de faiblesse. Il s’agit alors généralement de contrats non souhaités ou non profitables à la victime. On retrouve souvent également l’abus de faiblesse en matière de successions.

Il s’agit alors principalement d’une influence sur le testateur au moment de l’écriture de son testament, au profit de celui qui actionne la pression. L’abus de faiblesse peut également se retrouver dans le cadre d’une simple donation entre vifs.

L’abus de faiblesse est fondé sur l’article L223-15-2, de la sixième section du Code pénal appelée « De labus frauduleux de létat dignorance ou de faiblesse ». Cet article prévoit ainsi «  Est puni de trois ans d’emprisonnement et de 375 000 euros d’amende l’abus frauduleux de l’état d’ignorance ou de la situation de faiblesse soit d’un mineur, soit d’une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur, soit d’une personne en état de sujétion psychologique ou physique résultant de l’exercice de pressions graves ou réitérées ou de techniques propres à altérer son jugement, pour conduire ce mineur ou cette personne à un acte ou à une abstention qui lui sont gravement préjudiciables.

Lorsque linfraction est commise par le dirigeant de fait ou de droit dun groupement qui poursuit des activités ayant pour but ou pour effet de créer, de maintenir ou dexploiter la sujétion psychologique ou physique des personnes qui participent à ces activités, les peines sont portées à cinq ans demprisonnement et à 750 000 euros damende ».

De cette disposition, il ressort que les victimes d’abus de faiblesse sont des personnes dans un état d’ignorance ou de faiblesse. Toutefois, cette faiblesse et cette vulnérabilité se caractérisent uniquement selon les critères légaux présentés par le Code pénal.

De manière générale, les victimes sont généralement des personnes âgées. Mais il faut bien comprendre que l’incrimination du Code pénal va bien au-delà de cette catégorie de personnes.

Ainsi, toute personne qui répondra aux conditions posées par l’article L223-15-2 pourra intenter une action fondée sur l’abus de faiblesse, qu’elle soit âgée ou non. L’abus de faiblesse est quelque chose de courant, car s’attaquer à une personne vulnérable peut être aisé et lucratif.

Dans le cadre successoral, la commission d’un abus de faiblesse peut permettre d’extorquer une part supplémentaire dans la succession, ou de se voir attribuer préférentiellement un bien.

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Dans une relation contractuelle, l’abus de faiblesse peut conduire à l’acquiescement à un acte non désiré par la victime et qui ne lui est pas favorable en termes d’utilité ou de finalité. Dans ce dernier cas, l’action en abus de faiblesse pourra permettre d’obtenir la nullité de l’acte et l’attribution de dommages-intérêts à la victime.

En matière successorale, à nouveau, la commission d’un abus induit dans la plupart de cas que le consentement du légataire a été totalement vicié par une personne profitant de la faiblesse ou de la vulnérabilité de la victime.

Le légataire se trouve donc victime d’un abus de faiblesse, c’est-à-dire victime d’un processus par lequel il a été amené à faire des choses qu’il n’aurait pas faites si son consentement n’avait pas été vicié par les manœuvres de la personne qui commet l’abus.

Dans ce cas, comme dans tous les cas d’abus de faiblesse, il est possible de dénoncer cette grave atteinte et de faire sanctionner son auteur. Ainsi, l’abus de faiblesse doit être dénoncé dès que possible pour que l’auteur de cet abus soit sanctionné et puni pour ses actes délictueux.

Pour se faire, il est nécessaire de caractériser l’état de vulnérabilité dans lequel se trouvait la victime de l’abus de faiblesse. Dans le cadre contractuel, la victime aura forcément été lésée.

Dans le cas d’une succession, ce seront les héritiers qui auront la qualité de personnes lésées. Dès lors, la succession pourra devenir très difficile à gérer à cause des différentes contestations qui apparaîtront. Un avocat pourra vous accompagner et vous aider à régler ces différents litiges. Il sera plus à même de réaliser le dossier d’accusation et caractériser les éléments en cause.

Nous étudierons dans un premier temps les moyens permettant de dénoncer un abus de faiblesse (I). Dans un deuxième temps, nous présenterons les différentes conditions permettant d’obtenir la condamnation de la personne soupçonnée d’abus (II). Enfin, nous aborderons la procédure de dépôt de plainte pour abus de faiblesse (III).

I. Comment dénoncer un abus de faiblesse

Comme tout délit, l’abus de faiblesse doit être dénoncé. Il faut le faire pour sanctionner l’auteur de l’abus, mais également pour éviter que d’autres victimes apparaissent. Pour le faire, il faudra aller devant un juge, accompagné d’un avocat. L’idéal serait de trouver un bon avocat, spécialisé en la matière.

Ce dernier va devoir suffisamment caractériser l’état de vulnérabilité dans lequel se trouvait la victime de l’abus de faiblesse. Dans le cas de figure d’une succession, les héritiers seront les personnes lésées et la succession pourra devenir très difficile à gérer.

Dénoncer un abus de faiblesse se fait donc essentiellement devant les juges. Le juge, chargé de trancher les litiges est le seul qui peut établir que les conditions pour parler d’abus de faiblesse sont réunies. Il est également le seul qui permettra d’aboutir à une sanction de l’auteur de l’abus de faiblesse.

Pour cela il faudra démontrer que la victime était bien faible et qu’un avantage particulier était recherché par l’auteur de cet abus de faiblesse. Toutefois, il est important de savoir que l’abus de faiblesse est différent du dol. En effet, le dol n’est pas assorti d’une condition de faiblesse et il se limite essentiellement au consentement de la victime.

En effet, selon l’article 1137 du Code civil « Le dol est le fait pour un contractant d’obtenir le consentement de l’autre par des manœuvres ou des mensonges. Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie. »

 II. Conditions de réussite de l’action

Comme tout délit, l’abus de faiblesse doit être dénoncé. Il faut le faire pour sanctionner l’auteur de l’abus, mais également pour éviter que d’autres soient victimes de ces agissements délictueux.

La procédure applicable aux abus de faiblesse implique de réaliser une action en justice. Cette action se déroulera devant un juge pénal. Il faudra alors être assisté d’un avocat. Il s’agit d’une exigence fondée sur le Code de procédure pénale. L’avocat présentera alors devant la formation de jugement les éléments qui lui permettent de demander la condamnation de la personne soupçonnée d’abus de faiblesse.

Il faut noter que cette action est relativement longue et peut être complexe. Dans le cas d’une succession, les héritiers seront les personnes lésées et la succession pourra devenir très difficile à gérer. Ce sera à eux d’actionner la procédure devant la formation de jugement, car ce sont eux qui subissent un préjudice certain et direct.

Une fois saisie, la formation de jugement sera appelée à se prononcer sur la concordance ou non de critères permettant caractériser un abus de faiblesse, au litige en cause. Cette formation sera également appelée à statuer en matière de condamnation de la personne soupçonnée, et de la réparation des préjudices subis.

Pour cela, la formation de jugement analysera les faits en cause et vérifiera l’existence d’un état de faiblesse, de vulnérabilité préexistant, ainsi que la recherche, par la personne mise en cause, d’un profit illicite. Ces deux éléments sont appelés élément matière et élément intentionnel et sont le fondement de toute infraction pénale. Il faut préciser à ce stade que l’abus de faiblesse se détache de la notion civile des vices du consentement.

Les vices du consentement, et plus particulièrement le dol, sont des manœuvres frauduleuses commises par une personne, dans le but d’extorquer un engagement de la part d’une autre personne.

Ainsi, l’article 1137 du Code civil dispose : « Le dol est le fait pour un contractant dobtenir le consentement de lautre par des manœuvres ou des mensonges. Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par lun des contractants dune information dont il sait le caractère déterminant pour lautre partie. Néanmoins, ne constitue pas un dol le fait pour une partie de ne pas révéler à son cocontractant son estimation de la valeur de la prestation ».

La différence d’avec l’abus de faiblesse tient ici au fait que l’abus de faiblesse nécessite un état préexistant de faiblesse. Et c’est cet abus de situation qui permet l’incrimination pénale.

Une action pour abus de faiblesse en droit des successions peut naître dans deux cas différents. Tout d’abord, il est possible qu’une action contre la personne soupçonnée d’abus de faiblesse, soit menée du vivant du testateur. Pour cela, il devra agir dans le respect du délai de prescription posé à l’article 8 du Code de procédure pénale.

Cet article dispose : « Laction publique des délits se prescrit par six années révolues à compter du jour où linfraction a été commise. Laction publique des délits mentionnés à larticle 706-47 du présent code, lorsquils sont commis sur des mineurs, à lexception de ceux mentionnés aux articles 222-29-1 et 227-26 du Code pénal, se prescrit par dix années révolues à compter de la majorité de ces derniers. Laction publique des délits mentionnés aux articles 222-12, 222-29-1 et 227-26 du même code, lorsquils sont commis sur des mineurs, se prescrit par vingt années révolues à compter de la majorité de ces derniers. Laction publique des délits mentionnés à larticle 706-167 du présent code, lorsquils sont punis de dix ans demprisonnement, ainsi que celle des délits mentionnés aux articles 706-16 du présent code, à lexclusion de ceux définis aux articles 421-2-5 à 421-2-5-2 du Code pénal, et 706-26 du présent code et au livre IV bis du Code pénal se prescrivent par vingt années révolues à compter du jour où linfraction a été commise ».

Ce délai de prescription est passé à six années et court à partir du jour où l’infraction est commise . Cela, depuis une loi du 27 février 2017 (Loi n° 2017-242 du 27 février 2017 portant réforme de la prescription en matière pénale). Il faudra que la victime de l’abus ou son entourage prenne rapidement conscience pour pouvoir agir. Mais cela demeure rare dans le cadre testamentaire.

Dans la majeure partie des cas, il faudra souvent attendre l’ouverture de la succession pour se rendre compte que le testateur a subi des actes délictueux l’ayant amené à réaliser des modifications testamentaires. La victime de l’abus de faiblesse pourra prouver son état de faiblesse ou d’ignorance par tous moyens puisqu’il s’agit d’un fait juridique.

Des témoignages concordants ou encore un rapport d’expertise médicale sont donc recevables. Il faut, de plus, pouvoir démontrer le degré d’atteinte de la personne. C’est-à-dire la grande vulnérabilité ou ignorance de la victime. Ensuite, la victime devra prouver que l’auteur de l’infraction connaissait son état.

Cette dernière exigence peut se déduire des éléments en cause et notamment de la relation de proximité que l’auteur soupçonné entretenait avec la victime. C’est généralement le cas lorsqu’il s’agit d’un-e aide à domicile, d’un membre de la famille ou encore d’une personne relevant du personnel soignant. Enfin, il faut prouver que cet acte a causé un préjudice.

Pour parler d’abus de faiblesse, l’état de faiblesse devra être supporté par : soit un mineur, soit une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, soit une personne en état de sujétion psychologique ou physique résultant de l’exercice de pressions graves ou réitérées ou de techniques propres à altérer son jugement. Il s’agit ici des critères définis par l’article L223-15-2 du Code pénal.

C’est uniquement dans ces cas qu’il sera possible de parler d’abus de faiblesse. Il faudra ensuite qu’un abus de cet état ait été réalisé. On parlera d’abus lorsque l’acte commis par la victime ou l’abstention de ladite victime lui sont gravement préjudiciables.

III. La procédure de dépôt de la plainte pour abus de faiblesse

La dénonciation d’un abus de faiblesse peut se faire devant le juge civil ou encore le juge pénal. Chacune des actions à sa particularité que nous allons prendre le soin de détailler ici.

Au civil, il est possible de fonder son action sur les vices du consentement lorsqu’il y a eu dol, violences physiques ou morales.

C’est ce que prévoit l’article 1130 du Code civil : « Lerreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsquils sont de telle nature que, sans eux, lune des parties naurait pas contractée ou aurait contractée à des conditions substantiellement différentes. Leur caractère déterminant sapprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné ».

Il est également possible de faire une action en annulation pour trouble mental. C’est ce que prévoient les articles 414-1 et 414-2 du Code civil : « Pour faire un acte valable, il faut être sain d’esprit. C’est à ceux qui agissent en nullité pour cette cause de prouver l’existence d’un trouble mental au moment de l’acte » et « De son vivant, laction en nullité nappartient quà l’intéressé.

Après sa mort, les actes faits par lui, autres que la donation entre vifs et le testament, ne peuvent être attaqués par ses héritiers, pour insanité desprit, que dans les cas suivants : 1° Si lacte porte en lui-même la preuve dun trouble mental ; 2° Sil a été fait alors que lintéressé était placé sous sauvegarde de justice ; 3° Si une action a été introduite avant son décès aux fins douverture dune curatelle ou dune tutelle ou aux fins dhabilitation familiale ou si effet a été donné au mandat de protection future. Laction en nullité séteint par le délai de cinq ans prévu à larticle 2224 ».

Seule la personne vulnérable, victime de l’abus de faiblesse, pourra porter plainte contre l’auteur dudit abus de faiblesse. Les proches de la victime ne sont pas autorisés à porter plainte à sa place. C’est la raison pour laquelle certaines poursuites s’avèrent impossibles. Cela dit, les proches ayant personnellement souffert de l’abus de faiblesse auront un intérêt à agir.

De même, à la mort de la victime d’abus de faiblesse, les héritiers pourront également poursuivre l’auteur de l’abus en cas d’atteinte à leur héritage.

En somme, il est possible de dénoncer un abus de faiblesse, et donc de porter plainte, si la victime souffre de cet abus de faiblesse et est directement touchée par celui-ci. Il sera également possible de porter plainte, même si la victime de l’abus de faiblesse ne s’estime pas lésée.

Cette possibilité est ouverte uniquement aux proches de la victime. Il faudra, cependant, que ces derniers souffrent personnellement de cet abus de faiblesse. À défaut, aucune action ne pourra être réalisée.

S’agissant de la saisine du juge civil, il sera nécessaire de se rapprocher du greffe du Tribunal de Justice compétent territorialement. S’agissant de la saisine du juge pénal, la victime de l’abus de faiblesse devra faire face à une procédure plus longue à suivre. Il faudra saisir le Procureur de la République.

Bien sûr, la plainte pourra être déposée dans un commissariat de police. Si le procureur ne donne pas suite à la plainte déposée devant lui, il faudra alors porter plainte directement contre l’auteur de l’abus de faiblesse, par voie de citation directe devant le Tribunal correctionnel compétent territorialement.

SOURCES
ARTICLE L223-15-2 DU CODE PÉNAL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000020632131/
ABUS DE FAIBLESSE : https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F35140
ARTICLE 1137 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000036829827/
ARTICLE 8 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000034099781/
LOI N° 2017-242 DU 27 FÉVRIER 2017 PORTANT RÉFORME DE LA PRESCRIPTION EN MATIÈRE PÉNALE : https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000034096721/
ARTICLE 1130 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000032040901/
ARTICLES 414-1 ET 414-2 DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006070721/LEGISCTA000006136230/#LEGISCTA000006136230

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