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Prendre un avocat pour rompre une indivision

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À l’occasion de l’ouverture d’une succession, le patrimoine du défunt va être partagé.

Mais avant que les opérations de partage soient effectuées, les héritiers sont collectivement propriétaires du patrimoine. Cet état s’appelle l’indivision successorale.

Dans l’indivision, les héritiers, disposent tous de droits de même nature. Ils ne peuvent ainsi disposer d’un droit exclusif sur une partie déterminée du patrimoine.

L’indivision est un mode de gestion transitoire, il n’est généralement pas fait pour durer, et cela se comprend par la complexité de la gestion collective. Beaucoup de règles du droit de l’indivision requièrent l’approbation de la majorité, la majorité qualifiée ou l’unanimité. Cette technique implique donc une entente des coindivisaires.

Dans beaucoup d’indivisions successorales, les héritiers ne parviennent à s’entendre sur une gestion durable et coordonnée, si bien qu’il peut être nécessaire d’y mettre fin. Ainsi, le Code civil pose, à l’article 815, un principe cardinal : « nul ne peut être contraint à demeurer dans lindivision et le partage peut toujours être provoqué, à moins quil ny ait été sursis par jugement ou convention ». Malgré une affirmation plutôt entraînante, mettre fin à une indivision n’est pas chose aisée et il est recommandé de faire appel à un avocat en la matière.

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Les différentes options de rupture d’une indivision sont les suivantes :

En matière de rupture de l’indivision, plusieurs solutions sont possibles : vendre ses droits à un autre héritier (I) ; vendre ses droits à un tiers (II) ; organiser un partage amiable (III) ; quitter une indivision judiciairement (IV). Nous présenterons, au travers de cet article, les avantages, inconvénients et enjeux de ces quatre solutions.

I. Quitter une indivision en vendant ses droits à un autre héritier

S’agissant de la vente de ses droits à un autre héritier, cette procédure est appelée une licitation. La procédure doit être recommandée parce que plus aisée. Les droits restent ainsi « en famille ». Il s’agit d’un acte important au regard du patrimoine et des coindivisaires. Aussi, la participation d’un notaire est obligatoire.

Il faut rappeler à ce stage que « chaque indivisaire dispose dune quote-part abstraite, égale ou non, dans lindivision, sur laquelle il exerce les prérogatives du propriétaire dans la limite de celles, identiques, des autres indivisaires » (Dalloz, Fiches d’orientation – 2020).

La procédure de licitation est relativement aisée si, et seulement si, les indivisaires sont d’accord sur le montant des parts à céder. En effet, dans ce cas, le notaire rédigera un acte de vente et l’indivisaire pourra sortir de l’indivision.

Dans le cas contraire, des litiges peuvent apparaître et un expert devra être nommé pour évaluer le ou les biens. L’expert peut être proposé par les avocats ou par le notaire pour éviter les conflits. Le fait de disposer d’un nombre important de parts peut jouer énormément et il faut citer ainsi l’article 826 du Code civil qui dispose : « l’égalité dans le partage est une égalité en valeur ».

Ainsi, chaque copartageant reçoit des biens pour une valeur égale à celle de ses droits dans l’indivision. S’il y a lieu à tirage au sort, il est constitué autant de lots qu’il est nécessaire. Si la consistance de la masse ne permet pas de former des lots d’égale valeur, leur inégalité se compense par une soulte.

La soulte est ainsi le surplus monétaire qui permet d’atteindre une égalité de partage : du fait d’un manque de biens ou droits, l’héritier recevra une somme d’argent. Il faudra à tout prix préserver cette équivalence des parts afin de ne pas entraîner d’autres litiges.

Un arrêt intéressant du 9 septembre 2020 est venu préciser que : « la licitation dun bien dépendant dune indivision successorale au profit dun membre de cette indivision vaut partage. Une telle licitation valant partage a un effet déclaratif pour lindivisaire attributaire du bien, qui conduit а regarder lintéressé comme ayant exercé un droit de propriété sur le bien qui lui est échu depuis lorigine de lindivision successorale, alors même quil ne serait entré dans cette dernière que par succession dun indivisaire originel » (Conseil d’État – 8ème et 3ème chambres réunies – 9 septembre 2020 / n° 436 712).

II. Quitter une indivision en vendant ses droits à un tiers

Il est également possible de quitter une indivision en vendant ses droits à un tiers. Cette procédure n’est pas dénuée d’intérêt dans le cas où les autres coindivisaires ne souhaiteraient pas acquérir de nouveaux droits.

Elle peut même permettre au coindivisaire de proposer un prix plus élevé que celui auquel il aurait pu céder ses parts auprès d’un coindivisaire. Il faut néanmoins préciser que cette procédure doit suivre un processus particulier, les coindivisaires détenant un droit de préemption sur les droits.

En effet, l’article 815-14 du Code civil dispose : « lindivisaire qui entend céder, à titre onéreux, à une personne étrangère à lindivision, tout ou partie de ses droits dans les biens indivis ou dans un ou plusieurs de ces biens est tenu de notifier par acte extrajudiciaire aux autres indivisaires le prix et les conditions de la cession projetée ainsi que les nom, domicile et profession de la personne qui se propose d’acquérir.

Tout indivisaire peut, dans le délai dun mois qui suit cette notification, faire connaître au cédant, par acte extrajudiciaire, quil exerce un droit de préemption aux prix et conditions qui lui ont été notifiés. En cas de préemption, celui qui lexerce dispose pour la réalisation de lacte de vente dun délai de deux mois à compter de la date denvoi de sa réponse au vendeur.

Passé ce délai, sa déclaration de préemption est nulle de plein droit, quinze jours après une mise en demeure restée sans effet, et sans préjudice des dommages-intérêts qui peuvent lui être demandés par le vendeur. Si plusieurs indivisaires exercent leur droit de préemption, ils sont réputés, sauf convention contraire, acquérir ensemble la portion mise en vente en proportion de leur part respective dans l’indivision ».

Il faut préciser que « le droit de préemption de lart. 815-14 nest applicable quen cas de cession de droits dans le bien indivis, non en cas de cession du bien indivis lui-même » (Cour de Cassation, Chambre civile 1, du 30 juin 1992, 90-19.052, publié au bulletin). E

n cas d’échange, la disposition précitée n’est pas non plus applicable : « Le droit de préemption de l’art. 815-14 ne peut trouver lieu а application en cas d’échange, et non de cession, l’indivisaire désireux d’exercer ce droit se trouvant alors dans l’impossibilité absolue de fournir au coéchangiste la prestation convenue » (Cour de Cassation, Chambre civile 1, du 21 mai 1997, 95-12.460, publié au bulletin).

S’agissant du coût de l’opération en cas d’usage du droit de préemption : « lindivisaire qui exerce son droit de préemption se substitue à lacquéreur évincé en tous ses droits et toutes ses obligations (commission due à lagent immobilier) » (Cour de Cassation, Chambre civile 1, du 26 mars 1996, 93-17.574, publié au bulletin) Il en demeure qu’il devra respecter le prix fixé ou demander l’intervention d’un tiers estimateur.

Dans le cas d’une vente des droits à un tiers, il est d’abord nécessaire de notifier, par voie d’huissier, les autres héritiers de cette vente projetée, accompagnée du nom de l’acheteur, de son domicile et sa profession. Les autres héritiers pourront ainsi se positionner pour le rachat de ces parts.

III. Quitter une indivision avec un partage à l’amiable

Le partage amiable représente, selon nous, la solution la plus pérenne et la plus acceptée par les coindivisaires. L’article 835 du Code civil précise ainsi : « si tous les indivisaires sont présents et capables, le partage peut intervenir dans la forme et selon les modalités choisies par les parties. Lorsque lindivision porte sur des biens soumis а la publicité foncière, lacte de partage est passé par acte notarié ».

Cette procédure particulière requiert de respecter les conditions de forme afférente aux biens : « le partage peut être conclu par acte sous seing privé ; lorsqu’il est soumis а publicité foncière, il doit être passé par acte notarié, cette formalité ayant pour but d’assurer l’effectivité de la publicité obligatoire, mais le défaut d’authenticité de l’acte n’affecte pas sa validité » (Arrêt n° 1162 du 24 octobre 2012 (11-19.855) – Cour de cassation – Première chambre civile). Dans le cadre d’un tel partage, tous les indivisaires doivent être réunis afin de sceller leur accord dans un acte signé collectivement.

Naturellement, les mineurs, les présumés absents et les personnes sous protection juridique n’ont pas à être présents.

Dans ce cas, l’article 836 du Code civil prévoit que : « si un indivisaire est présumé absent ou, par suite déloignement, se trouve hors détat de manifester sa volonté, un partage amiable peut intervenir dans les conditions prévues à larticle 116. De même, si un indivisaire fait lobjet dun régime de protection, un partage amiable peut intervenir dans les conditions prévues aux titres X, XI et XII du livre Ier »

Cependant, une acceptation du tacite du projet de partage amiable pourra être valable : « lacceptation tacite du projet de partage établi par un notaire caractérise lexistence dun partage définitif dont le seul comportement dune partie (versement dune fraction seulement de la soulte) na pu entraîner la résolution » (Cour de cassation – Première chambre civile – 13 octobre 2020 / n° 11-20.511).

Il faut donc être éminemment précis et consciencieux dans la gestion d’une indivision. Une abstention pourrait en ce sens, valoir acceptation. De ce fait, il est recommandé de se faire accompagner d’un avocat.

Il faut enfin préciser qu’un partage amiable seulement partiel est également possible en vertu de l’article 838 du Code civil : « un partage partiel suppose laccord de tous les co-indivisaires alors même que la demande en est faite au cours de linstance en partage global des biens héréditaires; en effet, même dans cette dernière hypothèse, le partage partiel peut avoir pour résultat dempêcher la formation de lots égaux en nature ou en valeur dans le partage définitif en distrayant de la masse un certain nombre de biens dépendant de la succession » (Cour de Cassation, Chambre civile 1, du 11 décembre 1973, 71-14.111, publié au bulletin).

III. Quitter l’indivision judiciairement

En matière de rupture judiciaire de l’indivision, il faut dire, comme sorte de prérequis, que la présence d’un avocat est obligatoire si la succession en cause dépasse le montant de 5000 euros.

S’agissant d’une rupture judiciaire, l’article 815-4 du Code civil précise : « si lun des indivisaires se trouve hors détat de manifester sa volonté, un autre peut se faire habiliter par justice à le représenter, dune manière générale ou pour certains actes particuliers, les conditions et létendue de cette représentation étant fixées par le juge ».

Cette disposition permet ainsi à un indivisaire d’en représenter un autre, qui souhaite agir judiciairement. Dans ce cas, le second indivisaire devra saisir le tribunal judiciaire (exclusivement compétente en la matière) pour recevoir habilitation à représenter celui qui est hors d’état de manifester sa volonté.

S’agissant de l’étendue de la représentation, il faut préciser que le tribunal dispose d’une interprétation souveraine, il pourra donc statuer comme bon lui semble au vu des éléments en présence. L’un des indivisaires va alors donner son consentement à la place de celui qui est empêché. L’indivisaire empêché aura néanmoins la qualité de partie à l’acte (Civ.2 – 12 juillet 2020).

D’autre part, des autorisations judiciaires permettant de passer outre le consentement d’un indivisaire, et sans que celui-ci ne soit représenté. Cela rend la sortie plus facile, mais plus conflictuelle. Ce recours au juge est cependant borné à l’obstruction : il s’agira notamment d’actes empêchés par un coindivisaire et qui mettent en péril l’intérêt commun (articles 815-5 à 815-7 du Code civil).

Le Président du tribunal judiciaire, saisi par requête, pourra également ordonner toute mesure nécessaire à la conservation du bien et correspondant à l’intérêt commun des coindivisaires. Ces mesures urgentes pourront être de différents ordres : interdiction du déplacement de certains biens (article 815-7 du Code civil), faire nommer un séquestre (article 815-7 du Code civil) voir,  permettre la vente d’un bien indivis en cas d’urgence.

Dans ce cas, l’indivisaire récalcitrant, n’aura pas à consentir à la mesure. Et les autres indivisaires pourront avancer en faisant outre de son consentement. Cela peut être particulièrement utile, mais il ne faut pas écarter le coût et la durée d’une telle mesure.

La formation de jugement pourra également, si une requête intervient en ce sens, ordonner la licitation du ou des biens. Une vente aux enchères sera alors organisée et le fruit de cette vente sera réparti entre coindivisaires.

SOURCES :
ARTICLE 815 ET SUIVANTS DU CODE CIVIL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006070721/LEGISCTA000006117929/#LEGISCTA000006117929
CONSEIL D’ÉTAT – 8ÈME ET 3ÈME CHAMBRES RÉUNIES – 9 SEPTEMBRE 2020 / N° 436 712 : https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000042322408
COUR DE CASSATION, CHAMBRE CIVILE 1, DU 30 JUIN 1992, 90-19.052, PUBLIÉ AU BULLETIN : https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007029062/
COUR DE CASSATION, CHAMBRE CIVILE 1, DU 21 MAI 1997, 95-12.460, PUBLIÉ AU BULLETIN : https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007036036/
COUR DE CASSATION, CHAMBRE CIVILE 1, DU 26 MARS 1996, 93-17.574, PUBLIÉ AU BULLETIN : https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007035160/
ARRÊT N° 1162 DU 24 OCTOBRE 2012 (11-19.855) – COUR DE CASSATION – PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE : https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/premiere_chambre_civile_568/1162_24_24424.html
COUR DE CASSATION, CHAMBRE CIVILE 1, DU 11 DÉCEMBRE 1973, 71-14.111, PUBLIÉ AU BULLETIN : https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000006991759